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Interview du président de la République à l’occasion du 4è anniversaire de son accession au pouvoir

Monsieur le président de la République, sous quel signe placez-vous la quatrième année de votre mandat ? Sous le signe de la paix?

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Ibrahim Boubacar Kéïta: L’espoir. L’espoir et aussi, sans me payer de mot, la paix. Souvenez-vous, nous ne fûmes pas toujours dans une posture pareille où il n’y a pas de belligérance entre les forces armées maliennes et les groupes armés. Certes, il y a depuis quelques temps une insécurité qui s’est transportée dans le centre du Mali, laquelle d’ailleurs est objet de tous nos soucis aujourd’hui aussi bien politiques que militaires et sécuritaires. Et ça c’est également l’objet d’un traitement par notre force conjointe de G5 Sahel. Mais il reste que si l’on regarde la situation d’ensemble du Mali aujourd’hui, il n’y a pas de belligérance. Cela est un fait à souligner avec beaucoup de force. Ce n’est pas toujours le cas et il n’était pas évident et aisé que l’on y parvienne. On y est aujourd’hui et l’effort pour la paix ne s’est jamais atténué. Grâce à l’engagement de chacun et de chacune dans ce pays, nous sommes parvenus à l’Accord pour la paix et la réconciliation. Ce n’était pas une tâche aisée. La tâche était difficile, ardue, laborieuse. Mais là, c’est le lieu de rendre un hommage vibrant à toutes les Maliennes et à tous les Maliens de bonne foi, de bonne volonté qui ont compris les enjeux, qui ont soutenu de toutes leurs forces les efforts du gouvernement pour l’atteinte de l’objectif d’un accord pour la paix et la réconciliation qui n’est pas la panacée (je l’ai toujours dit) mais qui a au moins le bonheur de nous offrir un cadre dans lequel nous pouvons évoluer avec constance, avec vigueur vers une paix réelle, souhaitable et durable voulue par les Maliens et dont nous n’oublierons jamais que cette quête de paix fut à l’origine de notre présence ici aujourd’hui dans ce palais de Koulouba. Donc aujourd’hui, l’espoir est, les efforts de paix se poursuivent.

Monsieur le président, vous avez dit quête de la paix. Vous qui êtes un connaisseur de la littérature médiévale, c’est une espèce de Comte du Graal?  

Ibrahim Boubacar Kéïta: Non sûrement pas. Ça n’a rien avoir avec le Graal. Je crois que là nous arriverons Inchallah à nos fins ! Le Graal est une mission pratiquement impossible. Ce n’est pas une quête du Graal, c’est une quête du possible. Et les faits l’ont déjà démontré. Cette paix sera atteinte et achevée au Mali dans les temps à venir Inchallah. Les prémices sont là. Certains souffles nous l’indiquent assez clairement. Il est vrai que là aussi certains grands esprits ont raillé l’arrivée du gouverneur Ichrach à Kidal! Mais que l’on revoit les images, il a été accueilli par toute la direction de la CMA dans une ambiance fraternelle et conviviale. Cela est un signe des temps. Et le reste suivra Inchallah!

 Monsieur le président, comment se porte le Mali après avoir vu l’arrivée du gouverneur Ichrach à Kidal, l’image d’un festival à Goundam, la signature de la trêve entre la CMA et la Plateforme et l’image du gouverneur de Ménaka à Ménaka?

Ibrahim Boubacar Kéïta: J’en savoure le bonheur. Et vous avez vu les retrouvailles fraternelles entre le gouverneur Ichrach et les frères à Kidal. Cela est un très bon signe, d’un symbolisme très fort. Je pense qu’avec la bonne volonté des fils du Mali, rien n’est hors de portée. Ces efforts-là seront encore accrus. Pour notre part au niveau du gouvernement, nous ferons tout ce qui sera notre possible pour faire en sorte que ce qui est actuellement en train soit suivi de manière vigoureuse et avec des fondations très solides. La paix, le Mali en a besoin. Notre peuple la réclame et elle est la condition sine qua non de toute autre chose. Tout le développement que nous souhaitons pour ce pays, singulièrement pour les régions du nord qui ont accusé un certain déficit appréciable dans de domaines tels que les infrastructures. Que ces équipements puissent être réalisés, il faut la paix. Figurez-vous que quand on commence un chantier si l’on doit l’arrêter pour fait d’insécurité, cela va décourager les entreprises les plus généreuses et beaucoup ont dû abandonner la partie. Cela n’est pas normal et cela n’est pas à hauteur de mérite des populations du Mali. Il faut qu’elles aient ce qu’il faut au niveau des équipements dans tous les domaines aussi bien au niveau social, infrastructurel que logistique (les routes) et au niveau des équipements de développement. Il faut que tout cela soit en place dans les conditions idoines. Et pour ce faire, il nous faut la paix. Donc, notre quête de paix est une quête de paix obligée. Nous n’avons pas le choix. Il n’y a pas d’alternative à la paix et il n’y pas non plus d’alternative à l’Accord pour la paix et la réconciliation. S’il y en a une qu’on nous l’indique, nous sommes preneurs. Nous disons aujourd’hui qu’à l’état actuel des choses, avec l’accompagnement international tel qu’il a été vigoureusement mis en place par le conseil de sécurité des Nations Unies, nous n’avons pas d’alternative à l’Accord pour la paix et la réconciliation au Mali tel qu’il a été signé à Bamako, tel qu’il a été négocié pendant des mois durant en Alger. Cela aujourd’hui est le cadre dans lequel nous évoluons, et nous évoluons heureusement.

