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Chronique satirique: quand les autorités sécuritaires ont peur des médias

Si le Panama est un paradis fiscal, notre beau pays est un paradis pour les bandits armés. Il suffit de tenir en sa main un bâton en caoutchouc ou une branche de palmier pour y entrer et en sortir à sa guise. Si ce n’est pas là un moulin à vent, je veux bien être pendu! Dans ce contexte, on comprend bien que personne ne se hasarde à de longs discours. Tout le monde se terre dans son coin, de peur de prendre sur la tempe une babouche de Ladji Bourama. Le ministre de la Défense, Tieman Hubert Coulibaly, n’a-t-il pas été jeté par les fenêtres après que ses services ont trop (et mal) parlé au sujet des attaques de Nampala ?

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Mais suite aux attaques armées qui ont frappé le poste de péage de Sanankoroba et un client d’Ecobank, les autorités sécuritaires ne pouvaient garder le silence. Le ministère de la Sécurité, à travers son chargé de communication, Amadou Sangho, a invité les journalistes à participer à un point de presse prévu dans la salle de conférences du département le vendredi 28 octobre 2016. Au téléphone, les journalistes sont prévenus que le point de presse sera animé par le général-ministre Salif Traoré en personne. Vendredi à 15 heures, la presse entre en salle, au grand complet, micros et plumes dressés. Le chargé de communication se présente; d’un ton gêné, il déclare que contrairement aux prévisions, le point de presse ne sera plus animé par le ministre, « appelé à d’autres urgences », mais plutôt par les directeurs de la police et de la gendarmerie nationale.

Bon, d’accord. La presse ne perd pas au change puisque messieurs les directeurs doivent savoir un rayon sur l’origine et les circonstances des attaques. Après 45 minutes d’attente, revoilà le chargé de communication, l’intenable monsieur Sangho: cette fois, il annonce à l’assistance que les directeurs de la police et de la gendarmerie sont « pris par des opérations de terrain » et que le point de presse sera animé par Bakoum Kanté, commissaire de police et conseiller technique du ministre de la Sécurité.

Ah bon ? Un policier conseiller, hein ? Ok, attendons-le. A 16 heures, ledit conseiller technique apparaît enfin dans la salle (photo). Il porte, non pas un uniforme et des galons de commissaire principal, mais un costume de conseiller technique. Les débats promettent donc de la technicité, n’est-ce pas ? Sauf que notre conseiller a l’air aussi angoissé qu’un nomade politique participant à son premier conseil des ministres.  Monsieur Kanté commence par justifier l’absence de ses chefs qui, à ses dires, « se trouvent sur le terrain auprès de nos forces de sécurité ». Kanté ne le dit pas, mais vous aurez compris que les forces de sécurité ont besoin d’être cajolées. Mais passons…. Le conférencier annonce un nouveau maillage sécuritaire du terrain. « La police malienne aura plus de moyens, les patrouilles vont se multiplier », promet-il. Il précise avec gravité : « Ordre a été donné aux agents d’interpeller toute personne suspecte et de fouiller tout véhicule suspect. En outre, aux cours des patrouilles, il sera procédé à la saisie de tous véhicules non immatriculés portant les numéros « CH ». Toutes les motos transportant plus de deux personnes seront saisies et leurs occupants interpellés. L’expérience montre que les voleurs de motos circulent à trois sur une moto afin qu’après le vol, l’un  d’entre eux conduise la moto volée ». Le conférencier ajoute: « Ordre est donc donné d’interpeller ceux qui circulent à trois sur une moto et s’ils n’obtempèrent, de les poursuivre et de les arrêter par tous les moyens ».

Par « tous les moyens » ? La formule est assez obscure mais les journalistes que désormais, ceux qui circulent à trois sur une moto risquent de prendre une balle dans le dos. Surtout le troisième qu’on soupçonne d’avoir pour métier de conduire les motos volées. En tous les cas, monsieur le conseiller Kanté se refuse à tout commentaire. Après avoir débité son propos comme un cours d’histoire, il a ramassé ses papiers et est sorti précipitamment de la salle, se disant non qualifié pour répondre à des questions. Drôle de communication!

Alors question: le ministre de la Sécurité a-t-il convoqué la presse nationale et internationale pour venir parler de motos et de bicyclettes ? Comment tenir une conférence de presse sans piper mot des dernières attaques sanglantes qui défraient le chronique, à savoir celles du poste de péage et de la banque? Pourquoi le ministre et ses conseillers ont-ils  peur des médias au point de bricoler à ce point ?

Tiékorobani

 

 

Source: proces-verbal

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