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Focus : Les marchands de sommeil en rajoutent à la crise !

Aux difficultés économiques induites par la situation sécuritaire du pays, à la corruption et la délinquance financière, on ajoute souvent la spéculation foncière ardue comme principaux maux qui sont en train de ronger le Mali.

Mais c’est dans cette situation, déjà trop pesante pour les citoyens, que se manifeste davantage la voracité des agences immobilières, lesquelles exercent une pression incessante sur les locataires qui ne savent même plus à quelle loi se fier au Mali.

En effet, si le coût du loyer ne cesse de monter de façon exponentielle, c’est parce que des gens peu scrupuleux tentent de gagner plus d’argent que le propriétaire de la maison, en ne jouant qu’à l’intermédiaire. Ainsi donc, le locataire se trouve taillable et corvéable à merci, à travers des contrats léonins de location-bail imposés aux demandeurs de logements, en plus des prix exorbitants et injustifiés.

De véritables marchands de sommeil ! Voilà ce que sont devenues la plupart des agences immobilières, dans une jungle du logement où des réseaux sont solidement tissés, jusque dans les tribunaux, afin que le locataire qui ose élever la voix, pour dénoncer ne serait-ce qu’un simple petit fait qui le lèse, soit jeté dehors illico presto. En effet, en une seule semaine, une agence immobilière peut se prévaloir d’un jugement d’expulsion concocté dans un tribunal de la place. Un jugement rendu à la suite d’une procédure qui dépasse rarement une dizaine de jours et à l’insu du locataire qui n’est informé que lorsqu’on vient lui notifier son expulsion.

Pas de convocation devant le juge, encore moins le respect du principe sacrosaint du contradictoire qui laisse au locataire le temps et la possibilité de s’expliquer et de se défendre. C’est bizarre que la lenteur décriée au niveau de la justice ne se manifeste jamais lorsqu’une agence immobilière a recours à une juridiction !

Des chômeurs ou des enfants de la famille du gérant de l’agence immobilière, employés pour différentes tâches, sans la moindre formation adéquate, s’arrogent le droit de manquer de respect et de considération aux locataires. Et gare à ce dernier s’il ose se plaindre chez l’employeur. En effet : “Faites le sortir”, c’est généralement la réaction, comme si en matière immobilière, le Mali se retrouverait subitement en marge du droit. Des abus, il y en a tous les jours et cela contribue à augmenter le mécontentement des populations déjà martyrisées par les affres quotidiennes de la crise multidimensionnelle que vit le Mali.

Nous savons bien de quoi nous parlons parce qu’une histoire, choisie parmi tant d’autres qui nous sont parvenues, est révélatrice de ce cynisme ambiant au niveau des agences immobilières où la loi, on s’en tape le jabot. En effet, l’intéressé a vu sa salle d’eau saccagée par le plombier commis par son agence immobilière, sous le prétexte que le locataire du palier inférieur se plaint de fuites d’eau. Après plusieurs jours de recherches de fuites en vain, au cours desquels le locataire n’arrêtait de les relancer, le plombier revient enfin, avec un carreleur, pour faire un travail qui est tout le contraire de ce qui devait se faire. La pente inversée, l’eau ne coulait plus vers le tuyau d’évacuation et stagnait dans la toilette, de sorte que lorsque le locataire se lavait, il avait les pieds dans de la mousse de savon. Echappant à une glissade due à l’eau savonneuse, il alerta l’agence pour la énième fois, mais sans réaction favorable.

D’ailleurs, comme réponse à sa préoccupation, le promoteur de cette agence immobilière située vers Djicoroni et qui se croit Dieu sur terre, a eu comme réponse tranchée: “Je ne crois pas que le propriétaire de la maison puisse accepter de dépenser encore de l’argent pour refaire la toilette !”.

Cet agent immobilier qui n’écoute même pas son client lorsqu’il lui parle, parce que lui a toujours raison, s’arroge le droit à la nervosité quand on s’adresse à lui et se plaît même à crier sur tout le monde, usant de mots blessants et irrespectueux.

Cette toilette cassée sans la demande du locataire, mais pour plaire à son voisin qui se plaignait, a finalement conduit à un grave accident domestique. Le chef de la famille y a chuté et s’est retrouvé avec une fracture de la cheville. C’est en ce moment que l’agence immobilière qui a été informée dès le transport du blessé aux services d’urgence, ne s’est pointée audit domicile que dix jours après. Non seulement pour s’enquérir de l’état de santé de la victime par conscience de leur responsabilité et d’avoir mis en danger la vie d’autrui, mais pour réparer ladite toilette pour aussitôt trouver le locataire sur son lit, après une intervention chirurgicale, pour lui réclamer le prix de la location. Pas même un mot d’excuse !

Il est temps de mettre de l’ordre dans ce milieu où chacun se lève, aménage le garage d’une maison ou une boutique, pour en faire une agence immobilière. Mais quelle garantie pour le locataire ou le propriétaire de la maison à gérer ? Aucune ! Combien de citoyens ont-ils subi le diktat de ces agences immobilières qui les ont été floués à travers des propositions de vente ou de location de maisons ? Que dire de l’augmentation inconsidérée des prix de loyer, surtout au moment où la crise s’empare du pays, fragilisant le pouvoir d’achat des Maliens ? Des marchands de sommeil, voilà ce que sont devenues la plupart des agences immobilières.

En contrepartie, que gagne l’Etat en termes de taxes et d’impôts ? Si avec la variation en crescendo du coût du loyer le fisc y trouvait son compte, ce serait une niche intéressante pour la mobilisation des ressources intérieures. Mais allez savoir combien payent ces agences immobilières eu égard à leurs revenus ?

Il y a certes de bonnes agences immobilières, mais elles ne courent pas les rues dans une activité où les acteurs foisonnent sans aucun respect des normes. Nous ne cherchons pas à jeter le pavé dans la mare, mais il y a des vérités bonnes à dire pour que la loi soit appliquée aux locataires, actuellement abandonnés entre les mains de marchands de sommeil qui se prévalent de leurs entrées à la police, à la gendarmerie et au sein de la justice, pour fouler la loi, ne considérant que le profit. Jusqu’à quand alors ?

Amadou Bamba NIANG

Source: Aujourd’hui-Mali

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