 La quête de la paix comporte plusieurs composantes. Il y a la composante militaire, la composante sécuritaire. Voudriez-vous nous dire quelques mots sur ces deux composantes?

Ibrahim Boubacar Kéïta: Nous venons de très très loin. Et vous l’avez vu. Dès l’abord, mon souci était d’emmener l’armée du Mali à hauteur de mission. L’armée, c’est une mission, des moyens. Quand on confie une mission aux forces armées, il faut leur donner les moyens de cette mission. Nous étions bien loin du compte. Nos armées n’étaient pas équipées. Nos armées n’étaient pas en mesure de remplir les missions qui leur étaient confiées. Donc il a fallu faire cet effort-là, qui est en train aujourd’hui. Nous avons fait un bout de chemin mais il reste beaucoup encore à faire. Mais il y a un mieux. Nous n’avions aucun vecteur aérien (aucun hélicoptère, aucun avion de transport). Depuis quelques temps, chacun a pu le constater, nous avons acquis un avion de transport (un cadra tout neuf) et un hélicoptère puma. Nous avons aussi des acquisitions qui doivent venir ces jours ci. Je pense que tout cela aujourd’hui va donner du cœur à nos combattants qui ont ainsi un appui aérien absolument utile. Et si l’on sait aussi l’enclavement de certaines de nos zones, l’hélicoptère est indispensable dans un pays comme le Mali. Son étendue géographique est appréciable. 1 248 000 Km2, c’est encore pas mal. Et je pense que dans un tel espace, il nous faut une couverture aérienne à hauteur de souhait. Nous sommes en train de le faire. Nous avons pour cela également un programme de construction d’infrastructures aéroportuaires et d’abris pour ces équipements aéronautiques. Cela aussi est un engagement du gouvernement et qui est inclus d’ailleurs dans la Loi de programmation militaire, laquelle a été votée par notre Assemblée en août 2016. Je pense que ses effets commencent à se produire et vont continuer.

Nous avons également le souci des conditions des hommes et c’est une chose à laquelle je tiens énormément. L’Armée du Mali est une armée de mérite. Les hommes qui se battent pour notre pays, pour sa dignité, son honneur et son intégrité méritent qu’on songe à eux. Au-delà des  équipements, des hommes sur le terrain, leurs familles également, en cas de détresse, ne seront plus oubliées. Nous avons ainsi prévu le cas de figure qui arrive dans toutes les armées, les grands blessés auront droit à l’équivalent de cinq années de salaire. Nous avons également pour les militaires, hélas, qui disparaissent pendant les combats, qui tombent sur le champ d’honneur, ceux-là également ne seront pas oubliés. Leurs ayant droits auront droit à l’équivalent de 10 années de leur salaire. La Fondation pour la solidarité sera là également pour que désormais ces pupilles de la nation malienne soient prises en charge en cas de perte de leurs parents. Les enfants sont pris en charge par l’Etat malien jusqu’à leur majorité. Cela est un devoir régalien pour tout Etat qui se respecte et l’Etat malien ne peut pas être en reste par rapport à cela. Il y avait un retard de prise en charge dans ce domaine là et nous l’avons fait. Nous avons le souci constant de la mise en œuvre de nos forces armées. Nous avons, avec nos amis européens, le programme de l’EUTM (European union training mission) qui forme les bataillons de GTIA ( groupement tactique interarmes) à Koulikoro. Nous avons à peu près huit. Nous sommes également dans des programmes de formation dans d’autres domaines. Tous les domaines de la vie militaire sont pris en charge, d’une manière ou d’une autre, par telle ou telle coopération bilatérale ou multilatérale. Cela est aujourd’hui extrêmement important pour nous. Si l’on songe aussi que nous avons de nouvelles obligations dans le cadre de G5 Sahel où notre Force conjointe doit être mise en place à Sévaré où je dois me rendre ces jours ci pour faire le constat de l’effectivité de la présence de l’Etat-major de G5 Sahel. Cela également nous pose de nombreuses obligations de performance et de qualification. Nous sommes à pied d’œuvre pour que nos forces soient à hauteur de mission.

 Nous avons dit que la crise est multidimensionnelle. La solution certainement le sera et il y a un élément important en terme de synergie. Qu’est-ce que vous entreprenez aujourd’hui pour briser la glace, pour emmener la confiance?

Ibrahim Boubacar Kéïta: Aujourd’hui, je pense qu’il y a des éléments très positifs. Quand on commençait cette affaire de G5 Sahel, là aussi il y avait beaucoup de moqueries, de doute et de scepticisme comme toujours. Mais nous y avons cru. Nous y croyons parce que nous avons compris que chacun des pays, pris individuellement, n’avait pas de grande chance de présence réelle, effective et à hauteur de souhait dans sa défense territoriale et dans la défense de notre espace commun : le Sahel. Et qu’il fallait avoir cette intelligence de mutualiser nos forces, nos moyens d’information, d’intelligence comme on le dit. Et mettre en commun également nos moyens financiers pour que nos forces soient une force convaincante, une force ad hoc qui puisse faire face à la menace. Et je pense que cela est aujourd’hui acquis et le monde entier sait désormais que le G5 Sahel est une composante essentielle dans la lutte contre le terrorisme dans le Sahel en particulier et dans le monde en général parce que la lutte dans le Sahel participe de la lutte générale contre le terrorisme. Le Sahel est un espace de passage vers d’autres horizons, notamment vers nos amis européens qui ont bien compris qu’il y avait là un enjeu qui dépassait de loin le seul cadre du Sahel. Donc, ce n’est pas uniquement une œuvre de bienfaisance mais un intérêt bien compris que ces Etats ont compris pourquoi nous sommes ensemble dans cet engagement.

