Le jeudi dernier, le ministère de l’Élevage et de la Pêche a effectué une visite de terrain dans la cité du Méguétan. La délégation était conduite par M. Nango Dembélé, ministre de tutelle. Cette visite s’inscrivait dans le cadre d’une prise de contact et d’échanges entre les responsables du département et les Directeurs régionaux, des techniciens de l’élevage et de la pêche et tous les acteurs du secteur en vue de trouver des solutions idoines aux différentes préoccupations auxquelles les secteurs de l’élevage et la pêche sont confrontés actuellement.
Composée des conseillers techniques et d’un député de la Commission Développement rural, la délégation ministérielle a été accueillie par le Gouverneur de Koulikoro.
Les représentants des associations d’éleveurs, des pêcheurs, des pisciculteurs, de producteurs de lait et des bouchers étaient de la partie pour non seulement souhaiter la bienvenue aux hôtes, mais aussi exhiber les défis auxquelles les filières élevage et pêche sont confrontés depuis des années.
La salle de conférence du gouvernorat de Koulikoro a servi de cadre pour cette séance d’échanges. Sans transition, éleveurs, pêcheurs et services techniques de la région ont égrené un chapelet de préoccupations qui entravent les secteurs. Après les salutations d’usage, le Directeur Régional de l’élevage ne s’est pas tu sur les contraintes auxquelles est confronté le secteur dans la région. Parmi ces défis, M. Dembélé a souligné l’épineux problème d’espace de pâturage. Selon lui, le cheptel de la région de Koulikoro ne peut plus passer certaines périodes au Mali. Ils sont obligés d’aller vers la Côte d’Ivoire, le Sénégal ou la Guinée pour se nourrir et s’abreuver.
« Tant que ce problème persiste, le Mali sera confronté à la cherté du prix du kg de viande », a-t-il prévenu. Il a par ailleurs déploré le piteux état dans lequel se trouvent les infrastructures, les Directions et les services techniques.
Quant au Directeur du Service vétérinaire, Missa Dembélé, il a lui aussi déploré un déficit criard de personnel et le manque de formation du peu de personnel existant sur le terrain. La transhumance des animaux vers les pays voisins constitue aussi un véritable défi pour le service vétérinaire de la région, car, les animaux reviennent avec certaines maladies qui étaient en passe de disparition, chez-nous.
« Il nous faut des points d’eau et améliorer des pâturages naturels que nous disposons, en luttant contre les feux de brousse et autres actes qui dégradent ces ressources alimentaires du cheptel », a-t-il conseillé. Les éleveurs, par la voix de Modibo Diallo, ont regretté que la ville de Koulikoro n’est pas dotée de marché de bétail ni d’abattoir qui répond aux normes régionales.
Quant au Directeur Régional de la pêche, il a souligné que ce secteur aussi connaissait des dysfonctionnements.
Le Président de l’Association des pisciculteurs de Koulikoro a quant à lui évoqué le différend qui oppose les vendeurs de poisson et de sables et de graviers, sur les bordures du fleuve.
« Ces gens-là nous polluent l’eau. Pire, pour la pisciculture, il nous faut des espaces et de l’eau propres. À cause des activités des exploitants de sable et de gravier, ces éléments essentiels pour notre activité sont devenus rares. Outre ce problème, l’alimentation pour poisson nous cause d’énormes problèmes. Si l’État pouvait nous aider à implanter une usine d’aliments de poissons, cela nous aiderait à atteindre notre objectif de produire 33.000 tonnes par an », a-t-il martelé.
Le représentant de la filière lait a salué le programme d’insémination artificielle des vaches initié par le gouvernement et ses partenaires. Mais l’arbre ne devant pas cacher la forêt, puisque cette filière est elle aussi confrontée à la transhumance du cheptel et la cherté de l’aliment bétail qui réduisent considérablement les marges de manœuvre des acteurs.
