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Débat sur la corruption : «Dès que la famille gère un pouvoir, nous sommes dans un réseau de corruption» Pr Abdoulaye Niang

«Même l’avion présidentiel français n’a jamais fait l’objet de marché public»  Blaise Sangaré, Porte-Parole d’IBK

Professeur Abdoulaye Niang

Samedi  12 décembre dernier,  l’affaire de surfacturation des équipements militaires et achat de l’avion présidentiel du Mali était  au cœur des débats du 7ème numéro de l’émission radiophonique « Forum de la presse ». Cette émission qui passe sur les ondes du Renouveau FM, recevait le Pr Abdoulaye Niang économiste, chercheur et directeur du centre « Sènè ». Pr Niang avait en face de lui le conseiller-porte-parole du Président IBK, M. Blaise Sangaré. L’émission avait pour thème principal : «Comment lutter contre la corruption  au Mali et quel est son impact sur l’économie nationale ? »

Tout est parti de la question du modérateur du débat : y a-t-il un acte derrière les grands discours d’IBK sur la corruption ? Ce dernier, faut-il le rappeler, avait décrété 2014 l’année de lutte contre la corruption et c’est  pendant la même période que le Mali a connu les plus  gros scandales financiers de son histoire à travers l’affaire de surfacturation des équipements militaires et de l’achat de l’avion présidentiel du Mali. A quand les sanctions judicaires  contre ces personnes citées dans les rapports?

Pour réponse,  le porte-parole du président indiquera: «Nous sommes en 2015, en fonction de certaines déclarations que le président a eu à faire et en tant que porte-parole, Je considérais que le débat sur ces questions au niveau national était clos, seulement le devoir de rendre compte est permanent ». Pour M. Blaise Sangaré, ceux qui ont fait ces rapports à savoir le bureau du VEGAL, la cour suprême et autres,  auraient dû aussi faire le distinguo entre la régularité de ces opérations et leurs moralités. A ses dires, c’est au degré de moralité que la corruption est vénalement et pénalement attribuable à quelqu’un.

Se voulant être plus convaincant,  le porte-parole d’IBK  avance : « Ceux qui ont dit par exemple que ces dépenses n’auraient pas dû être faites et qu’elles l’auraient dû être en fonction de quelques procédures définies par leurs impressions ou par les connaissances simples de la gestion des finances publiques du Mali, devaient se référer  à des textes internationaux auxquels nous avons souscrit. La  directive N°4 de l’UEMOA, article 9, indique que  les pays membres de l’UEMOA n’ont pas besoin de ces procédures là (marché public NDLR) quand il s’agit  de dépenses de souveraineté, militaire, de sécurité ou de discrétion».

Sur la question, M. Blaise Sangaré exhorte les uns et les autres à faire  la différence à savoir si l’opération était régulièrement montée ou moralement sale parce que, dit-il,  l’hygiène morale est  plus importante dans cette affaire de surfacturation.  Par ailleurs, M. Sangaré pense que « ce que nous avons vécu en République du Mali était plutôt des colportages politiciens plutôt que des opérations techniques à décrier ».

Faut-il remettre en cause  tous les  rapports sur la question ? Pas de réponse concrète de la part de M. Sangaré. Seulement, souligne-t-il, la présentation d’une opération, les commentaires sulfureux à faire autour de cette opération sont plus préjudiciables que des enquêtes de régularité administrative ou financière autour de l’opération :« L’entâchement de la moralité a été plus grand autour de ces dossiers que les contrôles de régularité qui ont été  effectués. Parce qu’il s’agissait de dire  ni plus ni moins à l’époque, que le président de la République était partie-prenante d’opérations sales.  Et cela venait plutôt d’appréciations ou de dépréciations politiques Distinguons d’abord la moralité de la régularité », argue-t-il

 « Dire que c’est une affaire de politiciens, donc de discrédit sur le président de la République et tout…, peut-on aussi dire alors que François Hollande fait partie de ces politiciens qui jettent le discrédit sur le Président de la République IBK ?  «Je dis non », s’insurge le Pr Abdoulaye Niang qui ne se réclame d’aucune  entité politique. Pr Niang fait allusion au rapport sur Michel Tomi  qui, dit-il, est clair sur la partie du marché et de l’achat des équipements militaires.

Au Pr Niang de poursuivre : « Ne nous mettons toujours pas dans la bataille politicienne. Il faut qu’on soit réaliste et il faut qu’on soit honnête vis-à-vis de la population. Le président IBK est venu dans le cadre de l’Afrique et le printemps arabe dont je suis l’auteur d’un rapport spécial  au niveau  de l’université nationale des défenses américaines. C’était une opportunité pour une nouvelle ère d’espoir démocratique ; parce qu’au niveau de la Tunisie c’était la famille de la femme (Première dame) qui gérait tout et qui était dans toute sorte de réseau de corruption. On avait espéré  en tant que citoyen en choisissant IBK en novembre 2011 pour qu’il soit président de la République enfin que le printemps qui va sortir de la Libye pour le Mali, soit une nouvelle ère d’espoir démocratique. C’est-à-dire en principe de leadership schématisé et partagé, non pas un président qui va encore remettre la gestion du pouvoir  à la famille. Dès que la famille gère un pouvoir, nous sommes dans un réseau de corruption. Ici (au Mali) la femme (Première dame)  a son enfant député, la petite sœur de la femme a son mari ministre, la petite sœur de la femme a son enfant ministre, le frère (de la femme) est dans un bureau de placement. Ça ne peut être qu’est réseau de corruption, il faut qu’on le reconnaisse et faire tout pour être honnête envers le citoyen  enfin que le Mali ne rechute pas, parce que si le Mali rechute cette fois-ci, nous allons avoir le même scénario  que la Libye, la Tunisie ou l’Egypte ».

