Les 20 et 21 décembre, se tenaient un atelier d’information sur l’avant-projet de loi sur les violences basées sur le genre, au Centre National d’Information et de Documentation sur la Femme et l’Enfant (CNDIFE). Djingarey Maïga, coordinatrice de l’association Femmes et Droits Humains nous donne plus d’informations sur ce problème de société.
Journal du Mali : Dans quelles circonstances cet avant-projet de loi arrive ?
Djingarey Maïga : C‘est un processus qui a duré, au moins, deux ans. L’avant-projet de loi a été élaboré par la participation des organisations des femmes, des Droits de l’Homme et l’appui technique des ministères de la Justice, de la Sécurité, de la Promotion de la femme, le programme national des luttes contre l’excision et la MINUSMA et ONU Femmes qui avait accordé un financement à l’ONG « Accord International ». L’avant-projet de loi a été déposé au niveau du ministère de la Promotion de la Femme qui est porteur de cette loi. C’est ce même ministère qui doit amener cet avant-projet de loi à l’Assemblée nationale.
Est-ce qu’il y a des dispositifs qui protègent les victimes des violences basées sur le genre ?
Au Mali, nous n’avons pas encore de loi sur les violences basées sur le genre et sur les violences faites aux femmes. Nous avons constaté qu’avoir une loi sur les violences basées sur le genre doit couvrir les femmes, les hommes et les enfants. Il y a aussi des hommes et des enfants qui font face à des types de violences. Dans l’avant-projet de loi, il y a des violences qui sont prises en compte par le Code pénal, mais avec les occupations dans le nord du pays, nous avons remarqué qu’il y a des violences que le Code pénal n’avait pas prévu. Dans la vie de tous les jours, nous avons, également, vu que les victimes font face à des violences de plus en plus violentes que l’on n’avait pas connues au Mali, avant 2012, et qui sont vécues par de nombreuses personnes. Nous nous sommes attachés à prendre en compte des instruments juridiques au niveau national, par exemple la Constitution, mais aussi les lois et les politiques nationales telles que la loi sur la santé de la reproduction, sur le VIH/Sida, la politique nationale genre en plus des instruments juridiques.
On pense souvent aux femmes lorsqu’il s’agit de violence, mais on pense très peu aux hommes. Quelles sont les violences auxquelles ils sont confrontés ?
Ce que l’on appelle les violences domestiques, il y a des hommes qui en subissent. Certains subissent d’autres sévices tels que les viols. Nous avons constaté qu’il y a de plus en plus d’hommes et de jeunes garçons qui sont violés, par des hommes en général. Même si les gens ne sont pas dans les assistances juridiques au niveau des tribunaux, nous savons cela.
Êtes-vous en mesure de nous communiquer des chiffres ?
Nous, en tant qu’organisation des femmes en tant qu’organisation des droits de l’Homme, chacun travaille de son côté et chacun dispose de ses chiffres. Au niveau de notre organisation, nous avons mené une réflexion et nous nous demandons si l’on ne doit pas prendre une organisation et en faire la base pour que nous puissions nous mettre ensemble afin de nous compléter pour avoir des chiffres propres au cas du Mali. Au niveau de la société civile, si l’on pouvait prendre une organisation qui enregistre tous les cas chaque année ou chaque trimestre pour que nous puissions arriver à une statistique qui répondrait vraiment aux cas que nous recevons au niveau de nos organisations respectives.
Existe-t-il des structures qui viennent en aide aux victimes maliennes ?
Oui, il y en a tellement. Mais, avec les événements de 2012, il y a un groupe d’organisations qui s’est mis en place pour la défense des victimes, donc, il y a la clinique juridique Deme-So,le WILDAF l‘APDF, l’AMDH et d’autres organisations des droits de l’Homme du Mali. Ces structures travaillent pour faire en sorte que les victimes puissent jouir de leurs droits et lutter contre l’impunité de ces cas.
Les victimes qui portent plainte parviennent-elles à avoir gain de cause ?
Ce n’est pas tout le temps le cas, car la plupart des nouveaux types de violences ne sont pas pris en compte dans le Code pénal et parfois, il est même difficile pour la juridiction de bien stationner ou sanctionner comme le juge le voudrait bien. Cela s’explique par le fait que ces violences d’un nouveau genre ne sont pas répertoriées par nos lois. Il faut reconnaître que parfois la justice elle-même fait face à des contraintes. Par exemple, quand un cas de violence domestique est présenté à la justice, en général, quand le cas est en train d’aboutir, c’est en ce moment que le chef religieux, le chef de famille ou le chef de quartier va intervenir. C’est dans nos mœurs de demander l’abandon de poursuite surtout quand un représentant vient en tant que médiateur. Parfois, il est difficile pour le juge de pointer les cas comme il le voudrait.
Journal du mali