Après trois jours de débats intenses, de présentations et de riches contributions, les rideaux sont tombés, hier jeudi, sur les travaux du Colloque régional sur la radicalisation et l’extrémisme violent au Sahel, dont notre capitale a abrité, du 11 au 13 octobre 2016. Qualifié de succès éclatant par les organisateurs et les participants, la rencontre de Bamako a formulé plusieurs recommandations pertinentes dont la mise en œuvre par l’ensemble des acteurs permettra de lutter efficacement contre le phénomène.
Du 11 au 13 Octobre 2016, la Mission de l’Union africaine pour le Mali et le Sahel (MISAHEL), le GS Sahel, le Centre africain d’étude et de recherche sur le terrorisme (CAERT) et le ministère des Affaires étrangères, de la coopération Internationale et de l’intégration africaine du Mali ont organisé, à l’Hôtel El Farouk, un Colloque régional sur la radicalisation et l’extrémisme violent au Sahel.
La rencontre de Bamako, qui avait pour objectif de dégager les pistes pour l’élaboration d’une stratégie concertée et globale de lutte contre la radicalisation et l’extrémisme religieux violent dans les pays du Sahel, a vu la participation d’autorités politiques, d’experts, des représentants du culte, des jeunes, des femmes et des représentants des media de l’Algérie, du Burkina Faso, de la Cote d’Ivoire, de la Guinée, du Mali, de la Mauritanie, le Niger, du Nigeria, du Sénégal et du Tchad.
La rencontre a également enregistré la participation des équipes du Bureau du Représentant spécial du Secrétaire général des Nations Unies pour l’Afrique de l’Ouest et le Sahel (UNOWAS), de la Mission multidimensionnelle intégrée des Nations Unies pour la stabilisation au Mali (MINUSMA), du Bureau du Représentant spécial de l’Union européenne pour le Sahel, de la CEDEAO et de la Coopération
Suisse.
Les travaux, qui se sont déroulés en plénières et en groupes de travail, ont permis aux acteurs présents d’échanger sur les causes de l’extrémisme violent et de l’instrumentalisation des religions par les groupes terroristes et criminels.
Cette rencontre, qui marque le point de départ d’une série de colloques dans les pays du Sahel, a mis l’accent sur les risques d’amalgame et de généralisation pouvant contribuer à la stigmatisation religieuse qui favorise des actions de recrutement des groupes terroristes et affecte les bonnes relations intercommunautaires.
Voilà pourquoi les présentations, les contributions ou les interrogations qui ont jalonné ce colloque, ont montré que la radicalisation et l’extrémisme violent constituent une menace réelle, contre lesquels il faut agir, et agir vite.
A travers les exposés sur : « Jeunes djihadistes » au Mali guidés par la foi ou par la circonstance ; décryptage des phénomènes de radicalisation et de l’extrémisme violent dans le Sahel ; ou encore l’Observatoire sur le radicalisme religieux et les conflits en Afrique ; l’Islam contre le terrorisme CHARIA ou DJIAHAD définitions ; formes ; manifestations, les participants sont parvenus à la conclusion selon laquelle il s’agit d’une menace pour tous les pays du Sahel, même si ces derniers sont touchés à des degrés différents.
En tout cas, il a été clairement établi que la première catégorie est celle des pays, comme la Libye, le Mali ou le Nigéria, qui sont sérieusement affectés, voire même déstabilisés par ce phénomène, si bien que leurs préoccupations majeures deviennent une lutte physique à court terme.
La deuxième classification est celle des pays qui sont touchés, c’est-à-dire qui ont connu des incidents, mais où la prévention trouve encore sa place.
Enfin, la troisième catégorie est celle des pays qui sont sous menace, qui n’ont pas encore connu une violence consécutive aux actes terroristes, mais où la vigilance et la mobilisation de la population doivent être de mise.
Parmi les causes de la radicalisation et l’extrémisme violent, la rencontre de Bamako a touché du doigt plusieurs facteurs déclencheurs parmi lesquels : l’exploitation des difficultés économiques, les dangers qui pèsent sur les individus ou les communautés ou encore la manipulation du sentiment religieux ou des frustrations diverses liées aux situations d’injustice dans le pays, dans la région ou dans le monde.
Au cours de ce colloque, le débat a aussi montré que la réponse à la radicalisation et à l’extrémisme violent doit être multi dimensionnelle en passant par plusieurs canaux où les Etats, les chefs religieux, les acteurs de la société civile, les femmes, les jeunes, les hommes des médias ont un grand rôle à jouer. Car il est clair que l’absence, la faillite et le manque d’efficacité de ces derniers pour faire face à certains problèmes dans des zones données, favorisent la radicalisation et l’extrémisme violent.
C’est dans ce sens justement que le colloque a jeté les bases d’un partenariat constructif entre l’UA, le GS Sahel, les Etats de la région, les autorités religieuses ainsi que les représentants de la société civile et a adopté d’importantes recommandations dans le domaine de la prévention et de lutte contre la radicalisation et l’extrémisme violent.
Au nombre de ces recommandations, la rencontre de Bamako a mis l’accent sur la formation des communicateurs, par leur implication réelle dans les questions concernant la sécurité ; l’implication des femmes et les jeunes, qui en sont à la fois les acteurs et les victimes.
Convaincu que le combat contre la radicalisation et l’extrémisme violent sera une bataille de longue haleine et que la victoire passera par une meilleure organisation des Etats, par une maitrise et un contrôle des secteurs de la sécurité, de l’éducation et de la justice, bref par une meilleure mobilisation de la société, les participants ont recommandé le développement d’une stratégie de déconstruction du discours radical en mettant à contribution les imams, les repentis et les victimes. Sans compter la formation des jeunes sur les dangers de la cyber criminalité et de la mauvaise utilisation des réseaux sociaux.
A l’issue la rencontre, ponctuée par une conférence de presse, le ministre des Affaires étrangères a remercié les organisateurs du choix du Mali pour abriter les travaux qui auront été un franc succès.
Le ministre Diop a aussi apprécié à sa juste valeur les conclusions pertinentes et les recommandations, à différente échelle, auxquelles sont parvenus par les participants et lesquelles vont désormais inciter à aller aux actions.
En tout cas, de la conviction du chef de la diplomatie malienne, ce colloque n’est pas un forum de plus. Il est, selon lui, le début d’un processus d’action pour sauver les vies humaines et l’avenir des Etats concernés.
D’où, la volonté de la Mission de l’Union africaine pour le Mali et le Sahel (MISAHEL), le GS Sahel, le Centre africain d’étude et de recherche sur le terrorisme (CAERT) de poursuivre le débat dans certains autres pays de l’espace saharo-sahélien, avec comme objectif la mobilisation de tous contre la radicalisation et l’extrémisme violent, la prise de conscience que ce combat est un combat de la société dans son ensemble; c’est-à-dire les acteurs étatiques et non étatiques sans oublier les organisations régionales ou internationales implantées dans cette région.
PAR MOHAMED D DIAWARA
Source: info-matin