Or, il n’est pas sûr que l’état de civilisation actuel de l’Afrique, marqué par l’extension, au cours de ces dernières années, de la misère et de la précarité à la quasi-totalité des couches sociales, autorise encore longtemps les louvoiements et les ronds de jambe. De nombreux éléments indiquent que les mythes post-coloniaux créés par la génération des indépendances ont désormais atteint leur rendement maximal en tant que facteurs de régulation sociale.
L’Afrique actuelle se caractérise, en effet, par une sorte de fièvre, d’explosion d’ambitions longtemps contenues qui, faute de trouver à s’employer utilement, menacent de saccager les fondements mêmes de sociétés historiquement myopes, et toujours plus inégalitaires.
Tout se passe comme si les raccourcis, les clichés brandis jusqu’ici pour masquer la profonde inertie d’un continent engagé depuis trente ans dans un obscur processus de développement, commençaient à craquer sous le poids d’insoutenables contradictions idéologiques et économiques.
L’Africain deviendrait-il exigeant? Qu’adviendra-t-il de la flambée actuelle de violence qui, du Sénégal au Gabon, en passant par la Côte-d’Ivoire, le Niger et le Bénin, sème un peu partout de gros points d’interrogation à propos de l’avenir?
Après trente années de léthargie sociale, une génération à la dent dure a émergé. En quête de réponses dangereuses peut-être, mais à tout prendre plus satisfaisantes pour l’esprit que l’espèce de « bouc émissairation » qu’on lui a proposée dès le berceau, elle refuse de pâtir plus longtemps d’incohérences africaines visibles à l’œil nu, réclame un peu plus de clarté, de limpidité, de conséquence, de dignité.
Axelle Kabou
Source: Le Démocrate- Mali