Mises en échec toutes les deux par les jihadistes qui se ragaillardissent, les FAMa et Barkhane versent dans une sordide campagne de clabaudage. Est-ce seulement le syndrome de la foirade ?
« Quand les FAMa sont avec Barkhane, ça se passe bien. Dès qu’ils sont seuls, ça ne suit plus », lâche un officier français basé au Mali.
« Niveau communication, dès qu’on réalise une action en faveur des populations, on met nos partenaires maliens systématiquement en avant, mais derrière, ils ne prennent pas leurs responsabilités », renchérit un soldat de Barkhane dans le Gourma malien. Ces propos ont été rapportés par AFP-Slate Afrique, dans le sillage de la vadrouille de la ministre française de la Défense, Florence PARLY dans certains pays du Sahel (Tchad, Burkina Faso et Mali), du 4 au 5 de ce mois.
Ce coup de dent dénote d’une fébrilité maximale. Pour autant, le timing et le tempo ne doivent rien au hasard. Ces allégations sont proférées à un moment où le sentiment anti-français prend de l’ampleur où les manifestations contre les forces internationales et les déclarations accusatrices de certains leaders d’opinion perturbent le ronronnement de nos partenaires. En clair, il s’agit de donner de la répartie à un déluge d’accusations ; au prix de se dédire et de déblatérer. L’officier et le soldat dépeignent une armée déglinguée, apathique ; bref qui manque à son devoir élémentaire.
Pourtant, le ton est plutôt dithyrambique du côté du ministre Florence PARLY qui déclare : « l’armée malienne a récemment subi des coups très durs, mais cela ne change pas notre sentiment que le niveau et les capacités des FAMa (Forces armées maliennes) continuent de progresser ».
Les accusations des militaires français sont également démenties par les nombreuses actions civilo-militaires menées par les FAMa, indépendamment des soldats de Barkhane et sur fonds propres. L’armée malienne fait donc beaucoup plus qu’assurer le service après-vente ; elle a l’initiative de certaines opérations de solidarité envers les populations : distribution de moustiquaires, de céréales, de lait, de sucre, de couverture, de médicament ; aide à la réhabilitation des habitations. C’était le cas, par exemple en mai 2018, à Dioura, Diguissiré, Togorocoumbé et Diondiori.
Au demeurant, il serait difficile de séparer la faillite des FAMa de celle de la Mission d’entraînement de l’Union européenne créée sur la base de la Résolution 2085 du Conseil de sécurité des Nations-Unies, lancée depuis le 18 février 2013. L’effort de la Mission est porté dans les domaines suivants, en matière de formation : droit des conflits armés, leadership, savoir-faire tactique et stratégique ainsi que les méthodes de planification et les principes fondamentaux militaires.
EUTM Mali poursuit sa mission visant à contribuer à la restauration de leurs capacités militaires des FAMa. Le but est qu’elles redeviennent capables de mener des opérations pour rétablir l’intégrité territoriale du Mali, protéger la population et réduire la menace terroriste.
Le tableau si sombre dépeint traduit l’échec de la Mission d’entraînement qui devrait elle aussi faire son introspection.
Du côté des Forces armées maliennes, la confiance est certainement douchée, après la série d’attaques meurtrières dont elles ont fait l’objet et auxquelles elles restent toujours exposées. La preuve : après l’attaque meurtrière de Indelimane (54 soldats maliens tués et une dizaine de blessés), une source sécuritaire nationale, sous couvert d’anonymat, avait confié à RFI : « la difficulté récurrente pour les FAMa de se fier à des renseignements communiqués par des sources amies ».
Faut-il alors craindre une guerre dans la guerre du fait de frustrations mal assumées ? Un tel scénario serait une dérive périlleuse, parce que la seule guerre qui brave la communauté nationale et internationale est celle contre les terroristes. Les méfiances et défiances ; les affabulations et autres subterfuges représentent un énorme gâchis qui profitent naturellement à l’ennemi qui suscite et surfe sur les divisions. Il a porté un sérieux coup au vivre ensemble de communautés ; une zizanie entre les forces partenaires serait la catastrophe. Alors, sachons raisons garder. Un proverbe allemand dit : ‘’la patience donne le courage, le courage enfante l’espérance, et l’espérance ne laisse pas tomber dans la honte’’. Il est impératif d’éviter de multiplier les erreurs et impairs.
PAR BERTIN DAKOUO