Ces engins à deux roues sont devenus de plus en plus la cible des voleurs qui ont jeté leur dévolu sur les conducteurs et les clients
Depuis trois ans, les moto-taxis ont rejoint la galaxie des transports en commun à Bamako. L’arrivée de ces engins à deux roues a été saluée par la population. Cela de part son utilité sans conteste comme nouveau moyen de transport facilitant la mobilité urbaine. Tout comme les taxis ordinaires et les Sotrama, ces engins à deux roues assurent aussi bien que ceux suscités le transport de personnes ou de biens. Au-delà de ce transport, les moto-taxis ont remédié considérablement à l’employabilité des jeunes en chômage. Malheureusement comme tout développement qui s’accompagne par des conséquences, le secteur se trouve victime de son essor. Depuis quelques temps, ces moto-taxis sont en proies à des vols récurrents de malfrats mordus de ces engins à deux roues.
Apparemment, les voleurs d’engins à deux roues ne lorgnent plus vers les seules motos Djakarta comme c’était le cas, il y a quelques années à Bamako et ses environs. Avec le nombre de plus en plus croissant des moto-taxis, les conducteurs de ces engins ne savent plus où donner de la tête. La situation est devenue un véritable phénomène d’insécurité qui sème la terreur au sein de la population et notamment chez les conducteurs de moto-taxi qui, en majorité sont victimes de vols de jour comme de nuit. Presque tous les jours, des cas de vol et de braquage à travers la ville sont relayés sur les réseaux sociaux. Des chauffeurs de ces taxis à deux roues sont dépossédés de leurs engins.
On peut citer des cas à ne pas en finir. Les malfrats se font tout simplement passer pour des clients ordinaires à destination d’un lieu où ils peuvent tranquillement déposséder les conducteurs de leurs engins sous la menace d’arme à feu ou d’un objet contondant. Comme le cas de Ali (nom d’emprunt d’une victime) qui s’est fait braquer par son client devenu son voleur, après qu’il l’ait transporté à destination d’un lieu peu populaire. Ce dernier n’avait que ses yeux pour pleurer car n’étant pas en mesure d’expliquer cela au propriétaire de l’engin qui l’emploie. Seydou Diakité est un conducteur de moto-taxi rencontré chez son ami à Bolibana en Commune III du District de Bamako où, il se reposait après une longue course matinale. Il fait partie de ces motos taximen que ce phénomène récurrent de vol inquiète. Il en sait beaucoup de récits de cas.
GEOLOCALISATION- Mahamoud Diallo, un autre taximan rencontré assis sur son engin au bord de l’artère du monument de l’Indépendance, dit ne pas rouler nuitamment. «Moi, je ne travaille pas les heures avancées de la nuit. Je rentre chaque jour à 20 heures», laiss entendre le jeune conducteur en quête de potentiels clients. Modibo B. Coulibaly, superviseur d’une société de moto-taxis de la place indique que leurs engins sont toutes dotées d’un appareil de géolocalisation «GPS». Corroborant ses propos, il fait savoir que l’une de leur moto a été volée devant une mosquée à Kalaban-coura pendant le mois de ramadan dernier alors que son conducteur était allé prier. Après la déclaration et l’exploitation du système de géolocalisation, la moto volée a été retrouvée le lendemain à Siby, dans la Commune rurale du Mandé. S’il faut le croire, l’engin retrouvé avait été complètement teinté en couleur noir. «N’eût été le système de GPS, nous ne pouvions pas reconnaître notre moto volée», dit le superviseur.
La police est déjà à pied d’œuvre. Elle ne cesse de récevoir les plaintes. Comme notre équipe a pu le constater dans les différents commissariats de police du District de Bamako sillonnés par nos soins. Au niveau du commissariat de police du 3è arrondissement, la Brigade des recherches (BR) dudit commissariat est formelle sur la récurrence du vol de moto-taxis. Elle assure recevoir fréquemment des plaintes. «Nous pouvons recevoir 3 à 4 plaintes par semaine concernant les cas de vol de moto-taxis», explique un agent.
