«Tous les Maliens doivent se lever pour l’unité du Mali d’abord, ensuite pour son indépendance» ! La déclaration est de Fahad Almahmoud, le Secrétaire général de Gatia, à propos notamment de la situation à Kidal.
Une déclaration qui interpelle chacun de nous, en tant que Malien, à la veille de la commémoration du 56e anniversaire de l’accession du Mali à l’indépendance le 22 septembre 1960. La situation est toujours critique et notre indépendance est remise en cause depuis la célébration du Cinquantenaire car notre souveraineté ne s’exerce plus sur toute l’étendue de son territoire.
Au nord, la présence de l’Etat est toujours timide. A part Tombouctou et Gao, l’administration des autres régions du septentrion (Kidal, Taoudénit et Ménaka) est en exil dans la Cité des Askia et la Ville des 333 Saints.
La situation est surtout critique et révoltante à Kidal où depuis les tragiques événements de mai 2014 (consécutifs à la visite du Premier ministre Moussa Mara), aucun symbole de l’autorité de l’Etat n’est toléré. Mais, déjà, en empêchant les forces armées maliennes d’entrer à Kidal pour parachever l’Opération Serval, la France a fait de la Cité de l’Adrar des Ifoghas «un véritable enjeu géopolitique et géostratégique».
La région demeure toujours un No man’s land où prospère le narcotrafic à la base du terrorisme dans la bande sahélo-saharienne. La situation de Kidal justifie en partie le retour en force des réseaux terroristes comme Ançar Dine sabordant ainsi les efforts pour la paix et la réconciliation.
Et cela malgré la présence des forces françaises Barkhane et de la Minusma sous la bannière des Nations unies. L’objectif principal de la Minusma devait être son soutien à l’Etat malien pour le rétablissement de son intégrité territoriale. Hélas ! Sa présence continue à fragiliser le pays car elle est incapable même de peser sur la mise en œuvre de l’Accord pour la paix et la réconciliation nationale signée en 2015 (mai et juin).
Cela d’autant qu’elle est contrainte de fermer les yeux sur le double jeu de certains groupes armés signataires de cet Accord, notamment le HCUA qui flirte avec Iyad Ag Ghali au vu et au su de la satanée «Médiation Internationale» dont la pression ne s’exerce que sur le gouvernement malien.
La Coalition Patriotique Pour le Mali (CPM) dans ses analyses et constats, «trouve inadmissible la gestion faite par la communauté internationale, la France en tête , de la question de KIDAL, du moment où elle est plus préoccupée par l’exploration et l’exploitation de nos ressources que par le soutien à notre Etat de recouvrer son intégrité».
Cette organisation prévoit ce matin (mercredi 21 septembre 2016) la Grande marche pacifique de soutien aux Forces armées maliennes et à la Plateforme pour le rétablissement immédiat de l’intégrité territoriale du Mali.
Le centre est en train d’échapper au pays déjà malade de son nord
Comme le déplorent les responsables de la CPM, «toutes les réflexions et débats objectifs sur la situation du nord de notre pays concluent à une véritable impasse dans laquelle nous sommes».
Et pourtant l’Accord pour la paix et la réconciliation nationale stipule clairement que l’intégrité territoriale du Mali soit établie 60 jours après sa signature.
Au contraire, les zones qui échappent au pouvoir central de Bamako se multiplient. En effet, depuis près d’un an, le pays n’est plus seulement malade de son nord, mais aussi du Centre où la violence s’est déplacée avec la multiplication des groupes d’auto-défense comme les Forces de Libération du Macina inféodées à Ançar Dine. Depuis quatre mois, il se passe rarement une semaine sans que nos forces armées et de sécurité ne soient attaquées entre Douentza et Gao.
Dans de nombreux cercles et communes de la région de Mopti, l’administration et les services sociaux de base ont déserté à cause de l’insécurité devenue du pain bénit par des politiciens qui en font un fonds de commerce et attisent le périlleux feu du communautarisme.
Ils ne se cachent même plus dans leur ambition de créer un front de dissidence et de déstabilisation au Centre du Mali exerçant ainsi un honteux chantage sur la nation pour atteindre leurs objectifs politiques.
