En dix mois et demi de gestion du pouvoir, Ibrahim Boubacar Keïta, est à son troisième Premier ministre : Oumar Tatam Ly (8 mois), Moussa Mara (9 mois). Modibo Keïta, à 73 ans, est-il à même d’aller au-delà ? La question est sur toutes les lèvres. Mais le vrai problème de la gouvernance actuelle se trouve à Sébénicoro, et non ailleurs.
Au bout du compte, le banquier (Tatam) a tiré les conclusions nécessaires. Il décida d’abandonner le navire, laissant IBK face aux vagues incessantes.
Le fauteuil primatorial fut alors confié, sans réflexion et en violation flagrante du fait majoritaire, à Moussa Mara. Pourquoi le Prince de Sébénicoro a-t-il agi ainsi ? Nul ne le pouvait le deviner sur le coup. Mais, à l’épreuve du temps, on s’est rendu compte, en réalité, que l’expert-comptable a été un Premier ministre par défaut pour IBK. Celui-ci, surpris par la démission d’Oumar Tatam Ly, n’a pas cherché loin. Il fallait à IBK un homme de compromission, prêt à tout. Moussa Mara accepte de jouer le jeu. Mais lui aussi, s’est rendu compte de la difficulté de sa tache dès le départ.
Pour composer l’équipe gouvernementale, il avait choisi certains hommes. Mais aucun d’entre eux, ne sera nommé. Et pour cause, le chef de l’Etat ne laissa nul portefeuille à son Premier ministre. Mara avala la couleuvre, sans mot piper.
Populiste et serviable à souhait, Moussa Mara était prêt à tout pour sauvegarder son fauteuil.
Au même moment, l’action gouvernementale se résumait en une succession d’échecs et d’actions folkloriques, sur fond de scandales.
Du point de vue résultat, l’équipe dirigée par Mara ne connait pas plus de succès que celle de Tatam Ly. Mais, la réalité du pouvoir et des décisions était ailleurs ; entre les mains du président et sa famille. C’est dire que le problème actuel du Mali n’est pas un problème de Premier ministre, c’est plutôt Ibrahim Boubacar Keïta, lui-même…qui est le blocage. En effet, avec un président qui a instauré un pouvoir monarchique, un président qui s’est entouré par sa famille, son clan et ses affidés, un président qui a du mal à donner une orientation et une vision claire à la marche de l’Etat, un président qui fait du pouvoir et des attributs du pouvoir un instrument de jouissance, un président qui ramène tout à sa personne, un président qui a tendance à confondre famille et rouage de l’Etat…,que peut alors Modibo Keïta ? C’est là toute la question.
C.H. Sylla
source : L’Aube