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Crise au Mali: la visite de la délégation russe à Bamako.

Jour pour jour, cela fait déjà quatre bonnes ou mauvaises années que la crise perdure au nord du Mali. Menacé même de partition, jamais dans sa nouvelle histoire le pays  n’a tant  été meurtri dans son âme. Les violences, les victimes innocentes, les soldats régulièrement tués dans des embuscades, les attaques terroristes au coeur de la capitale…Malgré une forte présence de forces militaires étrangères au nord dans la zone du conflit, la fin ne se dessine pas, l’exaspération est devenue profonde…

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L’initiative est venue soudain  de la ville de Ségou. Las de voir les attaques se multiplier principalement dans les trois régions du Mali et parfois au centre ou au sud, reconfortés, à coup sûr, par les succès militaires du Président syrien  Bachar Assad  soutenu  par Moscou dans sa guerre contre « l’opposition modérée » et contre les terroristes du DAECH,  des Maliens ont lancé une pétition qui a collecté, en un laps de temps, deux millions de signatures  en vue d’une intervention militaire des Russes dans la crise malienne. Le chiffre est trop gros pour  être négligé. La réponse n’a pas tardé. Mercredi, 12 octobre 2016, une importante délégation  avec à sa tête Mikhaïl Bogdanov, vice-ministre russe des affaires étrangères, est arrivée à Bamako pour des pourparlers de 48 heures. Dialogue, coopération militaire, économique et culturelle sont au menu sur table. Son homologue malien, Abdoulaye Diop, semble faire de son mieux.  Il avait effectué une visite à Moscou à la demande de la Présidence de la République.

Restons  réalistes. Quand il s’agit de nos Etats africains, à la place d’une coopération franche et ouverte, respectueuse et bénéfique,  l’aide étrangère est toujours placée au centre des échanges, comme opium ou appât. Des Africains si habitués à cet état de fait croient que l’envol de nos pays s’opérera ainsi. Rien de tel. L’aide la plus noble ne viendra que de nous-mêmes car la main qui donne est toujours au dessus de celle qui reçoit. Au regard des actes intérieurs et extérieurs posés qui ne vont pas dans nos intérêts depuis plus de 50 ans, nos Etats sont restés extrêmement fragiles. Plus encore, beaucoup d’entre eux sont à terre. Pour se relever, on cherche donc un point d’appui, d’où l’espoir qu’une main tendue nous aidera à nous remettre sur pied.  Même si cela est faisable et acceptable, nous nous devons de savoir  toujours  qu’il y a deux  façons: l’aide désintéressée n’existe pas, elle rapporte gros à celui qui l’accorde. Il y a aussi celle qui, outre le profit à gagner, empoisonne définitivement et détruit l’homme.

Par implication des Russes dans la résolution de la crise malienne, on ne doit pas souhaiter  une intervention militaire proprement dite, car cela signifierait que la situation a trop débordé et qu’elle a pris des proportions très menacantes.

Le plus important dans une coopération avec Moscou à l’état actuel des choses reste le domaine militaire. Il faut mettre l’accent surtout sur la livraison d’armes et l’équipement, sans larmes, de nos forces armées en matériels nécessaires qui puissent leur permettre de défendre efficacement le pays et de réduire considérablement le nombre de soldats maliens qui sont tués chaque jour sous la barbe des forces onusiennes.  En ces deux derniers mois, 53 soldats maliens ont trouvé la mort malgré la présence de 11.000 “sexes bleus” (pardon, casques bleus) et de Barkhane!

Combien de vies de nos soldats allons-nous sacrifier encore? Combien de civils encore ? Combien de biens de l’Etat saccagés encore ? 

Est nécessaire aussi l’organisation d’un système de renseignement militaire efficace qui aide nos forces armées sur le terrain, de façon à prendre des mesures préventives aux attaques lâches sous des regards approbateurs, d’anticiper les actions coordonnées contre les bandits armés qui bénéficient du soutien manifeste des forces occultes extérieures, sans oublier la table des négociations. On ne peut bien négocier  qu’ayant au moins une quelconque position de force. Il n’est pas intelligent de  négocier avec les mains vides, par exemple, face à une personne qui vous pointe des flèches et qui est soutenue par une tierce autre armée d’un fusil!

La Russie peut s’impliquer dans la formation de nos soldats à bien manier ces armes. Personne ne viendra nous défendre mieux que nous- memes. A défaut de pouvoir fabriquer des armes, hélas encore, nous pouvons et avons le devoir d’en acheter. Sur ce plan, Moscou ne lésine pas et ne pointe pas l’index menacant.

Les Russes ne sont ni parfaits ni des saints évidemment. Après tout, ce sont des hommes avec leurs calculs derrière la nuque. Mais la pratique et le pragmatisme démontrent qu’ils sont préférables cependant, en ce sens qu’ils ne vous bousculent pas, ne vous dictent pas des conditions, parfois humiliantes, que vous devez remplir malgré vous-memes. Ils ont le sens de la discussion d’égal à égal, et  vous écoutent. Face à eux, vous avez toujours l’option du choix ou du refus, sans que cela se transforme en colère folle ou en chantage. Ils défendent leurs intérets sans pour autant vouloir piétiner les vôtres, comme le cas se passe dans le dialogue avec l’Occident.

La visite de la délégation russe au Mali peut susciter des espoirs,  ne serait-ce que pour les armements qui ne  seront pas une aide, mais un achat-vente. Cependant, il est tôt de dire que cette rencontre à Bamako sera un succès. Tout ce qui sera discuté ou décidé pourra rester lettre morte comme d’habitude. Il suffit de quelques coups de fil de quelque part, voilà le dossier fermé presque à jamais par peur et par manque de courage politique.  On a dit : « La force a fait les premiers esclaves; leur lâcheté les a perpétrés.»

Les tergiversations de nos dirigeants ralentissent la résolution de beaucoup de crises dans nos pays, par nous- mêmes et en notre faveur. Notre erreur est que nous voulons résoudre nos problèmes avec ceux qui les créent, pensant qu’ils auront pitié de nous ou qu’ils nous comprendront. Cela ne se produira jamais.  Bien au contraire, ils en profitent pour en créer davantage, pour nous intimider constamment et nous affaiblir dans le but de maintenir la dépendance éternelle qui nous conduit à la vie végétative que nous vivons. Le coq qui joue avec des couteaux n’est pas à plaindre, il finira à juste raison dans la marmite des autres pour leur festin! Ceux qui veulent réellement nous aider hésitent à le faire parce qu’ils voient le manque de courage manifeste.

« Si la Chine se réveille, le monde tremblera ». J’ajoute que si l’Afrique se réveille , le monde sera bouleversé.

Sékou Kyassou Diallo.

Alma Ata, Kazakhstan.  

 

 

La rédaction

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