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Haute Cour de justice: la grosse bavure

La Haute Cour de justice du Mali a rejeté la plainte déposée devant elle par le Bloc d’intervention populaire et pacifique pour la réunification entière du Mali (BIPREM-Fasoko) «contre le Président de la République du Mali, Ibrahim Boubacar Keita, pour haute trahison et gestion scandaleuse de l’argent public».
L’information a été donnée à nos confrères de l’AFP par un responsable de la Haute Cour de Justice qui a choisi de se réfugier derrière une commode anonymat. Question de rigueur et de loyauté.

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La Haute Cour de Justice de notre pays qui dit ne pas considérer comme une plainte le document qu’elle a pourtant accepté de recevoir contre décharge ; mais comme un tract dans sa présentation. L’institution chargée de juger le président de la République et les ministres mis en accusation devant elle par l’Assemblée Nationale estime que «ces associations ne sont pas habilitées à déposer une telle plainte. Et surtout, ce n’est pas du tout la procédure à suivre». Ce sont là entre autres motifs de sa décision. Décision ?
Oui, en effet, il y en a eu s’agissant de la plainte du Biprem. Selon l’Agence France Presse (AFP), la décision en question «est publiée dans un document interne de la Haute Cour consulté par un journaliste de l’AFP».
La prise de décision de la Haute Cour de rejeter le «Tract » du Biprem, fut-elle dans un document interne, est-elle conforme à la légalité ? Dès lors que son contenu est sur la place publique, on peut donc se demander : si la Haute Cour de Justice a rejeté la plainte du Biprem pour non-conformité à la procédure, s’est-elle, elle-même, montré d’une très grande rigueur envers les règles de sa saisine ?
Si comme elle le prétend, la Haute cour de justice estime qu’il s’agit d’un tract et non d’une plainte, pourquoi elle a jugé nécessaire de donner suite par une décision de rejet ? Cela est la marque de notre Haute Cour de justice, la seule juridiction, au monde, qui statue sur un tract. Un fâcheux précédent qui pourrait faire jurisprudence, parce que désormais chaque farfelu peut s’estimer fonder en droit d’aller déposer, par devant, elle un tract, l’obliger à lui délivrer une décharge et une suite à sa requête.
Or, nul droit ne légitime la Haute Cour de Justice à recevoir d’un citoyen ou d’un groupe de citoyens une requête. En effet, la loi n° 97-001 du 13 janvier 1997, fixant la Composition et les règles de fonctionnement de la Haute Cour de Justice ainsi que de la procédure suivie devant elle, est parfaitement limpide.
Cette loi discutée et votée, on se rappelle, par l’Assemblée Nationale en sa séance du 16 décembre 1996 au chapitre 1er (de saisine et de la mise en accusation) de son second titre intitulé «de la procédure» (articles 14 et suivants), prévoit une saisine par paliers :
– «l’Assemblée Nationale en est saisie par son Président» (article 14 in fine)
– La mise en accusation est votée sous forme de résolution par l’Assemblée Nationale, conformément aux dispositions de l’article 95 de la Constitution (article 16 -« La mise en accusation est votée par scrutin public à la majorité des 2/3 des Députés composant l’assemblée Nationale. » (Article 95 de la Constitution)-)
– «Le dossier de l’affaire, accompagné de la résolution de mise en accusation est transmis par le Président de l’Assemblée Nationale au Procureur Général près la Cour Suprême qui en accuse réception.
L’avis de cette transmission est donné au président de la Haute Cour de Justice.» (Article 17)
Comme on le voit, en matière de saisine, la haute Cour de justice n’est que la 5e roue de la carrosse procéduralement parlementaire.
Dès lors, il faut se poser la question du comment une institution aussi encadrée comme la haute Cour de justice, qui procède du parlement, a pu accepter de recevoir une plainte en violation de la Constitution et de la loi fixant sa Composition et ses règles de fonctionnement ainsi que de la procédure suivie devant elle.
Qu’elle s’empresse de clamer urbi et orbi qu’il s’agit d’un «tract» ne peut empêcher de relever, dans la démarche de l’honorable institution, une certaine légèreté. Une légèreté qui se meut en grosse bavure lorsque la Haute Cour de justice tente de couper court à la polémique en disant qu’elle a rejeté la requête, parce que c’est un tract et que les requérants n’ont aucune qualité à la saisir. La conformité avec la procédure spécifique veut qu’on lui donne acte dans la forme, l’objectivité exige qu’on s’interroge sur la singulière démarche de la fameuse juridiction politique : sachant tout cela pourquoi alors accepter de prendre la plainte, pardon un tract ?
Parce que la Haute cour de justice n’est pas, ne peut être et ne doit en aucun cas être un entrepôt pour recevoir n’importe quel colis. Au risque d’accepter de recevoir un paquet piégé qui fera sauter toute la République avec elle.
A bon entendeur !

Par Sambi TOURE

 

Source: info-matin

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