Le limier ne manque pas de détailler les circonstances dans lesquelles, les vols se passent avant de les catégoriser. «Il y a des cas d’abus de confiance, de braquage et de cambriolage». Selon lui, les cas les plus fréquents sont les braquages à main armée. Il signale qu’il y a des voleurs qui se font passer pour un client ordinaire et empruntent la moto-taxi pour ensuite disparaître avec. Il y a également des malfrats qui se font passer pour des chauffeurs de moto-taxi pour voler leurs éventuels clients de leurs biens, ajoute l’agent de police. Le policier raconte qu’au cours d’une nuit aux environs de 23 heures, un moto-taximan a pris un client au quartier Djelibougou en Commune I du District de Bamako avec pour destination le quartier de Médina-coura en Commune II du District de Bamako. Arrivé au niveau du stade Omnisports Modibo Keïta, le client demanda au chauffeur deralentir un peu.
Ainsi le «faux-client» assomma son conducteur en l’étranglant. Il tenta alors de s’enfuir avec la moto-taxi, mais un groupe de jeunes assis au «grin» a immédiatement réagi en maîtrisant le voleur pour ensuite le remettre à la disposition de la police. Selon l’officier de police, les conducteurs de ces engins sont des victimes de vol autant que les clients. Il explique qu’un jour, une cliente s’est présentée à leur commissariat pour porter plainte contre un conducteur de moto-taxi qui s’était enfui avec ses effets contenant son porte-monnaie. La dame après avoir été embarquée par le moto-taximan, le conducteur de l’engin prétexta une crevaison avant de filer avec les affaires de la cliente.
BRAQUAGE NOCTURNE- à la BR du 6è arrondissement le constat est le même. Les limiers de cette unité font savoir que le phénomène est récurrent à Bamako et ses environs. Ajoutant que rares sont les jours où ils n’enregistrent pas des plaintes pour vol de moto-taxis. Un officier de police de ladite unité précise qu’ils peuvent enregistrer au minimum 3 à 4 plaintes par semaine concernant le braquage à main armée des conducteurs de moto-taxis.
Généralement, indique l’agent, les cas de braquage se font nuitamment dans des endroits isolés. à l’en croire, le mode opératoire des braqueurs consiste à emprunter une moto-taxi nuitamment pour une destination isolée où leurs complices les attendent. Une fois sur place, poursuit-il, les malfrats braquent le conducteur avec une arme avant de déposséder ce dernier de sa moto et tous ses biens. Par ailleurs, notre interlocuteur confie qu’il y a également des conducteurs qui vendent leur moto-taxi et se présentent au commissariat pour faire de fausses déclarations. «Quand ce genre de personne se présente à nous, on se rend au lieu indiqué et on ne trouve aucun indice sur le lieu et aucun témoignage qui prouve qu’il a été braqué», affirme l’agent.
De l’autre côté de la rive droite, au commissariat de police du 4è arrondissement, l’affluence semble moindre que dans les autres commissariats. Un des éléments de l’unité des recherches nous explique qu’il y a quelques mois, ils pouvaient recevoir 4 à 5 plaintes par semaine pour les cas de vols ou de braquages des taxis à deux roues. Mais au moment de notre passage, au moins deux personnes s’étaient présentées pour déposer une plainte à propos du vol de leur taxi moto. Dans les commissariats visités, les limiers sont en train de mettre les bouchées doubles pour mettre fin au phénomène qui va crescendo.
En atteste, l’arrestation de «A.S», un malfrat spécialisé dans le vol et le braquage à main armée des moto-taxis dans différents quartiers de la ville. Ce bourreau des chauffeurs de moto-taxis a été interpellé ainsi que trois de ses complices receleurs la semaine dernière par les policiers du commissariat du 4è arrondissement. Quatre de ces motos retrouvées en leur possession ont été rendues à leurs propriétaires. En attendant l’éradication du phénomène dans la capitale, la traque continue au niveau des policiers qui conseillent aux conducteurs de ne pas rouler à certaines heures tardives de la nuit et d’éviter certains coins peu fréquentés. De leur côté, les conducteurs appellent les autorités à renforcer la sécurité dans la ville.
Yaya DIAKITÉ
Source : L’ESSOR