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Éditorial : Au nom de quoi ?

De tous les systèmes de gouvernance que nous connaissons depuis des siècles, la démocratie est, nous dit-on, le meilleur. La démocratie repose sur la rivalité des partis politiques qui concourent à conquérir le pouvoir afin de l’exercer au profit du plus grand nombre. Mais elle repose aussi, tel un édifice sur ses piliers, sur l’engagement conscient des citoyens qui, par souci du bien-être de tous, doivent être exigeants sur la qualité de la gouvernance. Général Charles De Gaule, héros français par excellence, savait bien tout cela.

Mais le voilà qui proclame, après la libération de la France de l’asservissement nazi, après avoir congédié, au nom de la souveraineté française, les troupes militaires américaines venues pourtant participer, au prix du sang, à la libération de la belle France, qu’il faut mettre un terme au régime des partis politiques, c’est-à-dire empêcher que la République et l’État soient comme avant à la discrétion des partis politiques. De Gaule ajoute : « Si malgré tout les partis se ‘’réemparent’’ des institutions, de la République, de l’État, alors, évidemment, rien ne vaut plus.» Général Charles De Gaule, le patriote et le libérateur de la France, a le sens de la formule en stigmatisant les partis politiques : « On a fait des confessionnaux pour repousser le diable, mais si le diable est dans les confessionnaux, alors ça change tout ». On l’a compris, le grand De Gaule, plus de deux mètres de taille, s’est bien penché sur les partis politiques et a compris que ce qui est arrivé à la France, au moins deux guerres d’envergure (14-18 et 39-45) n’a d’explication que la nuisibilité des partis politiques, coupables de mauvaise gestion, de gouvernance chaotique, de turpitudes multiples.

Faut-il un parallèle ? Colonel Assimi Goïta, héros de la libération du Mali de la lourde hypothèque que les partis politiques maliens ont fait peser sur notre pays durant trente ans, avec la conséquence fâcheuse de la perte de 73% de notre territoire national, et encore, a fait le bon job de faire tenir les Assises Nationales de la Refondation (ANR) auxquelles il a appelé tous les partis politiques dont certains ont joué à la sourde oreille. Il s’en est suivi la résistance à tous les envahissements,  qui a abouti finalement à la souveraineté retrouvée, au départ des troupes d’occupations françaises qui n’étaient pas venues chez nous, contrairement aux soldats yankees en France, pour nous aider à nous libérer. Au nom donc de quoi, aujourd’hui, ceux qui, par leurs pratiques, ont institutionnalisé la corruption et  les délinquances multiples, en faisant passer les concussions et autres prédations de PME en Multinationales de l’enrichissement illicite, maraudant sans retenue les deniers publics, doivent être appelés comme des anges au secours de la quatrième République ? Au nom de quoi ceux qui ont allumé le bûcher sur lequel ils ont compté, depuis deux ans, faire consumer la Transition et la quatrième République ? Au nom de quoi ceux qui ont, en incontestables criminels, constamment tiré sur la Transition, tels des envahisseurs venus d’ailleurs, n’épargnant même pas les ambulances ? Au nom de quoi les nouvelles bourgeoisies bâties sur les biens volés de l’Etat et sur le sang de nos soldats à Aguelhok et en bien d’autres endroits, doivent fournir à la quatrième République leurs fantassins, toujours les mêmes, pour gérer les entreprises publiques, pour être les représentants du Mali dans nos chancelleries à l’extérieur, pour devenir ministres dans les gouvernements à venir ? Au nom de quoi ceux qui doivent des comptes à l’Etat et aux Maliens soient lavés avec l’eau de rose pour être étiquetés nouveaux infaillibles et être remis en situation de piller ? Qu’il me soit permis de citer l’Honorable Moussa Diarra, ancien député du RPM et pionner de la dénonciation de la France, qui s’adressait, dans nos colonnes en janvier 2022, aux politiciens qui refusé l’appel du Colonel Goïta à prendre part aux ANR (les mêmes qui se drapent aujourd’hui du manteau de la vertu pour revenir au cœur de la nouvelle gouvernance) et qui souffraient des victoires des FAMAs : « En évaluant le chemin parcouru depuis trente ans, d’ailleurs en prenant le raccourci des huit dernières années, il sera aisé, si tant est que l’honnêteté et la morale doivent prévaloir, d’accepter la volonté du peuple qui ne donne nul autre choix aux autorités d’aujourd’hui que le respect. Si la démocratie est le pouvoir du peuple, par le peuple et pour le peuple, tenez compte des aspirations du peuple, et non d’appeler l’extérieur à sanctionner votre propre pays, avec la conséquence fâcheuse que ce sont les citoyens qui souffriront alors que vous serez à l’abri dans un confort que vous leur devez. Vous voulez les intérêts de la France avant ceux de votre patrie ? Eh bien, le Français Jean Jacques Rousseau vous dit : «Quand un peuple ne défend plus ses libertés et ses devoirs, il devient mûr pour l’esclavage.» « Cette assertion, le peuple malien l’a comprise. Ayez honte un peu ! »

Amadou N’Fa Diallo

Le National

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