Pour le chef de la diplomatie russe, la divulgation des enregistrements de la conversation entre Emmanuel Macron et Vladimir Poutine, dans le cadre d’un documentaire sur l’action du dirigeant français, est contraire à la «déontologie diplomatique».
En visite au Vietnam ce 6 juillet, le ministre russe des Affaires étrangères Sergueï Lavrov est revenu sur les fuites parues dans la presse concernant la discussion entre Vladimir Poutine et Emmanuel Macron sur l’Ukraine. «Nous négocions de manière à ne jamais en avoir honte», a-t-il lancé en préambule, expliquant que la partie russe disait toujours ce qu’elle pensait, et qu’elle était toujours prête à expliquer sa position.
«A mon avis, la déontologie diplomatique ne suppose certainement pas une telle divulgation unilatérale des enregistrements», a poursuivi le diplomate.
Des extraits de la conversation téléphonique de neuf minutes très tendue entre Emmanuel Macron et Vladimir Poutine ont été diffusés dans un documentaire sur France 2 qui retrace la tentative de médiation du président français pour empêcher l’embrasement du conflit en Ukraine.
Dans les extraits, on entend notamment le chef d’Etat français lancer «on s’en fout des propositions des séparatistes», laissant entendre en substance le peu de considération de Paris pour les accords de Minsk. Un précédent entre Paris et Moscou… mais des circonstances bien différentes Lors de sa conférence de presse à Hanoï, Sergueï Lavrov a toutefois lui-même rappelé que Moscou avait, dans des circonstances bien spécifiques, publié une retranscription écrite de négociations avec la France et l’Allemagne dans le cadre du format Normandie, dans lesquelles la Russie essayait de convaincre Berlin et Paris de forcer Kiev à cesser de saboter, selon elle, la mise en œuvre des accords de Minsk. La Russie déplorait à l’époque que sa position ait été largement déformée et contestait l’accusation de Paris selon laquelle Moscou avait fait part de son «refus» de participer à une réunion ministérielle au format Normandie (Russie, Ukraine, France, Allemagne).
Refusant de parler de «conflit interne ukrainien» ou de présenter Moscou comme un «médiateur à côté de l’OSCE dans le Groupe de contact trilatéral [Ukraine, Russie, OSCE]», la France et l’Allemagne avaient également jugé impossible la tenue d’un «dialogue direct» entre Kiev et les républiques autoproclamées du Donetsk et de Lougansk. En lieu et place Paris et Berlin proposaient simplement un accord sur un échange de détenus ainsi qu’un accès sécurisé pour la Mission spéciale d’observation de l’OSCE en Ukraine à l’intégralité du pays ; pas à la hauteur des enjeux selon Moscou, pour ne pas dire en contradiction avec les accords de Minsk.
«Et ce que mes homologues, les ministres des Affaires étrangères français et allemand, nous ont répondu à ces arguments, c’était bien sûr… Eh bien, je pense que c’était très symptomatique, du point de vue du deux poids, deux mesures qu’ils professaient», a analysé Sergueï Lavrov ce 6 juillet à ce propos.
«En se positionnant comme garants des accords de Minsk, ils ont tout fait pour blanchir Kiev et justifier son désir franc et évident de perturber leur mise en œuvre», a conclu le diplomate. Le 3 juillet déjà, la porte-parole du ministère russe des Affaires étrangères Maria Zakharova avait elle aussi réagi à ces fuites, critiquant le comportement du président français Emmanuel Macron, qui a, selon elle, violé la confidentialité des discussions avec son homologue russe en laissant des journaliste filmer les échanges entre les deux hommes d’Etat alors que la conversation devait se dérouler «à huis clos».
«Lorsque les appels sont réalisés au plus haut niveau […] ils sont bien sûr confidentiels […] évidemment ce sont des négociations à huis clos», avait-elle fait valoir, ajoutant : «Il s’est avéré qu’il y a deux mois quand le président Macron a téléphoné au président de la Russie, […] toute la conversation a été enregistrée par une caméra avec des journalistes qui étaient là et ont tout filmé.» «C’est un exemple illustrant la signification selon eux du mot « diplomatie »», avait-elle conclu.
RT News