Pour assouvir sa cupidité, le maire de Barouéli, Cheickna Hamala Tounkara vient d’embarquer le Gouverneur de la région de Ségou dans son business foncier pour une destination inconnue. Alors que l’affaire des champs qui oppose les villageois à leur maire soit encore pendante devant le tribunal, le Gouverneur de la région, Gal Biramou Sissoko n’a pas hésité à cautionner l’envoi, il y a deux semaines, d’une colonne de l’armée pour sécuriser l’opération de morcellement des terres de culture des paysans et ce, sans s’y référer. Mettant du coup en cause le vivre ensemble des populations de Barouéli, très souvent divisée par le comportement de l’élu. Si le Gouverneur Biramou Sissoko, cadre valeureux, fin connaisseur des droits coutumiers et positifs, respectueux des us et coutumes du Mali, savait qui était ce maire, il ne collaborerait jamais avec lui à fortiori lui confier des secrets. Dans ce dossier complet, nous vous livrons la genèse de cette rocambolesque affaire foncière que la région de Ségou n’a jamais connue.
De quoi s’agit-il ?
Pour donner 14ha, le Gouvernement du Mali a pris un décret en Conseil des ministre mais pour plus de 72 ha, le Gouverneur de Ségou l’exécute par un Arrêté. Ce qui n’a pas manqué de provoquer la colère des paysans.
Historique du Schéma Directeur ….
Par délibération n°017-CR-Bli du 29 septembre 2001, le Conseil communal de la Ccommune rurale de Barouéli adoptait le projet de Schéma Directeur d’Aménagement et d’Urbanisme de la ville de Barouéli et environs. Ce jour-là, sur les 23 conseillers communaux, 13 étaient présents et 10 absents, comme en atteste ladite délibération.
Le 1er octobre 2001, par Décision N°055-CB, le Délégué du Gouvernement du Cercle de Barouéli a approuvé la délibération n°017-CR-Bli du 29 septembre 2001 du Conseil communal portant adoption du projet de Schéma Directeur d’Aménagement et d’Urbanisme de la ville de Barouéli et environs.
Le 30 janvier 2002, le Décret N°02-030 P-RM portant approbation du Schéma Directeur d’Aménagement et d’urbanisme de la ville de Barouéli et environs est signé, comportant 06 articles. Le 1er article dudit décret est ainsi libellé : « Est approuvé et rendu exécutoire pour une durée de vingt (20) ans de 2001 à 2020, le Schéma Directeur d’Aménagement et d’Urbanisme de la ville de Barouéli et environs annexé au présent décret ».
Les constats….
Le Schéma Directeur d’Aménagement et d’Urbanisme de la ville de Barouéli et environs (SDAU) comprend deux grandes parties. La 1ère partie est le rapport du constat, et la 2ème traite de la problématique et des hypothèses d’aménagement.
Pour la mise en œuvre du SDAU, il est proposé dans le schéma des stratégies d’application détaillées de la page 49 à la page 52 du document du schéma.
De l’approbation du SDAU en janvier 2002 à nos jours, on peut faire les constats suivants : la non délimitation du périmètre du schéma par la Mairie et les services compétents ; la non mise en place préalable d’une commission de suivi pour l’application du SDAU dont les missions sont : la sensibilisation et l’information des populations sur les orientations et le programmes du SDAU ; l’assistance à la commune dans la réalisation de son programme d’habitat et d’équipements ; la planification, l’organisation et la coordination des différentes interventions; la recherche de partenaires et de fonds pour l’application de programmes du SDAU ; la réalisation de trois lotissements respectivement en 2008, 2013 et 2016 dont un seul, celui de 2013 sur à peu près 15 ha dans la zone de recasement du quartier Gounoumba pour compenser les victimes du bitumage de la voie N°8 reliant Barouéli à Tamani où à la demande de la Mairie de Barouéli, le Gouvernement, par DECRET N°2013-837/P-RM du 31 octobre 2013 lui a affecté la parcelle de terrain objet du titre foncier N°73 du cercle de Barouéli.
C’est pratiquement cet état qui caractérise la mise en œuvre du SDAU qui a gravement pêché durant son élaboration par la non concertation et la non implication des populations dont les champs se trouvaient dans les périmètres du futur schéma. D’ailleurs, cela est perceptible dans les documents du SDAU, où ne sont annexées que la Décision du Délégué du Gouvernement et la Délibération du Conseil communal, mais jamais de Procès Verbaux de rencontres et/ou de réunions avec les différents acteurs concernés ou affectés par le projet du SDAU. Nul doute qu’aujourd’hui, ce pêché originel commis depuis l’élaboration du schéma est la cause principale du malaise qui prévaut entre les populations de Barouéli, très souvent divisée par le comportement négatif du maire et de ses proches qui n’hésitent pas à insulter grossièrement tous les paysans qui revendiquent leurs droits sur lesdits champs.
