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Echos du prétoire : le juge encaisse le cautionnement mais renvoie le prévenu en prison

Le cautionnement, c’est le fonds ou en tout cas la valeur que le prévenu dépose auprès d’une juridiction pour garantir une créance. Il lui garantit en contre partie la liberté provisoire. De l’avis de M. Hamet Sam, occupant le banc du ministère public à l’audience correctionnelle du lundi 19 mai dernier de la Cour d’Appel de Bamako, dans la jurisprudence « rarement, on a vu quelqu’un qui est mis en liberté après le versement d’une caution et replacé encore en prison ». C’est pourtant la décision prise par M. Amadou Kaly Diallo, alors juge de paix à compétence étendue de Kangaba, dans une affaire de détournement de fonds, opposant des orpailleurs.

 Faits divers

Les faits

Courant 2013, les villageois de Njawuleni, un hameau de Samaya, village situé dans la Commune rurale de Nouga, cercle de Kangaba ont été les premiers surpris de découvrir soudainement qu’ils étaient assis sur de l’or. Il suffit de gratter un peu la surface de la terre pour ramasser des pépites. Dès lors, c’est la ruée. De près ou de loin, tout le monde s’intéresse à l’exploitation traditionnelle de l’or. La nouvelle se propage et attire d’autres opérateurs, notamment industriels telle que la société African Gold.

Elle veut chasser les exploitants traditionnels, lesquels coalisent pour constituer des avocats entre autres Maîtres Coulibaly Kadidia Sangaré et Ibrahim Diawara, tous avocats à la Cour pour obtenir le départ de cette société. Une fois la bataille remportée, la communauté villageoise s’organise pour attribuer des licences d’exploitation à des exploitants, moyennant paiement d’une redevance.

Siaka Diawara, notable du village est désigné trésorier. C’est lui qui délivre au nom de la communauté, les papiers d’installation et encaisse les fonds. Il ne jouira pas longtemps de cette confiance. En quelques mois, il est soupçonné d’avoir détourné la bagatelle de 18 millions de FCFA. Les autres membres de la communauté se retournent contre lui et l’affaire se transporte devant le juge de paix à compétence étendue de Kangaba. Siaka se retrouve en détention provisoire. Il constitue les deux avocats de la communauté à savoir Maîtres Coulibaly Kadidia Sangaré et Ibrahim Diawara pour plaider sa cause car, il ne reconnait pas les faits. Ses deux avocats tentent de lui négocier une liberté provisoire auprès du juge Amadou Kaly Diallo qui leur oppose une fin de non recevoir au motif que l’instruction est en cours.

N’ayant pas pu le faire plier, ils le court-circuitent en adressant leur demande de mise en liberté provisoire à la Cour d’Appel de Bamako. Par arrêt N°449 du 04 mai 2013, la Cour d’Appel accède à la demande des avocats de Siaka et instruit le juge de lui accorder la liberté provisoire. Bon gré, malgré, par décision en date du 24 juin 2013, il fixe sa caution à 250.000 F CFA, intégralement versée et accorde la liberté provisoire.

Siaka Diawara sort de prison, mais pas pour longtemps. Dix mois plus tard, Amadou Kaly Diallo enrôle l’affaire, la juge au fond et le condamne le 5 mars 2014 à un an de prison ferme avec mandat de dépôt à l’audience, c’est-à-dire que de la barre, le prévenu va en prison directement. Les avocats de Siaka ont aussitôt fait appel de cette décision et l’affaire s’est transportée devant la chambre correctionnelle de la Cour d’Appel de Bamako. Avant même son examen au fond à ce niveau, Maîtres Coulibaly Kadidia Sangaré et Ibrahim Diawara ont renouvelé leur demande de mise en liberté provisoire à l’audience présidée par M. Léon Niangaly, demande enrôlée sous le N°81 ce lundi 19 mai et qui a suscité un échange houleux entre avocats du prévenu et conseil de la partie civile, Me Salif Coulibaly.

Dans sa plaidoirie, ce dernier s’est farouchement opposé à la mise en liberté provisoire de Siaka Diawara. « Les villageois ne comprendraient rien. C’est un risque pour lui. C’est son père adoptif qui a témoigné contre lui à l’audience, d’où le mandat de dépôt à l’audience. Il a détourné l’argent de la communauté et il faut qu’il paye une caution raisonnable. Pendant l’instruction, il a versé une caution de 250.000FCFA. Maintenant qu’il est jugé et condamné, le juge l’a remis en prison. La caution est devenue caduque », a plaidé Maître Coulibaly.

Les deux avocats de Siaka Diawara ont balayé d’un revers de main cet argumentaire. « Il offre une garantie suffisante pour se présenter devant le juge à chaque fois que besoin est. Il a une adresse sûre, notable à Samaya où il réside. Siaka est marié et père de quatre enfants. C’est un problème de famille entre eux.  La partie civile est poursuivie par notre client dans une autre affaire d’argent. La caution n’est pas caduque car, l’affaire se poursuit. Siaka n’a ni frère ni parent. Il n’a que son épouse. Sa détention n’est pas nécessaire, laissez-le aller cultiver son champ. Sa mise en liberté ne posera aucun problème.. . », ont-ils répliqué.

Dans son réquisitoire, M. Hamet Sam, occupant le banc du ministère public a fait remarquer que le juge avait déjà fixé une caution, laquelle a été versée. Rarement, poursuit-il, on a vu quelqu’un mis en liberté et replacé encore en prison.

Au stade actuel de la procédure, sa détention n’est pas nécessaire pour la manifestation de la vérité. On ne peut pas le garder en prison pour faire plaisir aux autres. Répliquant à l’avocat de la partie civile qui dit que la libération de Siaka est un risque, le ministère public dit qu’à la première libération, il n y a pas eu soulèvement. Le délibéré est renvoyé au lundi 26 mai prochain.

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