C’est par un point de presse animé par le ministre d’Etat, ministre de l’administration territoriale et de la décentralisation, porte-parole du Gouvernement, que l’opinion nationale et internationale a été informée du report des élections présidentielles. Cette décision entrainerait de facto une prolongation, à une date ultérieure de la durée de la transition, pourtant initialement fixée au mois de mars 2024 avec l’élection d’un nouveau président de la République.
Qu’il soit dit en passant, si la décision du report n’a guère surpris les observateurs avertis de la scène politique malienne, la méthode cavalière et solitaire des autorités de la transition ont par contre surpris plus d’un. Par cette décision les autorités ont non seulement suscité des vives réactions tant au sein de la classe politique que de la société civile, mais aussi et surtout elles ont provoqué une véritable levée des boucliers au sein de l’opinion. En effet, le gouvernement a pris cette décision sans aucune concertation encore moins un minimum de consensus comme cela sied en pareille circonstance. Comment une décision aussi importante qui engage toute une nation, quelques individus furent-ils au sommet de l’Etat, peuvent s’arroger le droit de la prendre sans se référer aux acteurs ?
En reportant les élections et du coup en prolongeant la transition, les autorités ont été non seulement mal inspirées, mais elles auraient exposé le Mali et les maliens à des nouvelles sanctions, celles qui risqueraient de sonner le glas du régime actuel. En tout cas à en juger par la teneur des communiqués de certains partis politiques et associations tout comme l’incompréhension d’une frange importante de l’opinion, qui souhaitent vivement que le Mali sorte de cet imbroglio politico-économico-financier qui l’étreint depuis près de trois ans , on peut alors affirmer sans risque de se tromper que les jours, les semaines, voire les mois à venir risquent d’être tumultueux au Mali. Qui sème le vent récolte la tempête a-t-on coutume de dire. Les autorités de la transition, en reportant de façon unilatérale et en ignorant voire méprisant, la classe politique, la communauté internationale et même l’opinion nationale, non seulement se fragiliseront, mais aussi et surtout exposeront le Mali à des sanctions sévères à l’instar de celles du Niger. Le résilient Peuple malien est-il encore et toujours prêt à subir d’autres sanctions ? La réponse semble être non, eu égard aux vives hystériques réactions que le report avait suscité.
Les autorités de la transition, par cette décision, semblent désormais prêter les flancs aux critiques des opposants. Certains partis politiques et associations ont déjà donné le ton en condamnant sans réserve la décision unilatérale de report des élections et exigent le respect des engagements pris. Que vont-ils faire après ? En tout cas l’atmosphère est délétère et les deux camps, tout en fourbissant leurs armes, semblent opter pour un dialogue de sourd. La question que l’on est en droit de se poser est celle de savoir, si ce n’est véritablement l’accalmie avant la tempête. Car au regard des déclarations nul ne saurait dire jusqu’à quand cette posture de ni guerre, ni paix durera entre les autorités de la transition et la classe politique dont certains partis politiques proposent déjà une transition civile au-delà de mars 2024 ?
En somme, pour éviter une autre crise dans la crise, le Président de la transition doit inviter en urgence autour de la table toutes les forces vives de la nation, qu’elles soient politiques, religieuses, voire même militaires pour débattre de la question du report. Et qu’il soit dit en passant, un report de plus de deux mois relèverait d’une mauvaise foi manifeste à tenir les élections et une volonté certaine à conserver le pouvoir dans l’illégitimité et l’illégalité. Sans un large consensus autour d’un léger report le Mali subira des lourdes sanctions ce qui sonnerait le glas de la transition
Youssouf Sissoko L’Alternance