 Monsieur le président, connaissant votre attachement au fondement de notre culture, notamment la notion de dialogue, de concertation, de partage, est-ce que c’est pour cela que vous avez pensé qu’il était important que les leaders communautaires, les leaders religieux soient également impliqués dans la recherche de la solution? Est ce que c’est pour cela que l’imam Dicko a sillonné l’ensemble de la région de Kidal et d’autres localités?

Ibrahim Boubacar Kéïta: Vous savez, la chance d’avoir été un peu introduit dans l’histoire du Mali, dans l’histoire des civilisations du monde également, j’en remercie mes maîtres d’où qu’ils fussent et Sorbone en particulier, je sais que les fondements culturels sont les meilleurs ferments de résolution de crise dans toute société. Les éléments culturels, les éléments qui sont à la base de civilisation, les éléments porteurs de valeurs sociétales, ces éléments sont essentiels. Quand on les oublie, on oublie l’essentiel. Quand on oublie d’impliquer ceux-là qui sont les gardiens non pas du temple mais des valeurs qui nous firent respecter, des valeurs qui nous firent connaître par le passé, un passé pas si lointain que cela, si l’on oublie de les impliquer, si l’on oublie de les considérer, si l’on oublie qu’ils peuvent être partie utile à la décision finale, l’on a tout faussé, l’on a tout faux. C’est pour cela que ma conviction demeure. Elle a toujours été à ce niveau-là d’égale qualité que ces autorités traditionnelles, ces légitimités traditionnelles doivent toujours être considérées, consultées et impliquées dans la recherche de solutions à nos problèmes. Chaque fois que nous l’avons fait, nous avons été heureux de le faire, cela nous a été bénéfique. Vous avez vu récemment dans notre pays ce qui s’est passé. Je crois que cela est utile. Je pense que c’est cette intelligence qui a fait que les négociateurs en Alger ont souhaité que cela puisse être institutionnalisé désormais, notamment à travers l’institution d’un Sénat. Un Sénat où l’on est convié à venir avec d’autres forces vives de la Nation, qui celles-là auraient été élues, à discuter des questions de l’heure, de la Nation, les questions les plus urgentes et les plus importantes.

Monsieur le Président, nous avons parlé du volet « armée » mais il y a aussi un aspect important sur lequel il faut peut-être revenir, c’est la force spéciale au niveau de la sécurité.

Ibrahim Boubacar Keïta : La FORSAT comme on l’appelle, est un objet de fierté pour moi. Notre force spéciale anti-terroriste fait du bon boulot et je remercie son jeune commandant, je remercie ses éléments qui sont braves, qui sont courageux, qui sont de grande humilité, mais de grande efficacité, et d’un professionnalisme à tout épreuve. Ils sont notre fierté aujourd’hui. Je ne souhaite pas, je ne souhaite pas mais si d’aventure un évènement du genre du campement de Kangaba s’invitait encore, ils sont là, ils ont agi avec professionnalisme dans un espace pas évident, escarpé, et de nuit et on a vu les résultats. Je crois que cet instrument là qui nous a été imposé par les circonstances, il est désormais une unité d’élites dont nous aurons du mal à nous passer. Et je crois qu’elle est la bienvenue.

Monsieur le Président nous avons un autre chapitre toujours pour ce qui concerne la paix. La clé de voûte c’est bien l’Accord pour la Paix et la Réconciliation Nationale issu d’Alger. Vous avez longtemps parlé du train de la Conférence d’Entente Nationale. Il est arrivé certainement à destination. Que faites-vous des conclusions finales ? Y a-t-il des difficultés dans la mise en œuvre ? Les résultats sont-ils là ?

Ibrahim Boubacar Keïta : Ils sont là ! Il y a deux instruments en particulier que j’aimerai bien citer. D’abord la Charte, un corpus de valeurs partagées, de valeurs communes, d’éléments sur lesquels les enfants du Mali sont d’accord pour leur vivre en commun, leur projection vers l’avenir et tout ce qui rend la vie possible en société. Cela et également les règles de vie entre les différentes communautés nationales, tout cela fait l’objet de la Charte nationale. Vous savez, à la faveur de cette affaire-là nous avons été confrontés à des difficultés historiques, d’interprétations, et de situations de localisation, d’où cette cartographie des régions du Mali et des communautés qui est une très bonne trouvaille parce qu’elle permet dorénavant de savoir les questionnements historiques et géographiques qui ont été à l’objet de controverses et de mésentente entre nous et de les aplanir, de les envisager autrement comme des opportunités en réalité pour notre pays, de développement plus rationnel, mieux maîtriser plutôt que de division, de séparation. Donc je pense que la Conférence d’Entente Nationale a fait son travail et son objet était un objet bien connu, bien limité, dessiné par l’Accord pour la Paix et la Réconciliation. C’est le lieu une fois encore de remercier notre aîné, émérite le professeur Baba Hakib HAIDARA pour le travail fabuleux que son équipe et lui ont effectué. Et le train continue.

A la Conférence d’entente nationale, beaucoup de sujets ont été évoqués.  La question du nord et du centre. Là aussi on a beau promener le curseur, il reste bloqué sur deux  noms : Iyad et Koufa. Allez-vous discuter avec eux ?

