Une spirale de haine teintée de racisme a déferlé sur des ressortissants subsahariens contraints de quitter la Tunisie. Un vol affrété samedi dernier par les autorités a tiré des profondeurs de l’enfer 135 Maliens. A l’accueil sur le tarmac, Sadio Camara, ministre de la Défense et des anciens combattants accompagné de son homologue des Maliens de l’éxtérieur, Alhamdou Ag Ilyene.
Rapatriements d’urgence, condamnations internationales, appels au boycott… La vague d’agressions contre les Noirs en Tunisie déclenchée par les propos racistes du président Kaïs Saïed a terni l’image du pays sur le continent et au-delà. Le 21 février, le président Kaïs Saïed avait affirmé que la présence en Tunisie de « hordes » d’immigrés clandestins provenant d’Afrique subsaharienne était source de « violence et de crimes » et relevait d’une « entreprise criminelle » visant à « changer la composition démographique » du pays.
Dans la foulée de ces déclarations, des centaines de personnes originaires d’Afrique subsaharienne ont dénoncé subir des persécutions. Insultes, coups, agressions physiques, licenciement ou même expulsion de leur logement : la situation est devenue intenable.«
Les Tunisiens ne nous aiment pas »
Devant l’ambassade du Mali, surchargés de valises et de ballots, tous ont dit fuir un climat lourd de menaces. « Les Tunisiens ne nous aiment pas, donc on est obligé de partir mais les Tunisiens qui sont chez nous doivent partir aussi », disait Bagresou Sego, samedi, avant de grimper dans un bus affrété par l’ambassade pour l’aéroport.
Arrivé il y a 4 ans, Abdrahmen Dombia a interrompu ses études de master en pleine année universitaire : « La situation est critique ici, je rentre parce que je ne suis pas en sécurité. » Baril, un « migrant légal », s’est dit inquiet pour ceux qui restent : « On demande au président Kaïs Saïed avec beaucoup de respect de penser à nos frères et de bien les traiter. »
Issus souvent de familles aisées, des dizaines d’étudiants d’Afrique subsaharienne étaient inscrits dans des universités ou centres de formation en Tunisie. Apeurés, beaucoup sont déjà repartis par leurs propres moyens, selon leurs représentants. L’Association des étudiants étrangers Aesat a documenté l’agression, le 26 février, de « quatre étudiantes ivoiriennes à la sortie de leur foyer universitaire » et d’«une étudiante gabonaise devant son domicile ». Dès le lendemain du discours de Kaïs Saïed, l’Aesat avait donné comme consigne aux étudiants subsahariens « de rester chez eux » et de ne plus « aller en cours ». Une directive prolongée au moins jusqu’au 6 mars.
Exonération des pénalités
Mercredi, des migrants ont témoigné d’un « déferlement de haine » après le discours du président tunisien. Bon nombre des 21 000 ressortissants d’Afrique subsaharienne recensés officiellement en Tunisie, pour la plupart en situation irrégulière, ont perdu du jour au lendemain leur travail et leur logement. Des dizaines ont été arrêtés lors de contrôles policiers, certains sont encore en détention. D’autres ont témoigné auprès d’ONG de l’existence de « milices » qui les pourchassent et les détroussent.
Source: L’Informateur