Comme nous pouvons tous le constater, la souveraineté du Mali est soumise à de rudes épreuves depuis notre indépendance le 22 septembre 1960. Elle a toujours été menacée par le néocolonialisme qui a remporté une première victoire sur les patriotes maliens avec le coup d’Etat du 19 novembre 1968.
Et ce même néocolonialisme est à la base de l’instabilité à laquelle notre pays est soumis depuis janvier 2012. Aujourd’hui, ce n’est qu’un secret de Polichinelle que la situation catastrophique dans la bande sahélo-saharienne, dans le bassin du Lac Tchad voire en Afrique de l’Ouest est liée à l’assassinat de Mouammar Kadhafi par une alliance néocolonialiste commandée par la France et la Grande Bretagne.
Le patriotisme par les actes concrets
Le Guide de la Révolution libyenne était devenu une menace sérieuse pour les intérêts des puissances coloniales en Afrique par sa volonté d’intégrer davantage le continent autour notamment d’une politique monétaire unique et une exploitation judicieuse des richesses du continent.
Sauver voire reconquérir notre souveraineté n’est pas l’affaire d’un pouvoir, mais de tous les patriotes qui sont conscients des enjeux de la crise actuelle. C’est dans l’unité que nous avons accédé à l’indépendance sous la conduite du regretté Modibo Kéita et ses camarades.
A l’époque, le projet politique ne faisait pas sans doute l’unanimité de tous les acteurs de la classe politique et de la société civile en gestation. Mais, ils ont su s’élever au-dessus de leurs différends pour privilégier l’essentiel : se soustraire du joug colonial pour que le peuple malien puisse prendre son destin en main ! Et c’est cela le patriotisme !
Comme la Coalition patriotique pour le Mali, nous pensons que tous les Maliens doivent être aujourd’hui conscients que «la seule, unique et efficace solution envisageable pour rétablir l’intégrité territoriale» de notre patrie reste «la mobilisation des masses populaires Maliennes pour la prise en charge de sa propre destinée». Elles l’ont réussi en 1959 pour arracher l’indépendance du Soudan français baptisé Mali le 22 septembre 1960.
La démocratie est par essence la diversité des projets de sociétés, des visions politiques… Ce qui suppose des divergences sur la voie à suivre pour le redressement du pays. Mais, nos différends sociopolitiques doivent-ils nous empêcher de nous entendre sur l’essentiel ?
La réponse est claire : Non ! Bien sûr si nous nous battons tous réellement et sincèrement pour les intérêts de cette nation. Nous devons taire un moment nos divergences et traduire notre patriotisme par des actes concrets en tournant la page des discours démagogiques et incendiaires dans le seul but de décrédibiliser et déstabiliser un régime. Nous devons être plus que jamais positifs dans nos critiques de l’action politique du gouvernement afin de contribuer au redressement politique, économique et même moral du pays.
Le temps du dialogue politique et social
Au pouvoir aussi de comprendre qu’on ne peut pas efficacement gérer un pays et résoudre les préoccupations des populations en s’enfermant, en fermant la porte aux forces vives de la nation.
Face aux défis actuels, le dialogue social direct, sincère et loyal est un passage obligé pour sauver le navire qui ne cesse de tanguer dangereusement.
Visiblement, et heureusement, le président Ibrahim Boubacar Kéita semble l’avoir compris. Depuis le début de ce mois de septembre, il a pris l’initiative du dialogue social et politique avec une série d’audiences accordées à la classe politique (majorité et opposition), aux syndicats, à la société civile pour «parler du Mali», de la paix et de la réconciliation, des difficultés socio-économiques de la majorité du peuple… de la reconquête de notre territoire national.
On gagne toujours à écouter tout le monde car, à défaut d’être forcément sur la même longueur d’ondes, les échanges permettent à chacun d’exprimer ses préoccupations, de proposer ses solutions et aussi de comprendre les difficultés et les contres de celui qui est en face. Le dialogue est donc un principe majeur de la démocratie !
Moussa Bolly
Source: Le Matin