Ibrahim Boubacar Kéïta : Vous savez dans une société, il y a des règles et toute société qui n’en a pas est anarchique. L’anarchie, c’est le désordre y compris pour le corps humain. Pour le corps humain, c’est la métastase ensuite la mort, ce qui n’est pas souhaitable. Je crois quand un frère choisit le terrorisme, ce frère s’enorgueillit d’égorger des imams au sortir des mosquées. Quand un frère rompt avec la légalité républicaine ou estime que son moyen de dialogue, c’est des attentats, comme ce qu’on a vu au campement de Kangaba tuer des innocents, qu’on le veuille ou non quand cela se produit, on s’exclut soi-même de la concorde nationale et à ce moment-là il y a un moyen de traitement.

Je crois que c’est tout ce que j’ai à dire à ce niveau-là. Il est des éléments essentiels, c’est que nous soyons d’accord sur l’intégrité du territoire national malien, que nous soyons d’accord sur la forme républicaine de l’Etat du Mali, que nous soyons d’accord sur la laïcité, ce sont des choses qui ne sont pas négociables. Je vais vous faire une confidence mais je suis sûr que vous le saviez déjà. Quand notre équipe était en Alger, mon aîné, le Premier ministre Modibo Kéita, m’a appelé pour me dire qu’il y a un blocage sur la question de la laïcité, in fine nos frères n’étaient plus d’accord à parapher un document qui portait cette mention de la laïcité qui était maintenue et réaffirmée. J’ai été très clair, j’ai dit que si cela n’était pas, il n’y avait pas lieu de continuer à discuter et dès lors de reprendre l’avion pour revenir à Bamako, cela n’est pas négociable et surtout quand on voit avec bonheur ce retour heureux du Cardinal Son Eminence Jean Zerbo dans son Mali, comment le Mali peut ne pas être un Etat laïc et multiconfessionnel. Je le dis surtout, en tant qu’ayant depuis quelques années par la grâce des Maliens eu à dire mon mot dans les affaires de ce pays, chaque fois que nous avons été confrontés à des difficultés cela a été un bonheur  d’avoir auprès de nous ces hommes de foi.  Monseigneur Luc Sangaré, notre Père que nous ne pleurons jamais assez, Amara Ly, le Pasteur Kassoum Kéita, c’est ça le Mali. Vouloir un Mali étriqué, hyper cloisonné non ! Notre foi, celle de l’Islam a droit au respect, comme de la Chrétienté a droit au respect et de  l’Eglise évangélique a droit au respect. Donc il y a des choses qui ne sont pas négociables, telle est la question, elle est toute simple. Cela dit tout Malien qui pourrait reconnaître ses torts vis à vis de la nation, capable de repentir sincère, de vouloir joindre l’ensemble national pourquoi pas. Il pourra le rejoindre mais en répondant de ses crimes.

Merci Monsieur le président nous allons passer au second volet de ce débat. Il porte sur le programme d’urgences sociales. Sur la base de la déclaration de politique générale de votre Premier ministre,  vous avez souhaité mettre en musique un certain nombre de projets qui touchent à la vie quotidienne des populations. Ils concernent la santé, l’éducation, la culture et beaucoup d’autres. Pourquoi un tel programme ?

Ibrahim Boubacar Kéïta : D’aucun pourrait y voir un clin d’œil  politicien, je pense que non et qu’on me reconnaît une certaine sensibilité au sort de mes concitoyens, de l’autrui. Je ne pourrais jamais me satisfaire d’un confort qui serait égoïste, de partage solitaire, c’est pas moi. Je peux vous dire que j’ai passé une nuit pas évidente quand on m’a dit ce qui se passait à Daoudabougou et à Niamakoro, j’ai pensé aux enfants et à tous ceux qui étaient dans la détresse hier soir du fait des eaux, ça c’est moi; c’est pour cela ce que j’estime utile à mon confort quotidien, je suis en devoir par la Nation de faire en sorte que l’autre mon frère l’est aussi. C’est pour cela que ce programme n’est pas un programme gouvernemental ordinaire, lequel prend son temps d’études de mise en route trop long pour moi, j’ai souhaité un programme de proximité, de mise en place facile, de montage facile et de financement rapide sinon ça n’aura pas le caractère d’urgence. L’eau, aujourd’hui, est une urgence dont nul ne peut contester la réalité. Et qu’aujourd’hui nous arrivions à mettre en place des programmes de bornes fontaines et de branchements pour cinq mille personnes, que nous ayons également souci que des voies de déserte puissent alléger nos populations lorsqu’elles sont obligées de se déplacer d’un endroit à un autre dans notre pays, que les produits de leur sueur puissent être écoulés dans des marchés de proximité ou lointain, dans un pays comme le Mali  au 21ème siècle que l’électricité ne soit plus un luxe, je crois que cela est de notre devoir. Et quand on veut faire aussi en sorte que le pouvoir d’achat de nos compatriotes soit amélioré et soutenu, il y a des efforts à faire pour fouetter ce qu’il faut à ce niveau-là. Les dossiers habituels  ont tendance à dormir dans les tiroirs des ministères non ! Je crois qu’il y a urgence de mettre en place un mécanisme  qui donne un nouveau dynamisme à ce à quoi je tiens, à ce que j’estime nécessaire et urgent pour le quotidien du Malien, c’est cela l’origine du programme d’urgences sociales et pas autre chose. Il s’agit d’un programme de lutte contre la pauvreté à long terme en construisant des magasins de stockage modernes et réfrigérés par exemple pour les femmes productrices. Si les produits peuvent avoir une plus longue durée de vie, ils ont des chances à être écoulés sur le marché à des prix plus rémunérateurs. Il en va de même pour le programme de pisciculture, l’empoissonnement des bassins piscicoles. Tout cela pour augmenter le disponible alimentaire habituel, l’améliorer en quantité et en qualité. Et là il y a une chaine de froid également à mettre en place via les programmes d’urgences présidentielles et de mise en place de système d’énergie solaire comme on le fera à Koulikoro, comme on le fera ailleurs également dans notre vaste pays à Kayes.  Il faut que partout on sente le souffle des progrès que l’humanité a faits et dont il n’y a pas de raison que notre pays ne bénéficie pas.

