Le 04 septembre 2013, le président élu du Mali, dans un mémorable discours d’investiture, avait dans une poétique mise en garde affirmé que “désormais la vie de chaque Malien vaudra son pesant d’or “, mettant du baume au cœur des familles, qui avaient perdu plus d’une cinquantaine des leurs, dans le chavirement d’un vieux rafiot affrétés par des passeurs sur les côtes libyennes. La menace s’adressait aussi indirectement à madame la maire de la commune I où des inondations dues à l’occupation des voies d’eau avaient fait de nombreuses victimes à Banconi. 5 ans et 6 mois après ces propos sans concession, la vie d’un Malien ne vaut pas un clou hors de nos frontières et le rapport sur les inondations est encore attendu!
Aux premiers jours de 2014, les corrompus de tous poils ont cru leur dernier jour arrivé quand le chef de l’Etat a décrété une année implacable de lutte contre toutes les formes de malversation et de dissipation des deniers publics. Plus de 4 ans après, la corruption ne s’est jamais aussi bien portée dans notre pays.
La liste est encore longue de ces effets d’annonce de Ibrahim Boubacar Kéita sans lendemain.
La gesticulation jeudi dernier à l’endroit de l’armée a fait pouffer de rire la hiérarchie militaire qui, loin d’être exemplaire, n’a aucune leçon de vaillance à recevoir de celui qui prétend être son chef suprême. Abonné aux voyages inutiles et coûteux, très peu à sa tâche hormis quelques audiences ostensiblement médiatisées, le président IBK découvrait subitement au Génie militaire que notre pays est en guerre et qu’il ne saurait tolérer certains comportements. Tremblez, galonnés de tous les échelons, le chef va sévir de toutes ses forces ! Non, rompez, c’était une blague !
Comment peut-on redouter les foudres d’un président qui, quatre ans et demi après son élection, confessait publiquement que “le Vieux [lui] venait de se réveiller de sa longue hibernation, suscitant l’hilarité de nos compatriotes dont les plus caustiques n’ont pas hésité à le supplier de poursuivre sa sieste pour le peu de temps qui lui restait de son premier mandat.
Le second mandat, arraché tchogo tchogo, ne commence pas super fort! La situation sécuritaire du pays se dégrade à une allure vertigineuse depuis que les apprentis-sorciers ont attisé les conflits intercommunautaires pour saboter le vote au Centre du pays, une région qu’ils croyaient acquis à son adversaire.
Le funeste décompte des victimes civiles et militaires relève désormais de la routine. Sans émouvoir le “grand patriote” devenu président et qui était inconsolable en 2012 à la chute du camp de Tessalit !
Les finances publiques sont en détresse du fait de la mission impossible assignée aux régies financières de l’Etat sommées de mobiliser des ressources à la hauteur des besoins d’un Etat boulimique et non de l’activité économique réelle. Il faut bien pourvoir aux nombreux et coûteux voyages d’un chef de l’Etat inaccessible au “mal de l’air” !
Le front social, lui, se porte comme un charme! Jamais le Mali n’a autant enregistré de grèves, de menaces de grèves! IBK détient le triste record du plus long débrayage de la magistrature et du secteur de la santé dans l’histoire du Mali. L’école est dans la rue, la police grogne, les fonctionnaires des collectivités territoriales sont aussi fâchés.
Dans ce climat de sinistrose, le président n’envoie aucun signal d’empathie. Au contraire, il vit comme si tout cela ne le concernait pas. Il nous offre même à la télé l’image d’un homme heureux qui se trémousse sur le tapis rouge à la remise des prix au FESPACO !
Dommage que le peuple qui est son patron, comme lui il l’est pour les militaires, n’ait pas l’occasion de lui adresser les mêmes admonestations sur le ton: “l’insouciance, c’est désormais fini. Nous ne la tolérerons plus”!
C’est faute de pouvoir se parler à lui-même, d’interroger sa pratique du pouvoir que Ibrahim Boubacar Kéita a démonétisé sa propre parole qui, au mieux, agace ou fait pouffer de rire, au pire, énerve!
Et pourtant cette parole a été sublimée lorsque IBK était dans ses fonctions “second” au point de faire accroire que l’homme avait l’étoffe d’un “capitaine”. Ainsi, ce qui tonnait fort hier sonne aujourd’hui creux, voire ridicule par manque d’incarnation. Napoléon Bonaparte avait raison!
Ismaïla S Sy
Source: L’ Aube