Pour un âne deux voleurs se battent…
Le SDAU apparait désormais comme un âne et comme dirait l’autre, pour un âne enlevé qu’est le SDAU, deux voleurs (le Maître d’ouvrage et le Maître d’œuvre) se battent ; chacun avec son intention dont seul ALLAHOU SOUBAHANA WATA ALLAH sait la profondeur et la limite.
Pour ce qui concerne le Maître d’ouvrage, représenté par le maire, « nous savons que depuis la 1ère semaine de son investiture en janvier 2017, il a d’abord réuni le chef de village et ses conseillers pour les informer de sa volonté de lotir les quatre côtés de la ville de Barouéli et il leur a promis des lots. Le 21 mars 2017, le maire convoque une session ordinaire ayant à son ordre du jour entre autres, la discussion et le vote d’un projet de lotissement à Barouéli sans autres précisions. De cette date à nos jours, aucune information officielle n’a été portée à la connaissance des conseillers communaux sur la suite réservée à ladite délibération. La tutelle n’a pas approuvé la délibération N°17-04/CRB du 21 mars 2017 portant sur le projet de lotissement à Barouéli. », nous confie un élu.
Peut-être que le maire, n’ayant pas eu satisfaction du côté de sa tutelle, s’est retourné vers les services des domaines et du cadastre. C’est ainsi que, par lettres N° 011, 012 et 013 CR-B du 12 avril 2017 et signées du maire Cheickna Hamala TOUNKARA, toutes adressées à la Directrice Régionale des Domaines et du Cadastre de Ségou, le maire demandait à celle-ci l’immatriculation de parcelles respectivement dans la zone d’habitat administré, la zone de recasement et la zone d’habitat existant dans le SDAU.
A la grande surprise des conseillers, le maire convoque une session le 14 juin 2017 où un des points de l’ordre du jour portait sur la discussion et le vote du projet de lotissement de 72 ha 69 a 68 ca. « De cette date à nos jours, on ignore encore la suite réservée à cette délibération par la tutelle. Ce qui est sûr et certain, les conseillers communaux n’ont pas été informés jusqu’à ce jour par le maire de l’approbation ou du rejet de ladite délibération. », a rappelé notre source.
Entre temps, le maire monte la pression souvent même avec le soutien du Préfet central d’alors, Souleymane Coulibaly aujourd’hui en poste à Kéniéba. Le maire, dans sa pression, a même dit aux paysans et écrit à certains, de ne pas mettre du fumier dans leurs champs au motif qu’il allait les viabiliser. Rappelons ici que n’eut été la mise en garde du maire par le Juge et le 1er adjoint au Préfet d’alors, les paysans n’allaient pas cultiver leurs champs.
Le maire Tounkara nie les faits….
C’est ainsi que, profitant d’une tournée du ministre en charge des logements de l’époque Mohamed Aly Bathily à Barouéli, 3 mois avant son départ du Gouvernement, les paysans ont interpelé celui-ci sur les agissements du maire. Tel a été l’étonnement des paysans et de ceux qui étaient présents à la rencontre quand le maire, assis au présidium avec le ministre et la Directrice régionale des domaines, a catégoriquement nié ce que les paysans lui ont reproché en disant qu’il n’est pas instruit et qu’il ne connait rien en la matière. Devant la directrice, le ministre Bathily a menacé de sanctionner le maire si les allégations se justifiaient. Cependant, ce jour là, la Directrice n’a pas placé un mot sur sa complicité avec le maire.
Le permis d’occuper à 410 000 FCFA….
Encore le 17 mars 2018 le maire convoque les conseillers communaux à une session extraordinaire avec un seul point à l’ordre du jour à savoir : « Fixation du prix de cession de la parcelle d’habitation du lotissement des Titres Fonciers (TF) N°291, 292, 293, 294, 295, 296, 297, 298 et 299 du cercle de Barouéli.
A l’ouverture de la session, comme pour influencer les conseillers communaux et les villageois, le maire commence par féliciter le ministre Bathily pour l’avoir aidé à trouver lesdits titres fonciers. Ce jour-là, selon les témoins, le maire a dit qu’il a acheté les 9 TF avec les services des domaines et qu’ils n’ont rien à avoir avec les propriétaires des champs présents dans la salle en tant qu’observateurs. Il va jusqu’à dire qu’il a acheté au comptant les TF avec les domaines de Ségou à plus de 300.000 F CFA les 400m2 et que la Mairie doit revendre la parcelle à 410.000 FCFA pour réaliser des bénéfices. Le maire oublie sinon ne sait même pas que les frais d’édilité pour les centres urbains et semi-urbains comme Barouéli sont estimés à 201.000 FCFA.