 Avant Kabala, il y a les écoles primaires et à ce niveau vous avez promis un certain nombre de dotations. Qu’en est-il ?

Ibrahim Boubacar Kéïta: Cinq cent mille kits scolaires seront distribués à la rentrée prochaine. Je crois que cela est encore insuffisant quand on sait la précarité dans laquelle certains se trouvent encore aujourd’hui qui ont besoin que leurs enfants aillent à l’école comme les autres dans des conditions de scolarité idoines et d’équipements didactiques. C’est avec beaucoup de bonheur que nous allons le faire. Et dès la rentrée aussi, il faudrait que nous arrivions à doter les élèves et étudiants de tablettes et d’ordinateurs comme promis. Cela est en cours. Il y a là un effort réel et nous avons eu conscience aussi qu’il fallait soutenir certains de nos enfants, nous avons initié des cours de soutien à hauteur de 1 milliard de F CFA cette année. Et ça n’a pas été inutile car nous avons relevé une progression de 25 à 46% de bons résultats. Nous avons souci de faire que dans ces domaines sociaux, essentiels pour tout  pays, tout doucement, progressivement mais de manière ferme et irréversible, nous donnions les tendances qui vont imprimer une nouvelle façon de faire au Mali.

 Et la question des logements ?

Ibrahim Boubacar Kéïta: Oui les logements sociaux. Certains logements seront livrés dans les jours à venir aussi bien à Bamako que dans les régions. Nous sommes en train de repenser la formule puisqu’il ne s’agit pas de faire des cagibis pour les familles. Il s’agit de donner des logements décents aux familles maliennes. Les premiers valent ce qu’ils valent mais moi je pense que la famille malienne a besoin d’une concession, elle n’a pas besoin d’un logement où de ta cour tu touches la tête du voisin. Le département est en train de repenser la formule. Il y a un programme ambitieux qui est en route. Un logement décent est l’une des premières choses que tout être réclame. Et si on avait des logements construits sur des données scientifiques qui éviteraient les écoulements d’eaux, on n’assisterait pas à toutes ces catastrophes.

 Monsieur le président, s’agissant toujours des  logements, on a coutume de dire que  quand le bâtiment tout va mais à condition qu’on s’intéresse aux matériaux locaux. La critique qu’on entend souvent est qu’au Mali, on ne s’intéresse pas aux matériaux locaux ?

Ibrahim Boubacar Kéïta: Ah Si ! Ah si ! Ce serait faire injure à notre CNRS nous avons un centre national d’expérimentation du bâtiment qui fait du bon travail. Ils font des essais. Nos jeunes sortants de l’ENI sont là également et proposent leur ingénierie, leur science. Tout cela contribue à réduire les coûts de la construction et donne des bâtiments fiables et durables adaptés à notre climat.

 Monsieur le Président toujours au niveau des logements sociaux, vous avez prévu 1500 logements pour les militaires ? C’est bien ça ?

Ibrahim Boubacar Keïta : Oui à Sébénicoro,

Le recasement Monsieur le président,  on a assisté à une opération de déguerpissement. Qu’est que vous en dites aujourd’hui ?

Ibrahim Boubacar Kéïta: Il est dommage que certains aient cru devoir profiter du désarroi de nos compatriotes, de nos parents pour s’en servir tristement. Peuvent-ils être plus sensibles à la misère des miens que moi. Je ne crois pas. Et je crois même que ceux qui ont été déguerpis savent combien je leur suis proche, ils le savent, ils me connaissent, ils me savent. Ces 5000 cas sont assez éprouvants, ils sont également considérés et pris en charge.  C’est le lieu pour moi de féliciter Youssouf Bathily de la Chambre de commerce qui fait de son mieux. Nous même en avons souci de leur situation avec Adama Sangaré, le maire central et les autres structures faitières. Le Marché Rose est pour moi un vieux souvenir. Je m’y rendais avec ma maman pour les légumes,  c’était une curiosité dans le temps à Bamako. Ce temps béni, on souhaite qu’il puisse revenir que le Marché Rose retrouve ses couleurs d’antan et que la circulation des échanges s’y déroule encore de manière assez avenante et fluide. Les intéressés sont en charge du dossier avec nos services techniques. C’est un monument historique et c’est dommage que l’accès soit aujourd’hui impossible.

 On ne va pas s’étendre sur les chiffres. On dit que les chiffres sont au vert et que les indicateurs sont bons. Comment cela se traduit dans le panier de la ménagère ?

