Soumeylou Boubèye Maiga constitue une case centrale de la lutte pour les acquis démocratiques. Téméraire et ambitieux, l’homme est passé dans le cercle restreint des acteurs que les urnes ont portés aux affaires en 1992 dans les équipes d’Alpha Oumar Konaré. Durant toute cette époque de l’ère démocratique, celui qui est estampillé « détenteur des dossiers secrets » a servi et s’est servi de la République en fonction de ses affectations et des circonstances.
Plusieurs fois Ministre, secrétaire général de la Présidence et Premier Ministre, « le Tigre » a été au cœur de plusieurs controverses tant avec les politiques, les religieux que d’autres acteurs qui contrôlent et font fonctionner l’Etat. C’est inadmissible qu’il ait commis autant d’erreurs dans son exercice, regrette un observateur qui semble bien connaitre l’homme.
Des erreurs, pour un acteur politique, SBM en a commises de monumentales, avec des opportunistes adjuvants qui n’ont pas contribué à redresser ses maladresses et ses railleries à l’endroit d’un monde religieux et de ses leaders les plus populaires, les plus adorés et les plus respectés. La vie est une roue et le pouvoir ne devrait permettre qu’à conduire et à servir les intérêts des autres.
Mais le Tigre de Badala, voulant incarner une certaine autorité de l’Etat, a ordonné des répressions sauvages contre l’expression des libertés collectives, la brutalisation d’acteurs avec lesquels il avait farouchement combattu GMT. Pour les maliens, cette draconienne méthode devrait se déployer dans les régions où l’envergure et la nature des massacres étaient inédites.
Soumeylou avait alimenté des foyers de tensions, avec une colère populaire et parlementaire qui l’a contraint à prendre le large le 18 Avril 2019, remettant sa démission au chef de l’Etat Ibrahim Boubacar Keita. Ce n’était que la suite d’une exigence globale, formulée par la majorité de Bocary Treta, l’opposition de Soumaïla Cissé, le clan religieux de l’imam Mahamoud Dicko et surtout par les principaux syndicats de la magistrature (SAM et SYLIMA) qu’il a voulu embarquer dans le train de l’humiliation et de la soumission.
Aujourd’hui, l’ancien Premier Ministre, suspecté dans plusieurs affaires scandaleuses, se retrouve entre plusieurs feux. Soumeylou Boubèye Maiga n’est plus en odeur de sainteté avec le chef de l’Etat, à l’assemblée nationale, des députés, tous bords confondus, l’attendraient peinards de voter une mise en accusation si elle venait à être engagée.
Quant aux magistrats, bien qu’ayant beaucoup de chats à fouetter, ils ne manqueraient pas de marquer à la culotte un tigre dont la tigritude semble s’être édulcorée. Un tel champion de la classe politique malienne est tombé au moment où son ascension vers la magistrature suprême avait des chances de prospérer. Mais, aujourd’hui, le pôle économique est un chaudron où SBM et alliés cités et assignés. C’est une nouvelle donne qui ouvre la porte au couloir de l’insondable et de l’incertitude.
Figaro du Mali