Des solutions à la dimension des préoccupations
Après avoir tendu une oreille attentive aux différentes préoccupations, le ministre Dembélé a fait constater que les problèmes sont du même type partout où la délégation est passée. Pour le problème foncier, il a assuré que le Président de la République a demandé aux départements concernés de tout faire pour réhabiliter les pistes de passage des troupeaux, conforment à la charte pastorale, une loi votée au Mali depuis 2001. Il a soutenu que son département en collaboration avec les ministères de l’Agriculture, des Collectivités et de l’Administration territoriale sont à pied d’œuvre pour avoir une cartographie fine de ces passages. En outre, tous les parcs seront immatriculés dans un très bref délai. En effet, selon lui, l’espace rural est déjà organisé en conformité avec la Charte, dont l’application stricte est un gage pour pallier tous ces problèmes cités. C’est pourquoi, a-t-il soutenu « j’ai proposé aux autres départements concernés des séances de travail avec les paysans et les éleveurs pour que chacun respecte sa part de responsabilité. Le berger n’a pas à outrepasser ses limites et le cultivateur non plus n’a pas droit d’exploiter le passage des animaux comme champ. Je crois que ce serait facile pour nos parents des milieux ruraux de le comprendre, car le Mali est un pays où le paysan et l’éleveur ont toujours été des acteurs complémentaires. Il suffit seulement de leur expliquer de façon objective ce que chacun doit faire », a-t-il affirmé.
Sur le même sujet, le ministre a informé qu’un nouveau projet de loi sur le foncier agricole est sur la table de l’Assemblée nationale. Si après observation, cette loi parvient à être votée, elle viendra renforcer la première déjà en place, indique-t-on. Le ministre, pour sa part, a surtout mis un accent particulier sur la sensibilisation des agriculteurs et des éleveurs. Outre les contentieux, entre paysans et éleveurs, le problème d’urbanisation est aussi devenu un véritable casse-tête pour les éleveurs.
Pour le ministre Dembélé, l’urbanisation galopante affecte et les éleveurs et les paysans. Donc, ces plans aussi doivent comporter des alternatives pour les paysans et les éleveurs, a indiqué le ministre.
Concernant la question de moyen et de fonctionnement, le ministre reconnait l’insuffisance du budget qui avait été voté pour un seul département, celui du Développement rural qui englobait l’agriculture et l’élevage. Il reste convaincu que les problèmes seront résolus avec le temps.
Le ministre a promis que des efforts seront faits pour changer la donne, la prochaine année budgétaire. Il a promis de tout faire pour que la Commission Développement rural fasse le plaidoyer devant le ministère des Finances afin que les agents sur terrain aient les moyens nécessaires pour travailler indépendamment des projets et programmes des partenaires.
« Souvent, les agents sont confrontés au manque criard d’entretien des infrastructures et du matériel. Pour les aliments bétails, volailles et de poissons, la libre circulation des animaux vers le marché, le Département est en train de voir avec les acteurs à la base, la solution de production des aliments faits à base de produits de chez nous pour que le coût soit abordable aux éleveurs », a-t-il indiqué.
Quant au ministre Dembélé, il a rassuré que cette mission est déjà une balise pour poser le jalon d’une nouvelle orientation qui sera partagée avec les partenaires. Sur la question, le Nango Dembélé a révélé son département a déjà élaboré une note d’orientation stratégique avec certaines faitières comme celles des deux sous-secteurs. Aussi, des efforts sont-ils en cours pour la finalisation de ce document. Ledit document, dit-il, servira de base pour la définition des différents projets/programmes en cours de discussion avec certains partenaires comme la Banque Mondiale, la Banque Islamique de Développement la (BID) et la Banque Africaine de Développement (BAD).
La délégation ministérielle a ensuite visité les différentes structures rattachées au Département, notamment la Direction régionale de la Pêche, Direction régionale de l’Industrie de la Pêche, le Service des Protection et Industrie animale, la Direction régionale des Services vétérinaires. Partout le constat est le même : état piteux des infrastructures et sous équipés.
Après les services techniques, la délégation a rendu visite à l’usine « Les Grands Moulins du Mali », implantée à Kayo où elle produit des aliments bétails, de volailles et de poissons, à travers marque « Bou Nafama », connue par beaucoup d’éleveurs de la place. Ladite unité a une capacité de 150.000 tonnes/an.
Christelle KONE
Source: info-matin