Ibrahim Boubacar Kéïta: j’ai eu un bonheur énorme quand à l’UEMOA, nous avons fait le constat que le Mali est 3ème économie de la zone. Les chiffres sont là. Lorsque nous arrivions, c’était 1,7%, un an après c’était 7,2.% ça a légèrement reculé à 6,5% pour maintenant atteindre les 5,8%. C’est heureux,  c‘est une évolution qu’on note et il y a des facteurs qui l’expliquent. La pluviométrie qui a été au rendez-vous,  notre paysannerie qui est à saluer qui a fait en sorte que nos productions soient montées à hauteur de souhait. Mais en 2014 quand nous avons fait 7,2 de croissance, il y a eu une réduction conséquente de la pauvreté. Ça c’est une preuve qu’il y a une corrélation  entre la croissance économique et la lutte contre la pauvreté. Ce n’est pas négligeable et c’est pour cela que nous allons tout faire pour nous hisser encore à 7% parce qu’on voit l’effet  heureux à ce niveau. La lutte contre la pauvreté est un élément essentiel pour nous, tout ce que nous faisons y contribue. Les choses sont liées il y a un effet. Si la Banque mondiale et le FMI qui ne sont pas complaisant donnent leur témoignage, c’est que les chiffres l’ont vraiment imposé.

 Les augmentations des salaires y contribuent aussi ?

Ibrahim Boubacar Kéïta: il y a aujourd’hui  un constat de 2013 à aujourd’hui il  y a près de 89 milliards investis. Au niveau indiciaire il y a eu 21% d’augmentation, 8 points de rabais au  niveau de l’ITS, tous cela sont des efforts inuits du gouvernement  et les travailleurs le savent. Ils savent que jamais dans l’histoire du Mali un tel effort vigoureux n’a été fait. Ils savent que nous avons soucis d’eux. Nous sommes des travailleurs nous-mêmes et n’oubliez pas que nous fûmes  syndicalistes aussi dans une autre vie. Donc c’est un domaine qui ne nous est pas étranger. Et le sort de nos compatriotes, ceux qui travaillent, de ceux dont le labeur fait marcher le pays, fait vivre le pays ne nous ait pas indifférent. L’Etat fait tout ce qu’il peut dans les conditions qui sont les siennes, pour que ce pays soit un pays de solidarité, de partage où l’on a souci des conditions de service et de vie du travailleur. Et on a également au niveau des allocations familiales on a fait un effort réel 1500 à 3500 et 4000 pour les handicapés ce sont des faits constatables. L’effort social est réel, il est patent.

Monsieur le Président nous allons aborder le troisième volet de cet entretien. C’est le volet politique. Vous avez engagé il y a environ deux mois un projet de révision constitutionnelle qui pour l’instant n’a pas pu aboutir.   On a parlé de l’absence de concertations, mais on a également évoqué l’état de sécurité du pays qui ne permet pas l’organisation d’un tel scrutin. Vous avez été amené donc, M. le président à surseoir à ce projet..

le président, vous avez coutume de dire qu’un président a de longues oreilles, donc vous avez tout vu, vous avez tout entendu, vous avez tout lu. Êtes-vous aujourd’hui à mesure de nous dire quelles sont les raisons profondes qui vous ont emmené à surseoir à ce projet de révision constitutionnelle ?

Ibrahim Boubacar Kéïta: Je crois que, je l’ai dit, me trouvant à la Grande mosquée lors de la prière rituelle de l’Aïd el Adha. Lorsque l’on a la chance d’avoir des éléments de la société qui sont à l’écoute du pays et qui sont de vigilance avérée, qui sont des vigiles de la société, on est responsable heureux quelque part. Parce que  ceux-là veillent sur la cité et tous les frémissements leur sont sensibles, rien ne leur échappe. Quand ceux-là nous ont entrepris des différentes possibilités en vue, nous avons compris que certains n’auraient pas hésité à faire courir à notre jeunesse un danger inutile, alors qu’il n’y avait pas lieu. Nous ne nous en serions jamais consolés qu’un seul jeune malien eût perdu la vie dans de telles circonstances où il n’y avait pas un enjeu qui appelait cela. D’autant que la démocratie qui a le bonheur d’être acclimatée chez nous avait offert déjà toutes les possibilités en une pareille circonstance. Le débat avait eu lieu dans l’enceinte du Parlement comme il se doit, toutes les parties concernées s’étaient exprimées, des retraites parlementaires avaient eu lieu, des amendements avaient été faits dont certains avaient été acceptés. Faire un amendement veut dire qu’on a participé au débat, mais in fine, quand le texte est adopté par le Parlement, en démocratie normale, ce que le Parlement a décidé s’impose. Il y a le respect également des électeurs de ceux qui nous ont envoyés au Parlement. Que nenni, on a dit, on va saisir de droit la Cour constitutionnelle, elle a opiné, elle a estimé qu’il y avait çà et là des éléments qu’il fallait revoir. Nous-mêmes devons dire que le texte, tel qu’il était issu du débat parlementaire avait connu quelques retouches qui nous avaient posé problèmes. Je l’accorde bien volontiers, dès lors tous ces éléments mis ensemble, il n’y avait aucun problème pour nous de faire ce qu’on a fait, de surseoir à cette révision constitutionnelle qui est pourtant incontournable. Pourquoi ? Le Mali ne peut pas continuer à faire cavalier seul ; le Mali est partie d’un ensemble qui s’appelle UEMOA, laquelle organisation a des règles de convergence et des Institutions en partage, parmi celles-ci, il y a notamment cette fameuse Cour des comptes. Elle n’est pas mise en place depuis et aujourd’hui, nous sommes en difficulté, quant au tour de la table nous faisons le point, tous nos États membres frères ont des Cours de comptes, sauf nous. Et alors, chaque fois les mêmes arguments, chez nous la forme n’a pas été possible. Serions-nous éternellement le pays où la réforme sera impossible ? Que non, que craint-on ? Que craint –on ? Le débat parlementaire offre toutes les possibilités de faire et de défaire, et de remanier et d’ajuster. Mais cette Cour-là, elle est incontournable. Or, elle ne saurait être mise en place sans une réforme constitutionnelle, c’est évident. Qu’on veuille ou pas des innovations prévues par l’Accord pour la paix et la réconciliation, notamment le Sénat, mais dans tous les cas, on est obligé d’envisager quelque chose qui va y ressembler. Si l’on admet les uns et les autres dorénavant que nous serions sots de ne pas convier au débat national ces légitimités traditionnelles et historiques qui ont fait la preuve de leur efficacité et de leur utilité. C’est aussi simple que cela. IBK n’a aucun paramètre personnel dans ce débat là et ce n’était pas non plus un président en mal de mandat, qui était à la recherche d’un artifice pour faire subrepticement une réforme qui l’aurait comblée sur ce plan-là. Non, non, non, je suis désolé. Dès lors, c’est très simple.

