Depuis plusieurs années, la gestion du foncier au Mali est au cœur de nombreux foyers de tension. Le secteur se caractérise par la multiplicité des acteurs et des titres de propriété ; l’occupation anarchique du domaine public ; l’insuffisance de la publicité lors de la procédure d’immatriculation ; les difficultés d’application de certaines décisions de justice. Depuis 2013, la logique des plus hautes autorités est la confection d’un cadastre polyvalent dont les travaux sont en cours. En attendant, le conseil des ministres de ce 11 mars 2020 adopte un projet de loi qui apporte des innovations.
Pour sortir de ce bourbier et faire du foncier un véritable outil de développement, en plus de la confection d’un cadastre polyvalent en cours, le ministère des Domaines et des Affaires foncières vient de faire adopter en Conseil des ministres un nouveau projet de loi qui paraît innovant.
Ce nouveau texte, s’il était adopté par le législateur, donnerait la possibilité au ministre chargé des Domaines d’annuler à tout moment, toute attribution faite dans le domaine public sans déclassement préalable. Innovation majeure, le nouveau texte suspend la concession rurale comme mode d’attribution des terrains du domaine privé immobilier de l’État ; limite la cession directe aux parcelles à usage d’habitation. La constatation des droits coutumiers conformément aux dispositions de la loi sur le foncier agricole reste en vigueur, mais le texte fait mention de l’insertion d’un titre dédié au cadastre. Il donne lieu à la création du Guichet unique du foncier et l’amélioration de la publicité foncière et son adaptation aux réalités socioculturelles ; au recours à l’action récursoire contre les agents fautifs.
En cas de différend autour d’un titre de propriété, le projet de loi accorde la primauté à la première immatriculation régulière, en cas de double immatriculation d’un même immeuble. Aussi, le projet de loi reconnaît-il la validité des titres précaires donnés par l’Administration avant l’adoption de la présente loi, ce, jusqu’à leur transformation en titre foncier et fixe un délai de dix ans pour la transformation des titres provisoires en titres fonciers en milieu urbain.
En tout cas, le texte est bien clair, il reste que le courage et la volonté politique qui font généralement défaut dans ce pays. Plusieurs fois, des plaintes ont été déposées contre des agents de l’État pour faux et usage de faux qui n’ont jamais prospéré. Tant que l’impunité reste érigée en mode de gouvernance, aucune initiative, fut-elle belle, ne conduira le pays à son objectif de développement.
PAR SIDI DAO
INFO-MATIN