Les feux de l’actualité sont, ces jours-ci, braqués sur la Catalogne. Cette « communauté autonome » du royaume d’Espagne veut se soustraire de la tutelle de Madrid et proclamer son indépendance. Voilà qui embarrasse l’Union Européenne et, singulièrement, la France. Un coup d’œil sur la carte de la péninsule ibérique suffit pour comprendre cet embarras de l’Hexagone. Trois régions y présentent des similitudes. Ce sont, d’est en ouest, la Corse, la Catalogne et le Pays basque français. Entre elles, il n’existe ni continuité géographique ni relations de région à région. Mais toutes trois sont secouées par la même volonté d’affirmer leur originalité culturelle au point d’en arriver à vouloir se séparer des ensembles français ou espagnol. L’irrédentisme catalan appelle, de notre part, deux observations.
La première est inspirée par l’attitude de la France face à la crise. Pour le constat ci-dessus formulé, le bras de fer qui, actuellement, oppose Madrid et Barcelone ne peut laisser la France indifférente. Le quotidien parisien 20 minutes, livraison du 22 octobre 2017, l’atteste : « Alors que 450 000 personnes ont encore manifesté samedi pour l’indépendance de la Catalogne, le gouvernement français s’inquiète des répercussions de cette crise sans précédent. » Sans ambages, le ministre français des Affaires étrangères, Jean-Yves Le Drian manifeste cette inquiétude en confiant : « Ce qui importe dans cette affaire, c’est qu’il ya un Etat de droit à respecter et qu’il soit partout la référence centrale de la construction européenne. Dès que l’on sort du cadre constitutionnel au sein des pays de l’Union, on se retrouve dans une situation de dislocation dangereuse. »
Notre seconde observation nous est inspirée par la prise de position d’un homme d’Etat loin du champ de la confrontation, Vladimir Poutine. Il ne manque pas d’ironiser sur la situation, se gaussant des Occidentaux dans leur pratique des relations internationales. Il remonte à 1998. Les Américains, en cette année, pour des intérêts non avoués, imposent à la Yougoslavie une guerre injuste et la disloquent. Les Occidentaux, au lieu de s’opposer à l’entreprise se rallient aux thèses américaines et présentent l’agression comme une guerre menée par l’OTAN pour sauver du génocide une « minorité ». Revenant sur ces faits Poutine, lors de la XIVè réunion annuelle du Club de Discussion de Valdaï confie, à l’attention des participants : « A quoi bon, il fallait, d’une manière si stupide, en partant de la situation politique actuelle et du désir de plaire, disons franchement, au frère aîné de Washington, soutenir sans réserve la session du Kosovo, provoquant des processus similaires dans d’autres régions d’Europe et du monde. »
De ces deux observations, nous déduisons que la situation de crise que nous connaissons actuellement. Ce qui inquiète Le Drian est moins la dislocation de l’Espagne que l’effet domino que cette dislocation risquerait de provoquer en France. Aussi, sommes-nous amenés à poser la question : comment en appeler au respect de l’Etat de droit quand il s’agit de l’Espagne et imposer un diktat au Mali ? N’est-ce pas lui qui a prôné l’autonomie du Nord après avoir reconnu, le 20 juin 2015, l’existence, sur le territoire malien, de « deux peuples qui essayaient de vivre ensemble et qui n’y arrivaient pas bien, qui éventuellement s’affrontaient, ceux du Nord et ceux du Sud ? » Avant lui, un de ses prédécesseurs au Quai d’Orsay, Alain Jupé, s’était publiquement réjoui du massacre d’Aguel Hocq en déclarant, en substance : le MNLA est en train de remporter d’incontestables succès dont il faudra tenir compte. Oui, en tenir compte pour disloquer le Mali.
Donc, pour Le Drian, « Vive l’Espagne unie et haro sur le Mali. » Assurément, de la Catalogne à l’Azawad, le fabuliste continue d’avoir raison : « Selon que vous serez puissant ou misérable, // Les jugements de la Cour vous rendront blanc ou noir. » Mais, que l’on ne s’y méprenne pas : Le Mali n’est pas misérable. Il s’est remis de l’anarchie instaurée par le pachalik marocain, de la tentative d’oblitération de son identité par le colonialisme français. Il retrouvera ses marques pour reconstituer son unité.
LA REDACTION
Le Sursaut