 le président, quand un président comme vous, vous avez vu ce que vous avez vu, entendu ce que vous avez entendu toutes les composantes de la société. Vous avez tout analysé, y compris votre gouvernement, qu’est-ce que vous allez prendre comme décision maintenant ? Quelles sont les leçons que vous allez tirer objectivement de cette situation ?

Ibrahim Boubacar Kéïta: Merci bien, il y a d’abord le constat effectivement d’un déficit de concertations, on va y remédier, c’est évident. Je ne serai jamais homme à taire la réalité, à taire ce qui est, à taire ce par quoi nous avons pu trébucher, c’est vrai, donc  avec les uns et les autres, tous nos frères, là aussi, il n’y a aucun complexe, ni aucune espèce d’exclusive, exclusive aucune, nous allons reprendre l’échange au plan national. Faire en sorte que notre ensemble national également, sur ce terrain-là, comme sur l’ensemble des questions nationales, puisse en connaître et qu’on puisse dessiner ensemble les pistes de demain. Nous ne sommes pas seuls concernés, l’avenir du Mali, c’est pas IBK seulement. Et puis,  même cette histoire de question de président, IBK est concerné aujourd’hui, mais pour combien de temps ? Dieu seul le sait. Donc, quand on pose les problèmes, qu’on arrête et qu’on évite souvent de les hyper personnaliser. C’est tel aujourd’hui, demain, c’est toi, c’est toi, penses à ça, je crois que c’est aussi simple que cela. Moi, je n’ai pas de problème par rapport à l’essentiel parce que je ne l’ai jamais mis en cause. Je pense que l’une des leçons de toute cette affaire-là, c’est que notre pays est un beau pays, est un bon pays. Si les Maliens ne sont pas ennemis d’eux-mêmes et savent extraire la sève de ce pays-là, je crois que c’est un pays singulier, un pays singulier dans la bonne gouvernance, un pays singulier dans le bien faire entre les citoyens, un pays singulier dans la convivialité et dans le bonheur d’être ensemble, partie d’une Nation, d’une Nation de bonheur, d’une Nation, je dis encore une fois, quand je le dis, qu’on y voit aucune espèce de grandiloquence mièvre ou de vanité, c’est un bonheur d’être Malien. Un bonheur réel, quand je dis : « nous fûmes quand d’autres n’étaient pas », c’est vrai. J’ai le sens de cette antériorité, je la sens, je la savoure, oui elle m’a fait, elle a fait de moi qui je suis.

 Monsieur le président, nous avons senti comment vous viviez intérieurement, intensément cette situation. Au jour d’aujourd’hui, peut-être question philosophique de fond, avez-vous senti la solitude du pouvoir ?

Ibrahim Boubacar Kéïta: Oh ! Que si. Oh que si ! Oh que si ! Oh que si ! Hum ! Hum !  J’ai un ami qui avait un sens de l’humour assez particulier, un éminent professeur d’histoire, un Africain, professeur en Sorbonne, je tairai son nom, animait une belle émission sur les antennes qui aimait souvent dire ça. Il dit mais, y en a qui sont malins qui disent : « Organisons nous, organisons nous», au moment d’aller à la bataille : « Organisons nous, partez». Telle est la situation du chef de l’État, mais ne nous plaignons pas, quand on voit des hommes se battre et que quelques fois, commettre ce qui n’est pas possible ou permis pour l’être, c’est aussi qu’il doit y avoir quelques plaisirs. Le nôtre dans ça, ce n’est pas d’ordre matériel, c’est d’ordre intellectuel, avoir le sentiment d’être utile à un beau et grand pays, un pays d’histoire, un pays de présence avérée au nom des siècles, est une joie réelle. Le seul problème, chaque

jour, chaque seconde, on se pose la question, si je suis à ma place, à hauteur !

Monsieur le président, gérer, c’est décider, vous avez tirez les leçons, est ce que vous allez décider, est ce qu’il y aura un remaniement ministériel au terme de tout cela ? Comment vous allez vous comporter également avec votre majorité, avec l’ensemble de la classe politique, en y incluant l’opposition, comment ça va se passer ? L’homme politique que vous êtes, le président que vous êtes, qu’est ce que vous allez prendre comme décision face à une telle situation ?

