Le président du Mouvement Patriotique pour le Renouveau (MPR), Dr Choguel Kokalla Maiga, à travers une déclaration, a non seulement expliqué les raisons pour lesquelles son parti ne participera pas aux concertations régionales autour du projet de redécoupage administratif, mais a aussi évoqué les défis à relever pour le peuple malien.
Comme beaucoup d’autres partis politiques, le MPR donne sa position sur le projet de découpage administratif qui a suscité la désapprobation générale.
L’ancien ministre de l’Économie numérique et de la communication estime que le gouvernement n’organise ces concertations régionales que pour aplanir la désapprobation. Quant à la position de son parti sur ces concertations régionales, Choguel déclare : « Le MPR a choisi de ne pas y participer, pas par opposition de principe au régime, mais par fidélité à une ligne de conduite, celle qui consiste à ne s’associer à aucune action tendant à diviser notre pays ou à poser les fondements de sa partition future ». Il estime qu’elles ne feraient qu’en rajouter à toute une série de décisions non suivies d’effet tout en compromettant dangereusement l’intégrité territoriale, l’unité nationale et la cohésion sociale.
Les raisons de la non-participation du MPR aux concertations régionales
Aux dires de l’auteur du livre « Rebellions au Nord du Mali : des origines à nos jours », le MPR n’a pas choisi de boycotter les concertations par hasard. Plusieurs raisons expliquent sa position.
A en croire Dr Maïga, la première raison tient à la manière dont ces assises sont organisées. « Sur ce point, moins d’une organisation, il faudrait plutôt parler d’inorganisation », explique-t-il. En effet, aux dires du président du MPR, pour associer le peuple à une prise de décisions, le projet gouvernemental doit être préparé et présenté par des spécialistes du droit et des experts en différents domaines. Ces derniers, selon le MPR, statuent sur son opportunité, sa pertinence, sa viabilité et sa faisabilité. « Le résultat de leurs travaux sert à rédiger les termes de références et les documents de travail. L’ensemble est examiné à différents échelons de la prise de décision gouvernementale. Cela s’étend sur des mois », a-t-il expliqué. Or, pour ce projet de découpage territorial, ce travail en amont n’a pas été effectué.
Pour le président du MPR, la deuxième raison du boycott des concertations régionales par son parti est liée à la qualité des participants qui sont d’abord ceux qui auraient dû faire le travail en amont, les administrateurs et les spécialistes du droit, et, d’autre part, les représentants des partis politiques, les représentants d’associations et des notabilités dont la vocation réelle se situe ailleurs. Les participants sont donc mal choisis, selon le MPR.
Autre argument du refus du MPR de participer à ces concertations : les raisons évoquées par le gouvernement pour procéder à la réorganisation administrative envisagée ne sont que des prétextes. Choguel Kokalla Maiga et ses camarades estiment qu’en augmentant, particulièrement dans le Nord avec une discrimination flagrante en faveur de certaines communautés, le nombre de régions, le nombre de cercles, le nombre de communes, on augmente, systématiquement, le nombre de présidents, de conseils de régions, de présidents de conseils de cercles, de maires, de députés, de sénateurs, de conseillers… « Du coup, une tendance se trouve inversée, la tendance naturelle, avec la transformation d’une minorité sociologique en majorité politique », déplore-t-il avant d’ajouter : « Ainsi se trouvent posés les fondements d’une gestion de l’État sur des bases ethniques et discriminatoires ».
La dernière raison pour laquelle le parti de Dr Choguel Kokalla Maiga ne participera pas aux concertations régionales s’explique par le fait que lesdites concertations ne seraient que des actes inadéquats et inefficaces. L’ancien ministre d’IBK estime que créer de nouvelles régions, alors que certaines de celles créées depuis 2012 restent non opérationnelles, est une fuite en avant.
Les défis à relever
Si le gouvernement croit que le redécoupage territorial est une priorité pour le Mali, le MPR dit le contraire. Les priorités pour le peuple malien se situent ailleurs. Pour ce parti, il faut, entre autres : considérer que la Patrie est en danger et agir en conséquence en retenant que la rébellion n’est pas encore terminée, en plaçant donc la sécurisation des régions troublées au centre des préoccupations ; se donner des délais pour parvenir à cette sécurisation, respecter ces délais et tenir le peuple constamment informé des progrès accomplis dans ce sens ; recouvrer notre souveraineté nationale à laquelle, en signant le Pacte pour la paix, les autorités ont délibérément renoncé en reconnaissant, officiellement, par cet acte, la tutelle des Nations Unies ; restaurer l’autorité de l’État sur l’ensemble du territoire national en mettant fin en particulier à la situation qui prévaut à Kidal et qui fait de cette localité un État dans un Etat, en appliquant le DDR pour autoriser le redéploiement de l’Armée et de l’Administration dans les régions qui continuent d’échapper au contrôle du Gouvernement ; rétablir la confiance et le dialogue entre les décideurs politiques d’une part, entre ces mêmes décideurs et les populations d’autre part en faisant accepter, au terme d’un débat sincère, les conditions de tenue d’élections au terme desquelles chacun se reconnaîtra dans les résultats proclamés.
Ce n’est pas tout. Pour le MPR, le gouvernement doit repenser en profondeur la décentralisation afin de prévenir la partition du Mali si l’on sait que celle-ci est inscrite dans l’agenda des idéologues du séparatisme dont l’un des porte-parole les plus en vue, Bernard Lugan, n’a pas hésité à recommander, dans le numéro spécial de la revue L’Afrique réelle d’avril 2018 consacré à « l’impasse malienne » : « La sortie de crise doit donc se faire par une très large autonomie donnée aux trois Azawad » : « l’Azawad touareg, l’Azawad arabe, l’Azawad du fleuve », cette dernière entité étant présentée comme le domaine des « Songhaï, Peul, Touareg, Maures etc. ».
Boureima Guindo
Source: Le Pays