L’ONG Justice and Dignity for the Women of Sahel (JDWS) est une organisation á but non lucratif de réflexion et d’initiatives dont l’objectif principal est de lutter contre les violences physiques et psychologiques à l’endroit des femmes et des filles dans le monde et particulièrement au Sahel. La présidente fondatrice de cette ONG, Aida Hamady Oualate a écrit une tribune que laviesahel.com publie à l’occasion de la Journée Internationale des femmes 2022. Pour elle, il y a lieu d’adapter cette célébration au contexte psychosociologique du sahel, en parlant, certes, des Droits de la Femme, mais de faire également un nécessaire focus, en ce 8 mars, sur les devoirs des hommes et des enfants. « Je suis particulièrement heureuse de vous annoncer ici et maintenant que notre organisation ne ménagera aucun effort pour faire de la lutte contre les VBG sa ligne directrice, voire sa raison d’existence. Cette lutte implacable que nous menons ne saurait avoir des effets sans la coordination et la synergie efficaces des acteurs et organisations de défense des droits de l’homme pour la restauration, l’égalité hommes-femmes et la justice sociale », indique Aida Hamady Oualate dans cette tribune. Lisez !
La journée des femmes ou journée internationale pour les droits des femmes est célébrée le 08 mars de chaque année. Le but est de réfléchir sur les conditions des femmes dans le monde et de lutter contre les inégalités mais aussi et surtout sur les violences basées sur le genre dont les femmes et les jeunes filles sont majoritairement victimes. Cette année, c’est à la fois avec un grand honneur et humilité, que j’ai le privilège, avec mon organisation justice et dignité pour les femmes et filles du sahel Justice And Dignity For The Women of Sahel (JDWS) que nous célébrons cette journée emblématique de 08 Mars 2022, la Journée internationale des Droits de la Femme.
Cette année, la thématique retenue à l’échelle mondiale est très ambitieuse : « L’Egalité des Sexes aujourd’hui Pour un Avenir Durable »
Malgré les restrictions sanitaires, il nous paraît important de marquer cette Journée, même sous un autre format plus modeste. La crise sanitaire ne doit pas nous faire oublier les problématiques liées, non seulement aux violences basées sur le genre (V.B.G) mais également celles liées à la délinquance des jeunes. Ce sont des problématiques d’une telle gravité auxquelles nous nous devons d’apporter des solutions d’urgences, notamment en cette période de crise sanitaire mondiale, qui accentue davantage la fragilité des femmes et des filles jeunes.
Au plan mondial, beaucoup d’efforts restent à faire pour réduire les écarts entre les sexes, c’est-a-dire combattre les inégalités hommes-femmes. Ainsi, selon le rapport du forum économique mondial, publié en 2021, le temps nécessaire pour combler les inégalités hommes-femmes est de 135,6 ans. Ces inégalités sont encore très fortement marquées au Sahel ; d’où la présence de notre O.N.G dans six (6) pays du Sahel.
Le rôle de la femme est indispensable, non seulement pour l’équilibre du foyer, l’éducation des enfants, l’avenir et la perpétuation de l’espèce humaine. C’est parce qu’elles donnent la vie que les femmes sont les plus aptes à défendre cette vie. C’est pourquoi, nous devrions, parallèlement, combattre les préjugés sexistes sur les femmes (47% de la population mondiale pense que les hommes sont de meilleurs décideurs politiques que les femmes), tout en favorisant l’émancipation de leurs droits (accès à la contraception, éducation des filles, leadership politique, lois sur l’égalité sur le lieu de travail et sécurité etc.) qui doit constituer l’une des priorités des politiques publiques.
C’est pourquoi, je suis particulièrement heureuse de vous annoncer ici et maintenant que notre organisation ne ménagera aucun effort pour faire de la lutte contre les VBG sa ligne directrice, voire sa raison d’existence. Cette lutte implacable que nous menons ne saurait avoir des effets sans la coordination et la synergie efficaces des acteurs et organisations de défense des droits de l’homme pour la restauration, l’égalité hommes-femmes et la justice sociale.
Je salue également tous les acteurs qui se battent chaque jour, pour faire cesser les violences subies par les femmes ; ainsi que les diverses formes des iniquités sociales dont elles font l’objet.
Pour rappel, nous constatons 3 décès de femmes pour celui d’un homme en matière de violences conjugales. Et 80 % des femmes victimes de violence ont lieu dans la sphère familiale. C’est donc avec une vision et une conception élargies qu’il faudrait célébrer cette journée du 8 mars au Sahel et dans le monde.
Nous devrions adapter cette célébration au contexte psychosociologique du sahel, en parlant, certes, des Droits de la Femme, mais de faire également un nécessaire focus, en ce 8 mars, sur les devoirs des hommes et des enfants. Il ne s’agit pas de droits, il s’agit d’humanité. Il s’agit de changer notre regard sur les Femmes. Elles sont source de vie et d’amour. C’est notre défi.
Chères amies, quand on regarde le monde, l’humanité, le chemin de la femme n’a pas été de toute facilité. Ce parcours semé d’obstacles nous a vraisemblablement privées des bienfaits qu’elle pouvait nous apporter. C’est l’humanité entière qui a été privée d’authentiques richesses spirituelles.
En effet, combien de femmes sont encore jugées sur leurs qualités physiques plus que sur leurs valeurs professionnelles, leur sensibilité, et en définitive sur leur dignité, la dignité de leur être, la dignité de leur genre. C’est là, l’objet de votre combat, de notre combat à tous.
