Au-delà de la pénurie de cartes nationale d’identité, il y aurait aussi, selon le blogueur Lamissa Diarra, une rétention à dessein au profit du plus offrant.
Au Mali, à chaque jour suffit sa peine. Des situations nouvelles sont en permanence exploitées pour ouvrir les voies larges à la corruption et à l’arnaque.
Depuis plusieurs semaines, une nouvelle a pris d’assaut les réseaux sociaux : la pénurie de cartes nationale d’identité. Un document très sollicité, en raison du fait qu’il est l’un des premiers à acquérir dès l’accession à l’âge légal de la majorité.
Également, c’est un document exigé pour l’établissement de beaucoup d’actes et de pièces d’état civil et lors des contrôles de routine policiers. C’est ce document d’une telle importance qui se trouve étonnamment dans une situation de pénurie dans les lieux d’établissement agréés par l’État, parmi lesquels les commissariats de police.
Et comme on pouvait s’y attendre dans une administration rongée par la corruption et la manipulation, ce sont des agents de police au sein des commissariats qui se frottent les mains. La carte nationale d’identité, établie au prix réglementaire de 1000 francs CFA, est délivrée par endroits aujourd’hui et selon la tête du client à 3000, 5000 et 7500 francs CFA, soit 5 à 7 fois le prix normal.
Système de business
Selon des informations rapportées par la presse, le ministère de la Sécurité et de la Protection civile a exprimé une demande de cartes à l’entreprise Graphique industrie, chargée d’en assurer la fourniture. Celle-ci, actuellement en difficulté, avance pour sa défense la crise économique et la flambée sans précédent des coûts des matières premières qui se caractérise par une « grande pénurie de papiers et l’inaccessibilité des prix quand on arrive à s’en procurer ».
Cette situation pourrait expliquer que les cartes nationale d’identité soient cédées avec parcimonie dans les commissariats de police. Toute occasion étant bonne pour se faire de l’argent sur le dos et le malheur des pauvres citoyens, un système de business finement réfléchi aurait été mis en place. À peine une bonne quinzaine ou vingtaine de cartes delivrées à des citoyens, qui se mettent dans une longue file d’attente depuis 6 h du matin. Les agents de police en arrêtent la délivrance et justifient par la pénurie de cartes. Les demandeurs sont invités à revenir le lendemain et avec peu de chance d’en obtenir. Ils sont invités à revenir le jour suivant, ainsi de suite.
Arnaque et ras-le-bol
Seydou (son prénom a été modifié) raconte comment il a obtenu sa carte : « Quand l’agent est revenu nous dire, une nouvelle fois après 2 jours de va-et-vient, que la délivrance de la carte pour ce jour était terminée, je l’ai approché pour lui expliquer que j’avais vraiment besoin de la pièce. »
En invitant l’agent à voir ce qu’il pouvait faire pour qu’il puisse enfin obtenir le sésame, Seydou a obtenu sa carte au prix de 5000 francs CFA. Alors qu’il avait été dit, à qui voulait l’entendre un peu plus tôt, qu’il n’y avait plus de carte et que la délivrance pour ce jour était terminée.
Cette situation s’est normalisée dans des commissariats ces derniers temps. Les agents de police procèderaient à une rétention des cartes pour les réserver aux plus offrants.
Également et si par malheur il manque au demandeur un document à fournir pour l’obtention de la carte, il est invité à revenir le lendemain, au prétexte qu’il ne pourrait plus aller chercher le document le même jour.
En s’efforçant à le faire, « ils te disent à ton retour qu’ils t’avaient prévenu et que la délivrance pour ce jour est terminée », témoigne un demandeur, qui a été victime d’une telle situation et qui, pour obtenir sa carte, affirme avoir « négocié » (sic), pour parler comme lui, un agent dans un commissariat. Sa carte lui a été délivrée au prix de 5000 francs CFA.
Pénurie de cartes nationale d’identité, vous avez dit ? On pourrait parler plutôt aussi de rétention à dessein des cartes dans des commissariats de police à des fins purement commerciales. Est-ce donc cela le Mali Kura (nouveau Mali) ?
Source : Benbere