Après cette session, pendant presque chaque nuit de la semaine qui l’a suivie, son message passait à la radio SOUMPOU pour inviter les populations à venir payer l’argent contre reçu pour disposer d’un lot à usage d’habitation.
Des paysans dépossedés manu militari de leurs champs…..
Quant au Maître d’œuvre représenté par la Direction Régionale des domaines, assurément en réaction aux demandes du Maire, en date du 12 avril 2017, elle demande par une publication parue dans le quotidien national L’ESSOR N°18472 du mardi 25 juillet 2017 l’immatriculation concernant le cercle de Barouéli.
L’intitulé de la demande est ainsi libellée dans L’ESSOR : « Au livre foncier du cercle de Barouéli, suivant réquisition N°0030, déposée le 19 juillet 2017, le chef de Bureau des Domaines et du Cadastre de Barouéli, agissant au nom et pour le compte de l’Etat du Mali demeurant à Barouéli et domicilié à Barouéli, demande l’immatriculation au livre foncier du cercle de Barouéli, d’un immeuble urbain, consistant en une concession urbaine , d’une contenance totale de 07ha79a53ca situé à Barouéli, commune rurale de Barouéli, cercle de Barouéli, connu sous le nom de l’Etat du Mali et borné au Nord par une piste, au Sud par la parcelle B, à l’Est par une rue et à l’Ouest par une rue. Déclare que ledit immeuble urbain appartient à l’Etat du Mali et n’est à sa connaissance grevé d’aucuns droits ou charges actuels autres que ceux –ci détaillés à savoir un plan sur une échelle de 1/5000. Toutes personnes intéressées sont admises à former opposition à la présente immatriculation des mains du conservateur dans un délai de deux mois à compter de l’affichage du présent avis qui aura lieu incessamment en l’auditoire du tribunal de la Justice de Paix à Compétence Etendue de Barouéli. »
Voilà comment sont libellés les différents avis de demande d’immatriculation qui ont servi de documents de base et pour la Directrice régionale des Domaines et du Cadastre de Ségou et pour le Gouverneur sortant Georges Togo, aujourd’hui à la retraite, pour créer 09 titres fonciers respectivement les N° 291, 292, 293, 294, 295, 296, 297, 298, 299 pour une superficie totale de plus de 72 ha, objet de l’Arrêté N°1300/-GRS-CAB du 27 décembre 2017 soit seulement quatre jours avant son départ à la retraite.
Quels sont les paysans de Barouéli de surcroit illettrés à plus de 80% qui peuvent savoir que leurs champs sont concernés par ces avis ? Surtout des avis qui parlent d’immeuble urbain et non des champs….
Ces titres frauduleusement et illégalement créés par les services de l’Etat et non des moindres, concernent malheureusement tous sans exception des champs des populations de la ville de Barouéli, qui les cultivent depuis plus d’un siècle. D’ailleurs, on les appelle en bambara les SOFORO où il y a même des vergers et des Balanzans situés dans la zone réservée de la bande verte. Alors, dire que « ces immeubles urbains » (SOFORO) appartiennent à l’Etat du Mali et ne sont grevés d’aucuns droits ou charges actuels, il relève de la délation voire du mensonge grossier à l’effet tout simplement que de déposséder manu militari les paysans de leurs champs au nom d’un SDAU à l’origine mal conçu et d’ailleurs qu’ils ne connaissent même pas ni dans son élaboration, ni dans son application encore moins dans son suivi-évaluation.
Le fameux SDAU derrière lequel se cachent le maire, les services des domaines et l’administration, au 1er chef, le Gouverneur, est cependant très explicite dans son point 5.3, page 52 relatif au phasage où il est expressément dit : « les programmations du SDAU’ en ce qui concerne l’habitat, ont été classées en deux phases définie ci-après :
5.3.1 Phase I: 2002-2011. Cette phase concernera : la réhabilitation du tissu ancien ; l’aménagement de zones de recasement ; l’aménagement du 1/3 de l’habitat administré (19,15ha) et 1/3 de l’habitat planifié (10ha). 5.3.2 Phase II : 2012 – 2021. Elle concerne principalement l’aménagement des superficies restantes pour les deux types d’habitat : habitat administré 38,3 ha ; habitat planifié 20 ha »
Le Gouverneur Georges Togo dans la sauce…
Cependant, quand on prend les titres créés par le Gouverneur à la retraite, Georges Togo, sur expertise des services des domaines de Baraouéli et de Ségou, les titres 298 pour 7ha 15a 06ca et 299 pour 7ha 27a 65ca, concernent l’habitat existant alors que dans le SDAU, page 52, seul les zones de recasement, l’habitat administré et l’habitat planifié sont concernés par l’habitat.
