Nous ne sommes pas très au fait des affaires gouvernementales maliennes, en particulier des relations entre Koulouba et l’Élysée. Toutefois, nous savons par expérience que derrière les annonces souvent à l’emporte-pièce surtout en temps de crise et, reprises par les journalistes, les rapports entre dirigeants politiques sont plus subtils et les confidences du pouvoir aux journalistes ne sont jamais dénuées de calculs.
Il est évident que pour les hommes politiques et les militaires maliens, Paris n’a pas rempli son contrat de débarrasser le Mali de la menace djihadiste. C’était un impossible combat pour François Hollande et ses conseillers qui ne connaissaient rien à l’Afrique. Ils ont effectué, après l’opération Serval qui fut un ‘‘succès’’, une mauvaise analyse de la situation et, partant, ont pris de mauvaises décisions. Ils n’ont pas pris en compte la diversité ethnique et les diverses sensibilités des populations maliennes. D’où, l’expansion du djihadisme à travers le pays. Sans intelligence, ignorant volontairement l’aspect politique de la situation, ils ont tout misé sur l’option militaire en « mégotant » sur les moyens en hommes et matériels. Pour preuve, finalement l’appel aux moyens militaires américains et des États de l’Union Européenne en agitant le chiffon rouge du terrorisme. Ils ont sciemment ignoré l’incurie des dirigeants maliens. Ils ont pensé que les gouvernants maliens pouvaient être des rassembleurs et ont persisté malgré les évidences qui se sont faites rapidement jour.
Le divorce entre Paris et les militaires maliens arrivant au pouvoir après le coup d’état était donc inévitable. En effet, Paris et la communauté occidentale ne jurent que par leur modèle démocratique totalement inadapté aux réalités africaines, particulièrement au Mali en guerre. Or, toutes politiques de gouvernance qui ne sont pas harmonieuses et discordantes avec les valeurs et pratiques culturelles du pays sont nécessairement vouées à l’échec. Les politiques actuelles de la France n’ont pas amélioré la situation, au contraire.
C’est notre constat succinctement évoqué. Nous reconnaissons qu’il est toujours facile d’écrire l’histoire après coup et de trouver des responsables. Cependant, bien avant le début des crises que nous vivons, nous avons condamné la gestion misérable des affaires maliennes par nos gouvernants et proposé des solutions viables et durables.
Les réalités de la géopolitique nous obligent à vite réparer les relations non seulement entre le Mali et la CEDEAO, mais aussi entre notre pays et l’Europe qui sont stratégiques et nécessaires pour notre nation. Il est crucial que les relations retournent à la normale tout en prenant en compte les valeurs sociopolitiques des deux parties afin d’éviter un clash sanglant préjudiciable tant aux Maliens qu’aux Européens. De toute façon, les Européens ne seront pas très loin du Mali puisqu’il nous semble qu’ils veulent réarticuler leur dispositif autour de notre pays.
Bamako aurait fait appel au groupe Wagner, société militaire privée, dirigée par des proches du Président Russe. Les mercenaires n’y vont généralement pas de main morte. Leurs modes d’action sont plus brutaux que ceux d’une armée régulière. Peut-être serait-ce un bien, à court terme, pour conforter le pouvoir actuel qui dit avoir besoin de remettre de l’ordre dans le pays. Seul le temps nous dira quelle solution aurait dû l’emporter.
Cheick Boucadry TRAORE