Au Mali, la durée de la transition est fixée à 18 mois par la charte de la transition. Mais le Premier ministre Choguel Kokalla Maïga a annoncé que la question de la prorogation de la transition « sera tranchée par les Assises Nationales de la Refondation » qui auront lieu fin septembre début octobre 2021 . Une possible prolongation de la transition fait polémique et préoccupe la CEDEAO qui demande au gouvernement de transition de respecter la date des élections prévues en février 2022 et de présenter rapidement un chronogramme détaillant le calendrier électoral. Faut-il prolonger ce régime d’exception ? Tour d’horizon des arguments pour et contre la prolongation de la transition.
Le débat enfle au Mali sur la durée de la transition à cinq mois de sa fin programmée telle que définie par la charte de la transition. Pour le chef du gouvernement, la question de la prorogation de la transition sera tranchée lors des Assises Nationales de la Refondation qui doivent se tenir, selon lui, en octobre prochain. « Nous allons nous retrouver en octobre pour définir la nouvelle maquette du Mai nouveau que nous souhaitons. De cette maquette, on tirera les différentes réformes qui sont nécessaires. Parallèlement, l’organe unique, l’organisation des élections continuent son bonhomme de chemin. A la fin des assises, les modifications qui seront exigées seront insérées dans les textes. J’ai demandé au ministre qu’il faut au plus tard en fin septembre que nous puissions donner la date de la tenue des assises aux Maliens et aux amis du Mali ( la communauté internationale). Une fois qu’on sort des assises, on doit être capable cette fois ci d’élaborer un chronogramme clair, précis et avec des dates et les présenter à nos amis. Nous ne voulons pas donner des dates qu’on ne va pas respecter ou qui sont difficiles à respecter », a indiqué Choguel Kokalla Maïga devant le corps diplomatique, le jeudi 9 septembre dernier à Bamako. Selon le chef du gouvernement, « la majorité des Maliens ne veut pas d’une transition qui perdure, mais la majorité des Maliens ne veut pas non plus d’une transition bâclée qui va nous conduire à l’impasse encore.»
Le Premier ministre n’est pas le seul à défendre une prolongation de la transition au Mali. Le chérif de Nioro du Sahel, Mohamed Ould Cheickné Bouyé Haïdara, a souhaité, à mainte reprises, le maintien des autorités de la transition au pouvoir au moins durant deux ans. Sous son impulsion, ses adeptes ont manifesté dans la ville de Nioro du Sahel, le jeudi 26 août 2021, afin de demander une prorogation de la durée de la transition. Dans le sillage du chérif, des mouvements se créent un peu partout pour exiger une prolongation de la transition.
Le niet de la majorité de la classe politique
Le respect du délai de la transition fait presque l’unanimité au sein de la classe politique. Selon l’ancien Premier ministre Soumana Sako, les périodes de Transition et d’Intérim sont, par essence même, des périodes d’incertitudes avec un fort potentiel d’instabilité et de perturbations. « Cela est encore plus le cas lorsque les dirigeants de la période charnière sont déclarés inéligibles aux élections de fin de Transition, même si l’inverse n’est pas exempt de potentiel de perturbations non plus. Le facteur personnel, lié par exemple à la capacité des dirigeants à faire preuve à la fois de leadership, de vision, de fermeté, de capacité d’anticipation et de dialogue avec les différentes parties prenantes, y compris de nouveaux acteurs souvent opportunistes et circonstanciels, entre aussi dans l’équation », a indiqué, le 10 août dernier, dans un communiqué, l’ex-Premier ministre. Certes, ajoute-t-il, tout comme en football, chaque match a ses réalités, chaque Transition a ses réalités. « Il n’en demeure pas moins que, au total, plus une Transition est courte, mieux ça vaut », met en garde Soumana Sako.
Après une rencontre, le 17 août dernier, entre les Fare An Ka Wuli et le Parena, respectivement présidés par l’ancien Premier ministre Modibo Sidibé et l’ex-ministre des affaires étrangères Tiébilé Dramé, les deux partis ont réitéré leur attachement au respect des engagements souscrits par les autorités de la transition face au peuple malien et à la communauté Internationale, fixant la fin de la transition au 1er trimestre de 2022. Ils ont invité le gouvernement à actualiser le calendrier électoral conformément à cette échéance et à le publier. Le Parena a d’ailleurs refusé de participer, le lundi 6 septembre dernier, à une réunion sur le programme gouvernemental relatif aux « Assises Nationales de la refondation » et à « la création de l’Organe unique de gestion des élections et autres sujets connexes ». Le Parena précisera qu’il ne se reconnaît pas dans l’organe unique du Premier ministre. « Pour sortir de la fatalité des scrutins mal organisés, notre parti a proposé un organe transitoire de gestion des élections (ANGE). De toute évidence, les autorités de la transition préparent un chaos électoral, sinon rien n’explique le « cavalier seul » et l’inaction dans lesquels elles baignent », a indiqué, dans un communiqué, le parti du bélier blanc. La coalition des partis et regroupements politiques pour une Transition réussie au Mali est aussi intransigeante sur le respect de la durée de la transition. Selon cette coalition qui regroupe plusieurs partis politiques d’envergures du pays, le RPM, l’ADEMA, l’ASMA, la CODEM, le YELEMA, l’ARP, le RDS, la CDS, le PS Yelen Koura, APR, etc., le retour rapide à l’ordre constitutionnel normal est la condition indispensable à la mise en place d’une gouvernance légitime et réellement représentative du peuple, à la levée des mesures de suspension du Mali des instances de différents organismes régionaux et internationaux, au retour de la stabilité politique, économique et sociale dans notre pays et celui des partenaires et des investisseurs potentiels pour la création d’emplois et l’amélioration des conditions de vie des Maliens. Pour toutes ces raisons, selon la coalition, le respect scrupuleux de la période de la transition ainsi que la date retenue pour les prochaines élections générales (présidentielle et législatives), du 27 février 2022, devient obligatoire.
Madiassa Kaba Diakité
Source: Le Républicain