Quelques jours après l’attaque fulgurante orchestrée par des extrémistes religieux se proclamant de l’organisation État Islamique contre un camp de l’armée Burkinabé près de la frontière avec le Mali, grâce à des témoignages des villageois et des sources sécuritaires, Nord sud journal a pu reconstitué le film des évènements.
L’attaque contre le camp de Koutougou, dans la région du sahel au Burkina Faso était bien préparée par les combattants de l’organisation État Islamique dans le Sahara (EIGS). Selon les témoignes, les assaillants avaient préparé leur opération une semaine avant le 20 août, jour de l’attaque la plus meurtrière contre l’armée du Burkina Faso.
Abdoul Hakim Sahraoui, ancien commissaire islamique du MUJAO à Gao en 2012, actuel numéro 2 de l’EIGS, et le nigérien Moussa Moumini, le chef de la Katiba Gourma de l’EIGS avaient envoyé un petit groupe pour les renseignements à Koutougou, une semaine avant l’attaque. Au même moment d’autres combattants de l’EIGS étaient aussi envoyés pour faire des tirs de sommation chaque matin à proximité du camp avant de disparaitre. « Le petit groupe destiné au renseignement pour le compte de l’EIGS observait le comportement des militaires burkinabés pendant et après les tirs de sommations », confie une source sécuritaire burkinabé à Nord sud journal. Une semaine après cet exercice, Abdoul Hakim et Moussa Moumini décidaient de passer à l’offensive.
Le 20 août dernier, les deux chefs de l’EIGS se sont donnés rendez-vous dans la localité de Beri, dans la commune de Déou pour passer ensemble à l’offensive. « Ils étaient plus de cent combattants sur environs 65 motos et 4 véhicules pick-up qui avançaient sur le camp militaire de Koutougou, la position de l’armée burkinabé la plus avancée vers la frontière avec le Mali », nous confie une autre source sécuritaire.
À 4h du matin, les extrémistes arrivaient à la porte du village de Koutougou. « Les terroristes se sont divisés en trois groupes : un premier groupe, constitué de trois hommes à pied avait foncé sur l’entrée du camp pour faire diversion », nous confie une source bien informée. Ils ont tiré sur la sentinelle à la porte du camp. Ce dernier est mort sur place, mais la riposte des militaires a permis d’éliminer deux des trois premiers assaillants. « Nous avons entendu les tirs, au début nous avons pensé qu’il s’agit des tirs des sommations dont on a l’habitude d’entendre tous les jours, c’est quand les bruits des tirs deviennent de plus en plus importants que nous avions compris qu’il s’agit d’une attaque et nous étions rentrés dans les maisons », nous confie un villageois de Koutougou qui parle sous anonymat car il a peur pour sa sécurité.
En effet les bruits des armes devenaient de plus en plus forts parce que les deux autres groupes sur des motos et dans des véhicules ont lancé l’assaut sur le camp par le côté Est et le côté sud. « L’attaque fut violente et rapide », nous confie un autre villageois.
Les soldats Burkinabés avaient opposé une résistance à l’assaut, mais 30 minutes après l’attaque, ils ont commencé à enregistrer des morts et des blessés. Au moins 24 militaires étaient tués et 12 blessés. La puissance du feu des extrémistes ne s’affaiblissait pas et finalement les militaires avaient abandonné le camp, mais les assaillants comptaient en ce moment dans leur rang 6 morts et plusieurs blessés.
À 5h du matin, le camp était tombé dans les mains de Abdoul Hakim et de Moussa Moumini. « Les djihadistes se sont dirigés directement vers les magasins avant de récupérer des armes, des tenus militaires et de la nourriture … », dit un autre habitant de Koutougou. Qui ajoute : « en plus des armes dérobées, les assaillants ont pris trois soldats burkinabés en otages, deux véhicules militaires emportés et plusieurs autres détruits ». Selon plusieurs sources les assaillants ont passé environ une heure de temps dans le camp avant de quitter le lieu vers 6h du matin. « Lorsque les djihadistes avaient quitté le lieu, ils s’étaient divisés en deux groupes. Les hommes dirigés par Abdoul Hakim avaient pris la direction du sud, vers la frontière Niger-Benin, alors que le groupe de Moussa Moumini avaient pris la direction du Nord Est, menant à la frontière avec le Mali voisin.
Deux heures de temps après, un hélicoptère de l’armée de l’Air du Burkina Faso a survolé le lieu de l’attaque découvrant l’horreur dans le camp. Le même hélicoptère avait ensuite pris en chasse le groupe de Moussa Moumini qu’il rattrape à 7 km avant la frontière malienne. L’hélicoptère procède à un raid sur le groupe de motard. Deux combattants de l’EIGS étaient tués, et les autres se sont dispersés dans la forêt.
Quelques jours plus tard, « au moins 9 combattants extrémistes ont succombé à leurs blessés », nous confie un villageois sur la frontière entre le Mali et le Burkina Faso. À Koutougou, la vie reprend petit à petit, mais les habitants sont toujours sous le choc après ce qu’ils ont vécu. Quant à l’armée burkinabé, « elle n’a pas encore repris sa position dans le camp de Koutougou », dit élu de la commune.
Source : Nordsudjournal