« Au niveau des préparatifs, il y a eu un accord pour réviser la loi électorale en vigueur, ce qui a débouché sur un projet de loi consensuel qui est présentement au niveau de l’Assemblée nationale. Une commande pour produire 8 millions de cartes d’électeurs est en cours.
Conformément à son mandat, la MINUSMA a commencé à apporter son appui technique et logistique, où elle est déployée et dans la mesure des ressources disponibles, notamment en transportant le matériel électoral et en déployant des agents électoraux. De même, elle a commencé à se mobiliser pour la sécurisation du scrutin et pour la gestion du contentieux électoral.
Cependant, compte tenu du chronogramme assez serré, des inquiétudes et des préoccupations persistent, entre autres, savoir si les 8 millions de cartes d’électeurs peuvent être disponibles et distribuées à temps et, comment faire pour que l’audit du fichier électoral ait lieu à temps et renforce la confiance.
Votre Conseil se doit d’appeler la classe politique malienne au respect du calendrier adopté mais aussi l’encourager à aller vers des élections consensuelles, apaisées et surtout crédibles. Le contraire, serait ajouter une crise à la crise et c’est le camp des ennemis de la paix qui en sortira vainqueur. Il ne mérite pas un tel cadeau ».
Voilà un extrait de la déclaration faite le 11 avril dernier, devant le Conseil de Sécurité des Nations-Unies par Mahamat Saleh Annadif, représentant spécial du Secrétaire général pour le Mali, chef de la Mimusma.
Au cours de la même réunion, le ministre des affaires étrangères et de la coopération internationale, Tiéman Hubert Coulibaly, a fait part de la volonté du gouvernement d’organiser le scrutin sans pour autant oublier de souligner le délai imparti pour l’organisation de l’élection présidentielle.
Les inquiétudes et préoccupations soulevées par le patron de la mission onusienne sont largement partagées par les différents protagonistes engagés dans le processus électoral. Celles-ci sont même perceptibles dans la précampagne qui n’est pas très animée contrairement aux autres années.
A trois mois 13 jours du 1er tour de l’élection présidentielle, certains acteurs politiques estiment que l’organisation d’un tel scrutin n’est pas une priorité pour le Mali à l’état actuel des choses. Dr Ousmane Sy, Seydou Bandian Kouyaté et Me Mamadou Ismaïla Konaté ont été rejoints dans cette conviction par Dr Choguel Kokalla Maïga, Président du Mouvement Patriotique pour le Renouveau (MPR). Le Président de la Solidarité Africaine pour le Développement et l’intégration (SADI), Dr Oumar Mariko, pense qu’il n’est pas possible de tenir le scrutin à la date du 29 juillet 2018. Dans une interview accordée au site « Sahélien.com », le Secrétaire général du Mouvement national pour la libération de l’Azawad (MNLA) a déclaré sans ambiguïté : « Un retard dans la mise en œuvre de l’Accord peut compromettre l’organisation de la présidentielle et entacher sa crédibilité».
Le gouvernement dispose-t-il du temps nécessaire pour confectionner de nouvelles cartes d’électeurs et les acheminer vers les citoyens ? Pourquoi donc engloutir des milliards dans un marché de confection de cartes si on n’est pas sûr de les réceptionner à temps pour le scrutin du 29 juillet 2018 ? Le gouvernement peut-il garantir la tenue du scrutin sur l’ensemble du territoire national ? La situation sécuritaire (le 14 avril dernier, le camp de la Minusma à Tombouctou avait l’objet d’une attaque complexe menée par des groupes terroristes) permet-elle l’organisation d’une élection libre, transparente et crédible ? Quelles dispositions adopter pour contrer les bourrages d’urnes dans les zones désertées par les services de l’Etat ? Faut-il exclure toutes les localités où l’administration est absente ? Le Mali court-il un risque de crise postélectorale ? Dans une situation sécuritaire tendue, les institutions peuvent-elles tenir si les résultats d’une telle élection sont contestés ?
Chiaka Doumbia
Source: Le Challenger