Il en découle pour la société de gommer ces discriminations et d’obtenir partout l’égalité effective. Je veux parler de la parité des salaires pour un travail égal, la protection et l’accompagnement des mères qui travaillent, l’égalité des droits pour les conjoints. Il s’agit là d’un acte de première nécessité.
La présence sociale de la femme au sahel sera précieuse face aux graves problèmes qui font l’objet de débat pour notre société : la qualité de la vie les services sociaux, la délinquance, la drogue, les violences conjugales.
Elle obligera à redéfinir notre système économique et social en faveur de processus d’humanisation qui caractérisent « la civilisation de l’amour auquel nous rêvons tous ». C’est le « génie de la femme » dont on parle beaucoup. Cette idée est confortée par des faits actuels qui montrent que les 7 pays les mieux gérés dans cette crise sanitaire que nous traversons, sont dirigés par des femmes. Je prendrai pour exemple, Taïwan, la Nouvelle Zélande, l’Allemagne, etc. Pourquoi une telle réalité ? Tout simplement, parce qu’elles ont géré cette crise avec anticipation et empathie. En fait, en plus de la technicité, il y a chez la femme une préoccupation constante de la personne humaine.
Aussi, vous avez raison de vous mobiliser et de vous battre contre toutes formes de violences, qu’elles soient morales, physiques ou sexuelles. JDWS sera toujours aux cotés des femmes et des filles du sahel, comme au nom du respect de la personne, nous devons prendre les moyens pour les filles de jeune âge qui tombent dans des circuits corrompus et qui font de leur corps une marchandise.
En disant cela, il nous faut réfléchir à cette nouvelle approche sociale et humaine de l’image de la Femme du sahel à promouvoir. C’est une nouvelle pédagogie communautaire et collective fondée sur l’origine de l’humanité. La femme donne la vie, c’est à la femme que nous devons la survie de l’homme.
Ce sera un travail long car on ne change pas les esprits comme on change les lois. Cela prendra du temps et requiert des actions coordonnées, des actions qui agissent en profondeur sur chacun d’entre nous, avec humilité et respect mutuel.
Chères ami.e.s, comme vous le savez, la Journée internationale des Droits de la Femme est célébrée dans de nombreux pays à travers le monde. C’est un jour où toutes les femmes, d’ici et d’ailleurs, sont reconnues pour leurs réalisations. C’est une occasion de faire le point sur les luttes et les réalisations passées, et surtout, de préparer l’avenir et les opportunités qui attendent les futures générations de femmes et les filles du sahel.
Ici, je tiens à saluer votre engagement, à vous remercier pour celui-ci, car c’est cela qui fera changer les choses pour une égalité de fait qui implique nécessairement de composer avec ce qu’est la réalité des esprits et des représentations qui structurent notre société.
Le concours de toutes et de tous est nécessaire et s’élève avec autant d’acuité dans la période que nous traversons afin que les progrès en matière de lutte contre les violences basées sur le genre au sahel acquis ne reculent pas.
Il sied de rappeler avec amertume et consternation l’état des statistiques récentes de l’ONU-FEMME qui sont alarmantes et très inquiétantes. Dans le monde, on estime que 736 millions de femmes – soit près d’une femme sur trois – ont subi au moins une fois des violences physiques et/ou sexuelles de la part d’un partenaire intime, et/ou des violences sexuelles de la part d’une autre personne (30% des femmes de plus de 15 ans)
Dans le monde, les violences basées sur le genre touchent de manière disproportionnée les pays et régions à faibles et moyens revenus en l’occurrence le Sahel. 37% des femmes âgées de 15 à 49 ans vivant dans des pays classés par les Objectifs de Développement Durable comme « les moins développés » ont été confrontées à la violence perpétrée par le partenaire intime au cours des douze derniers mois – un taux sensiblement plus élevé que la moyenne mondiale de 13 pour cent.
Dans le monde, 81 000 femmes et filles ont été tuées en 2020, dont environ 47 000 (58 %) par un partenaire intime ou un membre de la famille, ce qui équivaut à une femme ou une fille tuée toutes les 11 minutes dans son foyer. Dans 58 % des meurtres perpétrés par des partenaires intimes ou d’autres membres de la famille, la victime était une femme ou une fille.
Au moins 158 pays ont promulgué des lois sur la violence domestique et 141 disposent de lois sur le harcèlement sexuel au travail. 15 millions d’adolescentes dans le monde (âgées de 15 à 19 ans) ont été forcées d’avoir des rapports sexuels.
La crise sanitaire devra mobiliser toute notre vigilance à ce que les femmes ne soient pas les plus durement touchées par les conséquences économiques de la Covid 19.
En effet, si le monde a réalisé des avancées sans précédent, aucun pays n’a encore atteint l’égalité des sexes. Il nous appartient d’écrire l’avenir et de faire en sorte que les prochaines années marquent leur différence pour les femmes et les filles au sahel. Cela est difficile, mais pas impossible.
Comme l’exprime Georges Bernanos « ON NE SUBIT PAS L’AVENIR, ON LE FAIT ».
Je voudrais exprimer, avant de terminer, ma profonde reconnaissance à l’ensemble des équipes de JDWS qui, malgré la lourdeur des moments et l’ampleur des circonstances, abattent un travail remarquable, avec courage, dévouement, persévérance et perspicacité. Soyons en fiers !!
Je lance en cette journée mémorable de la célébration de la journée des droits des femmes, un appel pressant à tous les partenaires techniques et financiers, que je salue et remercie particulièrement, de continuer de nous accompagner pour ce noble combat, pour que les objectifs soient atteints. Et de nous renouveler encore et toujours leur confiance, ô combien importante et inestimable !
Aida HAMAHADY OUALATE Présidente/Fondatrice JDWS
Source: Le Républicain