Un bateau de migrants a fait naufrage près de Lampedusa, le 3 octobre 2013. Ci-dessus, des corps de victimes sont rassemblés dans le port de cette île italienne. (NINO RANDAZZO/EPA/MAXPPP)
Nouveau drame de l’immigration en Italie : un bateau transportant entre 450 et 500 migrants somaliens et érythréens, venus de Libye, a fait naufrage jeudi 3 octobre près de la petite île de Lampedusa dans le sud de l’Italie. Bilan provisoire fourni par le vice-Premier ministre italien Angelino Alfano : 93 morts et 151 rescapés. Environ 200 personnes sont portées disparues. Egalement ministre de l’Intérieur, Alfano a lancé un appel pour que l’Union européenne aide l’Italie après ce “drame européen et pas seulement italien”.
“Les recherches sont encore en cours, pour retrouver des rescapés”, a indiqué un porte-parole des garde-côtes, sans grand espoir toutefois, les naufragés ayant passé déjà plus de six heures dans l’eau.
“C’est une horreur, une horreur ; ils n’arrêtent pas d’apporter des corps”, a déclaré en pleurs la maire de Lampedusa, Giusi Nicolini, qui a déploré aussi la mort de femmes et d’enfants. Avant d’ajouter : “Il faut que les caméras de télévision viennent ici, montrent les cadavres, sinon c’est comme si ces tragédies n’existaient pas”. Selon Pietro Bartolo, un responsable sanitaire à Lampedusa, figurent parmi les victimes un garçonnet de 3 ans et une fillette de 2 ans.
Le nombre de victimes ne cessant de s’accroître, les corps qui se trouvent pour l’instant dans le port de Lampedusa ont commencé à être transférés en ambulance dans un hangar de l’aéroport. Selon les enquêteurs, les passagers du navire ont mis le feu à des couvertures pour signaler leur présence à des navires marchands. En raison du carburant, le navire a pris feu et coulé. D’après les médias, un jeune Tunisien, recueilli lui-aussi, aurait été reconnu par les survivants comme l’un des passeurs et arrêté par la police.
L’UE doit intensifier ses efforts pour éviter ces “tragédies”
Les migrants ont d’abord été secourus par des bateaux de tourisme “alertés par des cris”. L’alerte a été donnée par des bateaux de pêche qui se trouvaient dans la zone. Interrogés par des médias, des rescapés sur place ont dit être partis deux jours plus tôt de Misurata en Libye et que des bateaux de pêche “les ont vus mais ne leur ont pas porté secours”.
La Commission européenne a appelé l’Union Européenne et ses Etats membres à intensifier leurs efforts pour éviter des “tragédies” comme celle-ci. “L’Europe doit accroître ses efforts pour prévenir ces tragédies et montrer de la solidarité à la fois avec les migrants et avec les pays qui connaissent un afflux croissant de réfugiés”, a déclaré la commissaire européenne en charge des Affaires intérieures, Cecilia Malmström.
Le pape qui s’était rendu pour son tout premier voyage hors de Rome à Lampedusa début juillet a parlé de “honte” face aux “nombreuses victimes de cet énième naufrage”. Le chef du Haut-commissariat de l’ONU pour les réfugiés Antonio Guterres s’est dit “choqué par ce drame” et “bouleversé par la montée du phénomène des migrants et des personnes fuyant les conflits et périssant en mer”.
Plus de 22.000 migrants débarqués depuis le début de l’année
Qualifiant le drame “d’immense tragédie”, le chef du gouvernement italien Enrico Letta a suspendu l’intense activité politique prévue, au lendemain d’une crise qui avait conduit le premier ministre à demander la confiance. A l’unisson d’Angelino Alfano, plusieurs hommes politiques italiens ont demandé à l’Europe de faire davantage : “L’Italie et l’Europe doivent se doter de politiques adaptées de surveillance” des côtes pour éviter de telles “tragédies”, et “d’asile”, a demandé le chef du Parti Démocrate, principale force de gauche, Guglielmo Epifani.
Depuis le début de l’année, plus de 22.000 migrants ont été débarqués sur les côtes du sud du pays, soit près de trois fois plus que sur l’ensemble de 2012. Un autre navire a d’ailleurs débarqué au cours de la même nuit à Lampedusa avec 463 migrants, provenant apparemment de Syrie.
Lundi, 13 immigrés – pour la plupart Erythréens – s’étaient noyés en tentant de rejoindre la côte près de Raguse, dans le sud-est de l’île principale de Sicile, après avoir sauté ou avoir été jetés par des passeurs d’une embarcation transportant environ 200 migrants et réfugiés. Début août, un drame semblable s’était produit sur une plage de Catane dans l’est de la Sicile quand six Egyptiens s’étaient noyés en pensant être arrivés à terre, quand leur embarcation s’était ensablée non loin du rivage.