Dans la même logique les titres n° 295 pour 6ha 87a 74 ca, 296 pour 7ha 5a 83ca et 297 pour 7ha 40a 98ca soit de 21 ha sont réservés aux zones de recasement dont l’aménagement est consécutif à la réhabilitation du tissu ancien (le noyau Gounoumba Madina et extensions) comme détaillé dans la stratégie sectorielle du SDAU au point 5.2.2 de la page 50 du document.
De l’approbation du SDAU en 2002 à nos jours, aucune action de réhabilitation du tissu ancien même en réflexion, n’a été menée au niveau de la Mairie de Barouéli exceptés les travaux de bitumage de la route Barouéli – Tamani où des habitations longeant le versant ouest de la voie N°8, ont été démolies et pour la compensation desquelles, le Gouvernement du Mali a affecté à la Mairie de Barouéli, à sa demande, le titre foncier N°73 du cercle de Barouéli d’une contenance de 14ha 73a 32ca objet du Décret n°2013-837/P-RM du 31 octobre 2013 comme souligné plus haut. Pour 14ha 73a 32ca, le Gouvernement du Mali a pris un décret mais pour plus de 72 ha, le Gouverneur Togo prend un Arrêté.
L’abus et de l’excès de pouvoir…
L’affectation de ce titre, contrairement aux faux titres montés de toutes pièces par des cadres véreux qui n’ont souci que leurs seuls intérêts, à fait le processus normal comme recommandé par la réglementation en la matière.
Alors que les plus hautes autorités de la région en occurrence le Gouverneur, s’évertue à dépêcher à Barouéli un impressionnant dispositif sécuritaire pour aller, sans même informer les populations, lotir les champs des paysans, relève de l’abus et de l’excès de pouvoir.
Biramou prépare sa retraite…. ?
Donc pourquoi ne pas croire aux dires du maire de Barouéli, qui, deux semaines avant l’intervention musclée des envoyés (armée) du Gouverneur, avait dit, selon les indiscrétions, à ses proches que celui-ci est décidé, advienne que pourra, à lotir les champs pour préparer sa retraite.
Ce comportement du Gouverneur a surpris plus d’un surtout au niveau du tribunal de Barouéli qui est saisis depuis mai 2018 par les propriétaires de champs par rapport à la volonté affichée du Maire de les déposséder de leurs terres de culture.
Courroucés par cette information, une délégation des propriétaires des champs est allée à Ségou pour rencontrer le Gouverneur qui se défend avec les faux TF, mais avec une lettre du Médiateur adressée aux propriétaires des champs suite à sa saisine par certains d’entre eux.
La lettre du médiateur…
Cependant, à la lecture de la lettre N° 494 du 05 sept 2018 du Médiateur de la République qui ne se réfère d’ailleurs que sur les seuls éléments de réponses fournis par le Maire de Barouéli, il est clairement dit ce qui suit : « …Par conséquent, je clos votre dossier en vous informant que ma décision de le clore est sans incidence sur votre droit d’exercer d’autres voies de recours autorisées par la loi. ».
Il faut souligner que le Médiateur ignorait que l’affaire était pendante devant la justice sinon selon son représentant, il n’allait jamais traiter le dossier conformément à leur principe.
Comme on vient de le démontrer le SDAU, très souvent évoqué par les services techniques et le Gouverneur, n’est même pas connu de ceux-ci ni dans sa programmation, ni dans sa mise en œuvre.
En réalité, le maire de Barouéli en complicité avec les services techniques des domaines et du cadastre de Barouéli et de Ségou sur la base du faux, ont embarqué les Gouverneurs Georges Togo et Biramou Sissoko.
Si le Gouverneur Biramou Sissoko, ce cadre valeureux, fin connaisseur des droits coutumiers et positifs, respectueux des us et coutumes du Mali en général et de celles des régions de Koulikoro et de Ségou en particulier, savait qui était ce maire de Barouéli, il n’allait jamais collaborer avec lui à fortiori lui confier des secrets.
Aujourd’hui, le maire dit à qui veut l’entendre que le Gouverneur est dans sa poche, mieux, il continue à prendre de l’argent avec les populations au motif qu’il est avec le Gouverneur. A suivre…
Habi Kaba Diakité
L’Enquêteur