Ibrahim Boubacar Kéïta: Vous savez, ma porte est toujours ouverte. Je ne considère aucun Malien comme un ennemi, et même quand on me parle de l’opposition, je dis souvent est-ce qu’on peut être opposé au chef de l’État ? On est opposé à un parti, moi je ne suis plus président de parti. Donc, s’opposer à moi, c’est s’opposer quelque part à soi-même, parce que je ne suis pas un parti, IBK n’est pas un parti. IBK, c’est le Mali, qu’on le veuille ou non. Dans le temps qui m’est imparti, je suis le Mali, donc m’efforcer d’égal partage. On a dit beaucoup de choses, mais si j’avais posé le millième des actes que l’on me prête, le pays ne serait pas ce qu’il est aujourd’hui. L’ostracisme, pas vrai ! Koulouba est l’exemple. J’ai trouvé ici un monde qui est resté pour l’essentiel, il en va aussi de l’administration. Il  y a beaucoup de nominations qui se font aujourd’hui par appel à candidatures, on pourra dire ce que l’on veut, mais tu en es un brillant exemple (Sidiki N’Fa Konate). Ce sont pas les faveurs de ton grand frère qui te valent d’être ici, c’est ta qualité.

Vous savez, dans ce pays, chaque semaine on remanie le gouvernement, chaque semaine, dans la tête des gens, on change de chef du gouvernement. On peut dire ce qu’on veut, moi je sais ce que je ferai pour le Mali, c’est tout, mais quand le débat est faussé, les choses les plus simples deviennent difficiles et même quand  vous faites, dans notre bonne tradition, un geste fraternel à l’endroit d’un frère, on dit, vous voulez l’acheter. Est-ce que le chef de l’État a besoin d’acheter quelqu’un ? Pour quoi faire ? Pourquoi je vais acheter quelqu’un ? Si je convie un Malien à une mission, c’est que je l’estime peut-être capable et compétent pour cette mission-là. Mais si on doit y voir une corruption quelconque, vous réfléchissez à deux fois, c’est tout, sinon ma porte est ouverte et je suis d’égal partage  et me veux d’égal partage. Est-ce que je l’ai réussi, je n’en sais rien, mais c’est ma volonté, c’est mon souhait. Je n’ai pas été élu par les Maliens pour faire dans la discrimination, pour faire dans l’ostracisme, pour faire jouer mes humeurs, non ! Et je tâche de ne pas le faire. Est ce que j’ai réussi en tant qu’humain, mortel, je n’en sais rien, mais c’est ma volonté, donc je ne suis pas dans une humeur meurtrière à l’endroit de qui que ce soit,  c’est même toujours un plaisir de revoir tel ou tel, je l’ai dit l’autre jour.

 Monsieur le Président vous parlez toujours de votre fusion avec le Mali ?

Ibrahim Boubacar Keïta : Ma passion pour le Mali…

 Monsieur le président, nous sommes à année moins A, année moins A des élections présidentielles. Année A moins une, pour être plus précis. Est-ce que dans la tête de IBK 1, germe IBK 2 ? Est-ce qu’en 2018, Ibrahim Boubacar Kéïta sera candidat à sa succession à la tête de la magistrature suprême du Mali, M. le président ?

Ibrahim Boubacar Kéïta: IBK est un croyant, IBK s’en remet toujours à la seule volonté d’Allah Soubahana watala… c’est terminer.

 le président, avant de nous quitter, auriez-vous quelques mots à ajouter ?

Ibrahim Boubacar Kéïta: Je pense que au bout de 4 ans de présence à la tête de ce pays, je voudrais dire que si j’ai un grand regret, c’est que  nous n’ayons pas été plus diligents dans l’atteinte de l’Accord pour la paix et la réconciliation, c’est que nous n’ayons pas été plus diligents  dans sa mise en œuvre, mais il faut avancer à deux pour la paix, il faut avancer à deux pour l’Accord. Cela est un grand regret pour moi, parce que ce temps aurait été utilisé plus utilement. On voit bien ce que depuis que nous avons un peu de répit ce que nous tachons de faire. Ce fameux programme d’urgences présidentiel n’aurait jamais pu être imaginé et mis en œuvre dans un contexte uniquement préoccupé d’apaisements militaires, de sécurité. C’est donc que la paix a un bénéfice évident, certain, et je crois que c’est un peu cela qu’il faudrait que nous ayons en ligne de mire, quand nous envisageons, dans un regard rétrospectif, ce qui s’est passé.

J’ai été élu en 2013 avec un score plus que confortable, ayant obtenu un report de voix supérieures à celles du premier tour.

Cette confiance m’oblige et m’impose comme ligne de conduite de veiller avant tout à la préservation de la paix et de la sécurité, à la consolidation de la cohésion sociale, à la satisfaction d’une part substantielle de la demande sociale. Toute mon action s’inscrit dans la fidélité à ce sacerdoce : être au service de mon pays, être fidèle aux attentes les plus profondes de mes concitoyens qui aspirent par-dessus tout à la paix, fédérer autour de la fierté nationale.

C’est pourquoi, je ne reculerai devant aucune concession pour protéger le bien social, pour mettre le pays à l’abri de toute tourmente aventureuse, mais aussi pour laisser tout le temps nécessaire à une meilleure compréhension des enjeux et à la manifestation de la vérité. Voilà mon credo, j’ai le Mali chevillé au corps. Maliko Fa ben Na !

Merci Monsieur le Président, heureux anniversaire !

 Ibrahim Boubacar Keïta : C’est moi qui vous remercie ! Merci à tous les maliens !

 

La rédaction

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