Ce vendredi, s’ouvrent à Ouagadougou les assises nationales visant à doter du Burkina Faso qui traverse une crise institutionnelle depuis plusieurs mois, une charte de transition. Jusqu’à la veille de l’ouverture des assises nationales convoquées par le capitaine Ibrahim Traoré, des doutes ont plané sur les réelles intentions du jeune officier de 34 ans. A l’origine, dans une interview avec Rfi le 3 octobre, il n’avait pas tranché le débat sur son maintien ou non du à la tête du Burkina Faso. « On aura un président civil ou militaire », avait-il répondu. Sauf qu’un évènement semble avoir clarifié la position du maître d’orchestre du coup d’Etat du 30 septembre contre le lieutenant-colonel Paul Henri Damiba, lui-même auteur d’un putsch en janvier dernier contre Roch Marc Kaboré.
Un avant-projet de charte de transition attribué au capitaine Traoré et largement diffusé ce jeudi 13 octobre dispose en son article 5 que « le président du Mouvement patriotique pour la sauvegarde et la restauration (MPSR) assure les fonctions de président de la transition, chef de l’Etat, chef suprême des Forces armées nationales ». Le second paragraphe de cette disposition précise qu’ « il est remplacé par le Premier ministre en cas de vacances du pouvoir ».
Mais le texte « fuité » reste un avant-projet et le MPSR n’a pas encore officiellement confirmé qu’il émane de son leader même si plusieurs sources de APAnews, y compris au sein de la junte, soutiennent que le document est bel et bien authentique. A la suite de son arrivée au pouvoir, le capitaine Traoré avait indiqué qu’il expédiait les affaires courantes avant la désignation d’un président de la transition. « Ce message était beaucoup plus destiné à l’extérieur, aux partenaires, pour montrer qu’il ne tient particulièrement pas au pouvoir. Mais je suis persuadé que si les choses se passent comme elles se doivent, il va rester au pouvoir. L’autre jour, on l’a présenté comme celui que les militaires ont désigné pour être leur chef. A moins que quelque chose d’extraordinaire ne se produise, je ne vois pas comment les militaires vont laisser le pouvoir à des civils et continuer à vaquer à leurs occupations. L’une des raisons de la prise de pouvoir, selon la nouvelle junte militaire, est le manque d’appui de l’Etat central aux troupes sur le terrain afin qu’elles puissent s’acquitter de leurs missions. Les militaires sont mieux placés que quiconque pour organiser cette coordination et pour s’assurer que l’essentiel des troupes sur le terrain est soutenu », avait commenté pour APAnews, Ibrahima Kane, spécialiste des questions régionales ouest-africaines.
Jeudi 13 octobre, des manifestants ont bloqué la voie donnant accès à plusieurs villes du pays, en soutien au capitaine Traoré dont ils exigent le maintien au pouvoir. À Bobo-Dioulasso, à plus de 300 kilomètres à l’est de Ouagadougou, les tensions ont conduit à la fermeture du marché alors que la France a invité ses ressortissants à la prudence à l’occasion de ces Assises nationales au cours desquelles sera aussi discutée la durée de la transition. Le document consulté par APAnews la fixe à 21 mois à compter du 2 octobre. C’était l’une des préoccupations de la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (Cédéao).
Mardi 4 octobre, l’institution sous-régionale a envoyé une mission de haut niveau auprès du capitaine Traoré pour s’assurer que les engagements pris par son prédécesseur seront respectés. A l’issue de cette visite, l’ancien président du Niger, Mahamadou Issoufou, médiateur de la Cédéao pour le Burkina Faso s’est dit « satisfait des échanges » avec le jeune capitaine.
S’il est confirmé comme chef de l’Etat à l’issue des assises nationales, ce dernier s’efforcera à « rétablir et renforcer la sécurité sur l’étendue du territoire national, apporter une réponse urgente, efficace et efficiente à la crise humanitaire, promouvoir la bonne gouvernance et la lutte contre la corruption, engager des réformes politiques, administratives et institutionnelles en vue de renforcer la culture démocratique et consolider l’Etat de droit, œuvrer à la réconciliation nationale et à la cohésion sociale, assurer l’organisation d’élections libres, transparentes et inclusives », comme le préconise l’article 2 de l’avant-projet de la charte.
Source : APA