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Discours du Médiateur de la République lors de la cérémonie de présentation des Rapports annuels 2012 et 2013 au président Ibk

Baba Akhib Haïdara Médiateur République
Discours du Médiateur de la République lors de la cérémonie de présentation des Rapports annuels 2012 et 2013 à SEM le Président de la République (Koulouba, le le 29 Mai 2014)
Monsieur le Président de la République,

La loi dispose que le Médiateur de la République présente au Président de la République ainsi qu’au Président de l’Assemblée Nationale, un rapport annuel sur ses activités de l’année précédente.
Aujourd’hui, j’ai l’honneur de vous présenter non pas un mais deux rapports. Il s’agit des rapports d’activités menées au courant des années 2012 et 2013. En voici les raisons.

Dès le premier trimestre de 2012, notre pays a été envahi par des forces du mal qui ont provoqué une désorganisation générale de l’Etat et de ses démembrements.

Au niveau des Services du Médiateur de la République, les Délégués pour les régions de TOMBOUCTOU, de GAO et de KIDAL, ont dû abandonner leurs postes respectifs, tout comme les autres agents de l’Etat républicain, au même moment où de nombreuses populations fuyaient le terrorisme des « Jihadistes ».

Le régime d’exception, instauré, non seulement au sommet de l’Etat mais aussi, sur toute l’étendue du pays, a fortement affecté les activités traditionnelles du Médiateur de la République, notamment celles qui concernent les réclamations relatives au fonctionnement des Administrations de l’Etat et des Collectivités Territoriales.

Il s’y ajoute que, vers la fin de cette même année 2012, mon prédécesseur au poste du Médiateur de la République a dû interrompre ses fonctions pour aller exercer de nouvelles responsabilités au sein du Pouvoir Exécutif de l’époque.

La fonction du Médiateur de la République est ainsi restée sans titulaire jusqu’à la fin du troisième trimestre de l’année 2013. C’est dire, Monsieur le Président, que les Services du Médiateur de la République ont connu, pendant ce temps, une situation administrative singulière qui n’a pris fin qu’avec la nomination, par vous-même, d’un nouveau Médiateur en octobre 2013.

Ce sont donc ces circonstances exceptionnelles qui nous conduisent, aujourd’hui, à présenter de façon concomitante les rapports d’activités de 2012 et de 2013.

Au cours de ces deux années qui ont été une période de grandes perturbations pour notre pays, il n’est pas surprenant que le Médiateur de la République ait enregistré une baisse notable de ses activités en matière de réclamations. Ainsi, seulement 172 dossiers au titre de 2012 et 175 au titre de 2013 ont été traités, soit au total 347 contre 548 pour le biennium précédent : 2010 – 2011.

La répartition géographique de ces réclamations montre que plus de 80 % émanent du District de Bamako et de la Région de Kayes. Les saisines par le seul District de Bamako, représentent plus de 70/% aussi bien en 2012 qu’en 2013. Ce déséquilibre souligne fortement la nécessité d’une présence plus active des services du Médiateur de la République dans les autres régions du pays.

Comme par le passé, les réclamations ont majoritairement porté sur les affaires foncières.

Monsieur le Président, si le Médiateur de la République est un recours pour le Citoyen, il est aussi un Conseil pour l’Administration. C’est pourquoi, avec votre permission, je voudrais ici souligner, à l’intention des pouvoirs publics, le fait que les litiges en matière foncière ne cessent de gagner en ampleur et en gravité, créant des situations potentiellement dangereuses pour la paix sociale et les rapports de bon voisinage entre les citoyens.

L’impatience et la colère de certains acteurs sociaux, œuvrant dans ce domaine, ne sont pas à l’abri de manipulations psychologiques, peut être malintentionnées, qui les conduisent quelquefois, à des manifestations publiques intempestives.

A cet égard on a pu observer récemment, ici à Bamako, quelques mouvements revendicatifs, à caractère social, interpelant le pouvoir public sur la gestion du foncier. Même si l’expression de ces interpellations apparaît outrancièrement accusatoire, et donc inacceptable, il reste que les dénonciations des situations vécues, individuellement ou en groupe, par des personnes s’estimant lésées dans leurs droits légitimes, peuvent être recevables et mériter un traitement conséquent. En matière foncière comme en d’autres domaines, il importe de conforter l’Etat de droit démocratique par un dialogue certes ferme, mais soucieux de justice et d’équité. D’autant que, ici, la problématique est multiple et complexe. En effet il n’y a pas que la question de la sécurisation des titres fonciers qui conduit à des litiges entre des Citoyens et l’Administration publique.

