Les réponses militaires apportées à la crise au Sahel ont jusqu’ici montré leurs limites. Pour ainsi pallier cette situation, les populations sahéliennes recommandent un dialogue communautaire incluant ceux qui étaient jusque-là bannis de ce dialogue à cause de l’opposition de la France. C’est ce qui ressort d’une étude de la Friedrich Ebert Stiftung (FES) intitulée «Du tout sécuritaire au dialogue diplomatique : faut-il envisager une stabilité négociée au Sahel ?». Celle-ci a été présentée le 24 février 2022 à l’hôtel de l’Amitié de Bamako.
Les réponses militaires apportées à la crise sécuritaire au Sahel depuis 2012 ont montré leur limite, en occasionnant notamment la recrudescence de l’insécurité dans les pays membres dont le Mali, Niger et le Burkina Faso. Pour ainsi pallier cette difficulté, les populations sahéliennes réclament un dialogue communautaire incluant les acteurs méprisés. Cette exigence des personnes meurtries par l’insécurité et ses nombreuses conséquences a été révélée par une étude de la Friedrich Ebert Stiftung (FES) intitulée «Du tout sécuritaire au dialogue diplomatique : faut-il envisager une stabilité négociée au Sahel» ?
«Face à l’insuffisance des réponses apportées jusqu’ici sur le plan militaire, il y a un intérêt croissant des populations pour le dialogue dans les réponses envisagées à l’insécurité», a indiqué le rapport. Outre la dégradation continue de la situation sécuritaire, cet intérêt des populations à dialoguer s’explique aussi par le caractère de plus en plus endogène de la menace, car les combattant de ces groupes autrefois originaires des pays voisins comme l’Algérie et la Mauritanie, sont maintenant issus des populations locales.
Et pour multiplier les chances de réduire la violence et les frustrations qui se construisent chaque jour, ce dialogue doit prendre en compte les groupes qualifiés de terroristes. Cette démarche (le dialogue) ne saurait en elle seule résoudre le problème. Elle doit être menée en parallèle d’autres actions comme la réponse militaire ou encore des actions de développement.
Outre le dialogue inclusif, cette étude menée par le chercheur Baba Dakono entre juin et août 2021 au Mali, au Niger et au Burkina Faso recommande également d’amorcer un véritable changement de paradigme dans la lutte contre le terrorisme. Il est ainsi souhaité d’engager des solutions de paix en adéquation avec le contexte historique des pays, y compris au niveau du modèle de gouvernance, d’adapter les stratégies militaires aux réalités du terrain ; de renforcer la compréhension des forces armées sur les dynamiques locales ; de refonder la politique régionale paix et de sécurité….
Ce dialogue réclamé par les populations sahéliennes a été recommandé par les Maliens, notamment lors du Dialogue national inclusif (DNI) tenu en 2019. Les participants à ces assises ont clairement affiché la nécessité de négocier avec Iyad Ag Ghali et Amadou Koufa, les deux leaders des groupes terroristes qui semaient la terreur sur le territoire national. C’est dire donc que ce rapport de la FES réalisé dans deux autres pays du Sahel (Niger, Burkina Faso) en plus du Mali vient juste compléter une revendication des populations exprimée depuis plusieurs années.
Outre les responsables de la Friedrich Ebert Stiftung, dont le Représentant résident Christian Klatt, cette présentation de l’étude a enregistré la présence du ministre malien de l’Administration Territoriale et de la Décentralisation, le Colonel Abdoulaye Maïga. Ayant pris bonne note des problématiques et des pistes de sortie de crise évoquées dans ce document, il a promis que la solution sera soumise à la réflexion. Mais, s’est interrogé le Général Maïga, «quelle est la sincérité (à dialoguer) d’un combattant qui gagne 5 fois plus dans la criminalité que dans le formel» ?
A l’initiative de la Fédération des organisations de résistance civile de Gao (FORCG) la FES a procédé dans l’après-midi de ce même jeudi 24 février à la projection d’un film retraçant la bravoure de la jeunesse de Gao qui a vaillamment résisté aux groupes armés qui venaient d’occuper la Cité des Askia en 2012.
Oumar Alpha
Source : Le Matin