Le Tchad, sous la présidence de Mahamat Idriss Déby Itno, a récemment franchi une étape décisive en rompant l’accord de défense qui le liait à la France. Ce geste, audacieux et symbolique, marque un tournant dans la relation complexe entre le pays et son ancien colonisateur. Il faut saluer cette démarche comme une affirmation de souveraineté, un acte de volonté politique destiné à rendre au Tchad sa liberté d’action sur la scène internationale, loin des chaînes de la dépendance post-coloniale.
Bamada.net-Cependant, ce choix ne se fait pas sans risques. Le Tchad a toujours été perçu comme un allié stratégique de la France dans la lutte contre le terrorisme au Sahel, et son armée, l’une des plus importantes de la région, joue un rôle clé dans la stabilisation du pays et de ses voisins. La rupture de cet accord pourrait, en effet, envoyer des ondes de choc à travers l’ensemble de la région. Dès lors, la question se pose : la France accepterait-elle cette remise en cause de son influence sans réagir ?
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Le Tchad, en s’éloignant de Paris, prend un pari audacieux. Mahamat Idriss Déby Itno semble vouloir ouvrir de nouvelles perspectives en matière d’alliances, envisageant peut-être des partenariats plus diversifiés, notamment avec des puissances comme la Chine ou la Russie. Toutefois, ces alliances restent encore fragiles et il est loin d’être garanti qu’elles puissent remplacer l’influence que la France exerçait dans le pays. Par ailleurs, ce renouveau de souveraineté pourrait également exacerber les tensions internes, avec des mouvements populaires qui réclament des changements profonds dans la gouvernance du pays.
L’option de rompre avec la France n’est donc pas simplement une question de politique extérieure, mais un défi de gouvernance interne. Si le Tchad réussit à équilibrer sa volonté d’indépendance avec la gestion des pressions internes et des réalités géopolitiques, il pourra se renforcer en tant qu’acteur indépendant et respecté sur la scène internationale. Mais en cas d’échec, le pays pourrait sombrer dans une instabilité qui déstabiliserait davantage la région.
Le gouvernement français, qui a perdu pied au Mali et au Burkina Faso après des ruptures diplomatiques similaires, pourrait voir dans cette décision une menace pour ses intérêts en Afrique. Il est légitime de se demander si la France pourrait tenter de déstabiliser le régime tchadien pour tenter de garder sa place dans cette région stratégique. Après tout, une perte de contrôle sur le Tchad serait un coup dur pour ses ambitions en Afrique subsaharienne, un continent où la compétition entre puissances se renforce chaque jour.
Ce que le Tchad démontre aujourd’hui, c’est qu’il est prêt à défendre son indépendance, quel qu’en soit le prix. Le président Déby Itno semble être conscient des enjeux, même si la route s’annonce semée d’embûches. Le Tchad pourrait bien devenir un modèle pour d’autres pays africains en quête de libération des influences étrangères, ou, au contraire, se retrouver dans l’œil du cyclone des jeux de pouvoir internationaux.
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À un moment où le continent africain cherche de plus en plus à s’affirmer sur la scène mondiale, il est légitime de se poser la question suivante : jusqu’où les anciennes puissances coloniales accepteront-elles de perdre leur emprise sur leurs anciennes colonies ? Le Tchad a clairement pris un virage décisif, mais l’avenir dira si cette rupture avec la France est un acte de souveraineté durable ou un pas vers une nouvelle forme de fragilité politique.
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BEH COULIBALY
Source: Bamada.net