Assa Traoré, la soixantaine et mère de sept enfants, habite Béma, une commune rurale située à 75 km de Diéma, en allant vers Nioro du Sahel. Elle a quitté les bancs de l’école très tôt et sait à peine lire et écrire. Cela ne l’empêche pas d’être active dans la promotion féminine. Avec plusieurs casquettes, notre battante dirige l’Association de santé communautaire (ASACO) et préside l’Association « Benkady » des femmes qui compte quatre-vingt membres. Présidente aussi du Comité de gestion scolaire (CGS), cette dame, très connue dans la contrée, se distingue par son courage et son leadership. Ce qui lui vaut le sobriquet de « Dame de fer ».
Elle a réussi à sortir l’ASACO de la quasi paralysie de ses activités. C’est avec beaucoup de modestie qu’elle parle de ce succès. « A un moment donné, le CSCOM de Béma était confronté à un problème de sous fréquentation. Rien ne marchait. Dès lors, on a entrepris des missions de sensibilisation dans les vingt-quatre villages de l’aire de santé du CSCOM. Nous disposons d’un véhicule pour nos déplacements. S’il n’y a pas de place dans le véhicule, je n’hésite pas à monter sur une moto. A mon âge, on me l’a déconseillé. Souvent s’il manque de l’argent dans la caisse de l’ASCO, moi-même, je prends en charge les frais de carburant », raconte celle qui a ainsi réussi à faire comprendre aux populations la nécessité d’amener les malades au CSCOM, de faire les consultations prénatales, de vacciner les enfants.
La dynamique Assa Traoré mobilise aussi les femmes de l’Association « Benkady » pour le maraîchage sur une parcelle de deux hectares, octroyée et clôturée par l’ex-Opération de développement intégré du Kaarta (ODIK). Dans ce champ collectif, les femmes font pousser la tomate, la salade, le chou et la carotte. « Nous vendons ces produits et les recettes permettent de soutenir nos maris dans les dépenses familiales », indique Mme Assa Traoré. L’association anime aussi un volet « assainissement ». Tous les lundis et jeudis, ses membres balaient le marché de Béma et ramassent les ordures à travers le village. Elles utilisent leur propre matériel, charrettes, brouettes et se font aider par leurs enfants.
La « Dame de fer » pousse aussi pour la scolarisation des enfants, surtout celle des filles. « Si un maître me signale l’absence d’un élève, je vais voir personnellement les parents pour leur demander ce qui ne va pas. Je ne conçois jamais qu’on fasse sortir une fille de l’école pour la marier. Récemment, quand j’ai appris que des filles ont été fiancées, j’ai saisi leurs parents pour qu’elles puissent poursuivre leurs études. Un père avait manifesté son désaccord. Mais il a fini par céder. Il m’a même donné raison », se félicite Assa Traoré.
Elle estime qu’il est temps que les femmes accèdent à des postes de responsabilité. « J’ai approché des partis politiques afin que les noms des femmes figurent en bonne position sur les listes de candidature aux prochaines élections régionales et communales. Nous les femmes, nous sommes restées longtemps dans l’ombre», souligne-t-elle, avant d’ajouter que son association cherche un financement pour organiser une formation pour le renforcement des capacités des femmes sur le processus électoral.
O. BAH
AMAP-Diéma
source : L Essor