 « Immensément profond », c’est la lecture que fait le porte-parole du président des propos du Pr Abdoulaye Niang. Pour lui, le régime actuel est  en pleine construction de la démocratie et le frère jumeaux de la démocratie, dit-il, est l’Etat de droit : «  Si nous dissocions les deux, poursuit-il, nous ne ferons rien de bon. Il y a deux façons de lire un rapport. La 1ère façon est la moralité du rapport et la 2ème façon est la régularité. L’exercice de la lutte contre la corruption a deux facettes, il y a ce qu’on appelle les artifices du régime  fanfaron qui peuvent prendre 4 à 5 personnes par mois, les mettre en prison ; C’est un peu donner à manger à ceux qui veulent voir des têtes tomber. Mais il y a ceux quis veulent l’Etat de droit  après déjà le 26 mars ».

De l’avis de M Sangaré, on ne peut pas vouloir établir la démocratie sans l’Etat de droit : « Faisons d’abord la distinction, parce que si nous glissons sur l’autre aspect de la présence  des membres de la famille, on n’aura même pas bien répondu à la distinction à faire entre la moralité et la régularité de ces rapports, c’est fondamental », a-t-il dit aussi.

En ce qui concerne l’implication du président français, le porte-parole d’IBK précisera que  François Hollande a des intérêts d’Etat : « Il savait qu’en un  moment donné il devait quelque moyen de pression contre le président malien », a-t-il dit avant de poursuivre : «Eux, ils ont une autre mesure de l’opinion nationale que nous. Ils font très attention à leur opinion nationale, leurs industries de sondage sont plus prospères que certaines industries françaises, parce que c’est selon l’opinion qu’ils prennent des décisions, et le crédit qu’ils donnent au pool de leur opinion est le même qu’ils donnent ici. France-Inter (journal) comme on le dit, c’est la voix de la subversion, quand on fait passer ces genres d’informations on met en éveil  la sensibilité populaire du Mali parce que nous savons que nous sommes dans un pays pauvre et que nous devons  faire attention. Tout ce qui n’est pas parvenu dans le panier de  la ménagère ne  doit pas être vu dans la poche du fonctionnaire. Nous devons tenir compte de cet équilibre, il n’y a pas de hasard qu’on diffuse souvent ces genres d’informations. Parce que l’avion présidentiel français qui appartient à l’armée française n’a jamais fait l’objet de marché public : ce sont des choses qui échappent au contrôle de la régularité, aux services du contrôlefinancier  du Mali. Je n’ai jamais vu un marché public de 1960 à nos jours portant sur la fourniture des  matériels militaires, qui ferait l’objet d’un appel d’offres ».

Pr Niang ne voit pas  les choses de cet œil avec  lequel  le porte-parole d’IBK observe  les faits. Pour lui, c’est un manque de respect à l’égard du citoyen malien, voire une prime à l’impunité étant  donné qu’aucune des personnes citées dans les rapports n’a encore fait l’objet de poursuite judicaire : « C’est une manière aussi de préserver les intérêts de la famille. Il y a une pression au niveau de la famille, c’est cette pression qui est la plus dure », a-t-il dit.

Pour sa part, le porte-parole d’IBK appelle les uns et les autres à jouer un rôle de recul en ce qui concerne l’implication de la famille. A bien l’entendre, toute la famille n’est pas aux affaires : «  J’ai un fils qui a moins de 70. 000 FCFA comme salaire par mois, il est assistant notaire dans un cabinet. Je lui ai dit « mon fils tu ne seras pas fonctionnaire, débrouilles-toi  le Mali est à reconstruire ;  tu pourras ouvrir ton propre cabinet dans 5 à 6 ans. Ses sœurs sont dans la même situation », a –t-il déclaré.

Bientôt un office central de lutte contre l’enrichissement illicite

L’annonce a été faite  par le port- parole d’IBK sur le plateau de ce 7ème numéro de l’émission. Un office central de lutte contre l’enrichissement illicite sera bientôt installé. Il a un lien avec loi contre l’enrichissement illicite votée en 2014. Cet office va trancher avec  les autres  structures concernées par la lutte contre  la corruption. Toutefois, M Blaise Sangaré n’a donné aucun délai pour l’installation de cet office.

Djibi Karim

 

Source:  La Sentinelle

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