Maître Mamadou Gakou raccroche sa toge d’avocat à jamais. Émérite homme de droit, ayant fait la fierté du barreau malien pendant près de quatre décennies, Me Gakou a tiré sa révérence, dimanche 26 mai 2022, des suites d’un accident vasco-cérébral (AVC) qui l’avait fait hospitaliser, pendant deux jours, au CHU Gabriel Touré. Le »Maître » du prétoire et féru de la plume repose désormais dans sa dernière demeure, à Banamba, sa ville natale.
Hier, lundi, jour de son enterrement, un hommage mérité lui a été rendu par ses collègues du barreau et de la grande famille judiciaire du Mali, à son domicile, à Bamako, avant que le corps ne soit remis à la famille pour la suite du cérémonial, à Banamba. Dans l’oraison funèbre, le bâtonnier de l’Ordre des avocats du Mali, Me Moustapha Cissé a décrit un homme pétri de valeurs et d’une densité intellectuelle remarquable.
» Estimé confrère, cher ainé, tu pars bien trop tôt. Ton immense savoir, ton immense talent de plaideur hors pair, le latin du Barreau et l’orfèvre de la plume, tes confrères ont inondé le forum de qualificatifs dignes des grands esprits de ce monde […] Tu laisses un immense vide derrière toi, mon cher confrère « , a déclaré Me Cissé, tout en présentant les condoléances du Barreau malien à la famille du défunt.
Des témoignages ont également souligné le riche parcours de Maître Mamadou Gakou, qui fut un brillant avocat, enseignant et homme politique. Il a été l’un des pères fondateurs de la jeune démocratie malienne.
Après son baccalauréat en Philo-Lettres (Lettres classiques), au Lycée Askia Mohamed, en 1973, il s’envola pour la France où il va cumuler des diplômes dans de prestigieuses universités. D’abord, une Licence en Droit privé, à l’Université de Besançon, puis une maîtrise à l’Université de Grenoble. Il fait plus tard un DEA (Diplôme d’Etudes Approfondies) et un Doctorat en Droit privé, à l’Université Jean Moulin de Lyon, avant d’obtenir un Certificat d’Aptitude à la profession d’avocat. Me Gakou est aussi diplômé de l’Institut Politique de Grenoble, Section Economie et Finance et titulaire d’un Diplôme d’études générale en Commerce et Marketing.
Fort de ce background, et après deux ans de stage au cabinet de Me Jacques Vergès, il retourne au bercail et devient, plus tard, enseignant à l’Ecole Nationale d’Administration (ENA), en 1984. Maître Gakou fut un enseignant émérite, professeur de Droit, qui a pétri de ses mains d’orfèvre plusieurs générations d’étudiants en Droit.
Ecrivain, romancier du droit, critique littéraire, chroniqueur et éditorialiste, il faisait jaillir la lumière de ses analyses dans les colonnes du journal L’Indépendant et fut un défenseur inconditionnel des Droits de l’homme et de la Liberté d’expression.
Maître Kassoum Tapo, l’un des compagnons de longue date de l’illustre disparu, a indiqué qu’il était d’abord un ami pour lui. » Il fut un compagnon et véritablement un des plus grands du Barreau malien. C’est une très grande voix qui s’éteint. C’était un homme de talent, de grande culture et un grand humaniste. C’est un jour triste pour le Barreau malien « , a-t-il témoigné. Et Maitre Boubacar Soumaré de renchérir » Je retiens de lui un grand intellectuel, un avocat modeste, une référence tant au Mali qu’en Afrique et dans le reste du monde ».
Maitre Mamadou Gakou fut également un homme politique, président de la COPP (Convention Parti du Peuple), il a été député de Banamba à l’Assemblée nationale, en août 1997. Il fut également 4è Vice Président de l’Assemblée nationale du Mali, membre de la Commission Loi, rapporteur général du nouveau Code pénal et du nouveau Code de procédure pénale. Membre de la Commission de Défense nationale et de la Sécurité et Rapporteur Spécial sur la Haute Cour de Justice.
Boubacar Sidiki Diarra, représentant du ministre en charge de la Justice, a salué la mémoire du défunt. » Maître Mamadou Gakou a été un brillant et célèbre avocat, qui a porté haut le flambeau. Nous l’avions connu en tant que grand frère. Il nous a beaucoup inspiré. C’est une grande perte pour la nation « , a-t-il témoigné.
Père de cinq enfants, Mohamed Lamine Gakou, seul garçon de la fratrie, retient de Me Gakou, » un père aimant et bienveillant à l’égard de ses enfants et de son épouse. Il restera à jamais une étoile pour la famille « , a-t-il témoigné, sous le choc.
Moussa Bilaly Sidibé
Source: L’Indépendant