Il y a aussi et surtout toutes les spéculations illicites autour d’une législation domaniale dont le contrôle relève principalement du Ministère chargé des affaires foncières mais implique aussi les Ministères chargés de la Justice et des Droits de l’Homme ; de l’Intérieur et de la Sécurité ; de la Décentralisation ; du Développement rural ; de l’Urbanisme et de l’Habitat.

Les autorités publiques en charge de ce domaine déploient, certes, des efforts louables pour y apporter un peu plus de régulation. Mais l’état des lieux se caractérise de plus en plus par un enchevêtrement inextricable d’intérêts privés et publics. Et le danger est réel de voir se développer, ici, ce qui risque de devenir, sur le plan social, une véritable « bombe à retardement » avec effet de fragmentation.

En effet, face à la multitude des initiatives anarchiques, souvent mal avisées ou mal intentionnées, émanant tant d’associations civiles que d’autorités communales et de certains services étatiques, les mécanismes de contrôle et de régulation actuels, suffisent-ils pour enrayer un phénomène qui, par ailleurs, se nourrit de toutes les formes de corruption ? Le cas échéant ne pourrait-on pas confier à une véritable « brigade foncière » une mission spéciale d’assainissement sur le terrain et sur toute l’étendue du territoire national, tant la situation qui prévaut me paraît nécessiter des mesures de rectification vigoureuses et urgentes.

Monsieur le Président,

En plus des activités traditionnelles du Médiateur de la République, en matière de règlement de litiges, il y a lieu de signaler l’organisation de deux sessions de l’Espace d’Interpellation Démocratique à Bamako. En effet depuis l’adoption du Décret N°11 du 24 Février 2012, c’est le Médiateur de la République qui a la charge de l’EID. Ce Forum se veut à la fois un marqueur de l’Etat de droit et un exercice pédagogique pour la démocratie malienne. Par ailleurs, cet espace d’interpellation peut fonctionner comme un « amortisseur social » dans la mesure où il contribue à évacuer des frustrations créées par l’abus d’autorité, l’iniquité et les dysfonctionnements dans les services publics. En 2012, la 17è Session de l’EID avait enregistré 110 interpellations du gouvernement, en 2013 la 18è Session en a enregistré 177. Il y a là le signe d’un intérêt croissant des Citoyens pour l’exercice pratique de leurs droits et libertés.

Les recommandations issues de ces deux sessions, notamment celles formulées par le Jury d’Honneur, d’une part, et d’autre part, les leçons tirées de la préparation, du déroulement et du suivi de cette importante activité, m’ont amené à mettre en œuvre de nouvelles mesures visant à rendre l’EID plus visible, plus efficace et moins onéreux. C’est tout le sens de la création, récemment, d’un Secrétariat Permanent de l’EID au sein des Services du Médiateur de la République.

Monsieur le Président de la République,

Aujourd’hui les services publics de l’Etat républicain se réinstallent progressivement dans les régions du Nord. Cette reprise s’inscrit dans un mouvement plus général de restauration de l’autorité de l’Etat de droit sur toute l’étendue de la République du Mali. Il s’agit d’un mouvement de normalisation qui doit concourir à consolider le processus de paix et de réconciliation nationales. Pour ce qui les concerne, les services du Médiateur de la République comptent bien y participer activement.

A cette fin, plutôt que de reprendre le schéma traditionnel d’un Délégué par région, se consacrant essentiellement à l’accueil et à l’information des usagers, nous avons opté pour celui d’une Délégation régionale prenant en charge, non seulement le traitement des réclamations à caractère local, mais aussi les activités découlant de l’instauration de l’Espace d’Interpellation Démocratique.

Chaque délégation sera ainsi animée par une petite équipe de trois agents dont les actions couvriront l’ensemble des cercles de la Région et non plus seulement la capitale régionale. C’est de cette manière que les Services du Médiateur de la République seront mieux à même d’accompagner la politique de décentralisation renforcée adoptée par le Gouvernement et dont la mise en œuvre ne manquera pas de conduire à une multiplication des interactions entre les Citoyens et les Administrations publiques locales.

Sur ces mots, Monsieur le Président de la République, je vous prie de recevoir les rapports annuels du Médiateur de la République pour 2012 et 2013.

Je vous remercie !

Source: Présidence

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