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Entre nous : Arrêtons la fuite en avant ?

On interpelle Ras Bath. La nuit de son interpellation, certains jeunes prennent d’assaut le Camp I et d’autres déversent des ordures sur l’une des voies principales de Djicoroni Para. Le jour de son passage devant le Procureur de la République, de violentes manifestations opposent ses supporters aux forces de l’ordre. Bilan, un mort, dix huit blessés, cinq véhicules endommagés, le tribunal saccagé, plusieurs motos volées ou détruites, une maison incendiée par du gaz lacrymogène. On coupe les réseaux sociaux notamment Facebook et Tweeter.

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Vingt-quatre heures après, Ras Bath est libéré et placé sous contrôle judiciaire assorti de certaines restrictions comme celle d’animer des émissions radios ou de sortir du territoire de la commune IV. En même temps, on enferme les dix-neuf personnes arrêtées lors des manifestations tout en promettant un jugement exemplaire. A écouter le Ministre de la Justice et des Droits de l’Homme, Garde des Sceaux, Me Mamadou Ismaël Konaté, venu constater les dégâts au Tribunal de Grande Instance de la Commune IV du District de Bamako, on ne se fait pas d’illusions sur la lourde sentence qui attend ces infortunés.

Tout ça pour ça ? La gestion de l’affaire Ras Bath nous donne cette mauvaise impression que les autorités manquent cruellement de sens d’anticipation ou veulent surfer sur certains thèmes pour essayer de donner un semblant de fermeté ou de restauration de l’autorité de l’Etat. On n’avait nullement besoin de se livrer à une telle gymnastique avec tant d’énergie pour ce cas, si simple et facile. Quand les services de l’Etat déploient tant d’effort pour le cas Ras Bath, il y a lieu de s’inquiéter et de s’interroger sur leur capacité à nous sauver des périls dont la plus imminente est la partition du pays qui prend de plus en plus corps avec la situation de Kidal où des groupes armés se disputent le leadership sous le regard impuissant du gouvernement.  Il est inacceptable que des citoyens se livrent à des actes de violences dans un Etat qui se veut démocratique. De même qu’il est intolérable que des agents, en charge du maintien de l’ordre, tirent à balles réelles sur des manifestants à mains nues. La restauration de l’autorité de l’Etat n’est pas synonyme  de l’autoritarisme. Elle ne signifie pas non plus que les forces de l’ordre soient autorisées à tirer à « balles réelles » sur des manifestants non armés.

Les manifestations du mercredi 17 août dernier qui interviennent après d’autres similaires, étaient prévisibles. Arrêtons donc la fuite en avant ! La crise est trop profonde. Il y a une véritable rupture entre le peuple et l’élite dirigeante. Quand les gens ont le sentiment que la justice fait la promotion de l’injustice et de l’impunité, quand les gens pensent qu’une petite minorité se partage les richesses nationales au détriment de la majorité, quand les gens ont la conviction que l’Etat est gangrené par la corruption, l’injustice, la discrimination, quand les gens estiment que les détenteurs de l’autorité de l’Etat ne disent pas la vérité, comme c’est le cas actuellement, aucun discours de fermeté ne passera. Pis, les propos de fermeté risquent d’être pris pour de l’arrogance.

Ces jeunes gens qui manifestent à Gao ou à Bamako et prennent du plaisir à écouter certains propos incendiaires comme ceux de Ras Bath, autoproclamé révolutionnaire et défenseur des pauvres et des sans-voix, se sentent abandonnés par l’élite gouvernante « corrompue et vendue », à leurs yeux, donc assimilable « aux ennemis de la patrie ». Ce sont ces jeunes sans perspective qui laissent s’exprimer leurs frustrations et leurs rancœurs à l’encontre du pouvoir d’Ibrahim Boubacar Kéïta, pris pour cible par certains manifestants du mercredi dernier à travers des propos très indécents. En ce moment de grandes incertitudes et d’angoisses, il ne faut pas que le Président IBK se laisse posséder par le démon du pouvoir. Une fois que ça pète, il se verra vite abandonné par cette bande de courtisans qui ne pense qu’à la satisfaction de ses intérêts égoïstes et sordides. L’une des solutions passe par l’instauration d’une gouvernance vertueuse dans laquelle les citoyens se reconnaîtront pleinement et entièrement.

  Chiaka Doumbia

Source : Le Challenger

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