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BOUBACAR BOCOUM, ANALYSTE POLITIQUE À PROPOS DE LA PRÉSIDENCE DE MACKY SALL À L’UNION AFRICAINE : « L’Afrique ne peut pas attendre grand-chose de quelqu’un qui est au service de l’occident »

Dans une interview qu’il a accordée au journal «  Nouvel Horizon »,  l’analyste politique Boubacar Bocoum a bien voulu donner ses impressions  sur la présidence du président Sénégalais Macky Sall à l’Union Africaine (UA) pour un mandat d’un an. Cet expert en politique a peu d’espoir en termes de changement que peut apporter le nouveau président de l’UA au continent Africain durant son mandat. En ce qui concerne le rôle de l’Union Africaine pour la résolution de la crise entre le Mali et les pays frères de la  , il pense que le Mali ne peut pas attendre grand-chose pour quelqu’un qui est au service de la France et qui dirige un pays qui fait partie des organisations sous-régionales qui l’ont sanctionné. Lisez donc !

Nouvel Horizon : Selon vous, que peut-on attendre de Macky Sall en tant que président de l’Union Africaine?

Boubacar Bocoum : Je pense qu’on ne peut rien attendre de Macky Sall parce qu’en réalité il n’est pas panafricaniste. Cette génération de chefs d’Etats qui sont les séquelles du mouvement démocratique, ne sont pas des panafricains, ne sont pas au service de leur peuple, c’est toute la difficulté de cette génération de chefs d’Etats qui, en réalité, ne sont pas suffisamment à l’écoute de leur peuple.

Nous sommes aujourd’hui dans une dynamique où effectivement depuis 1945, date de la création des Nations-Unies, on s’est retrouvé dans une posture où l’Afrique n’a pas sa place réelle dans le concert des nations. Aujourd’hui, il y a un combat économique qui fait que l’Afrique semble le continent qui regorge plus de ressources, plus de réserves est suffisamment exploité par l’occident. Et les règles de jeu ne sont pas équitables encore moins justes. Et ce combat, je ne pense pas que les chefs d’Etats aujourd’hui qui gèrent le continent soient suffisamment courageux pour mener ce combat de la libération du continent Africain. Alors je serai étonné avec les pays qui collaborent avec la France, qui sont sous emprise de la république Française qui ne sont pas inscrits pour la libération réelle du continent Africain, qui ne sont pas inscrits dans le panafricanisme réel, qui sont plutôt utilisés par le cartel bancaire financier mondial, donc, je ne suis pas sûr que ces gens soient ceux qui vont se battre pour la souveraineté de leur peuple.

Nouvel Horizon : Quels sont les défis que doit relever le président Macky Sall durant son mandat ?

Boubacar Bocoum : Les défis sont énormes. Ecoutez ! D’abord, l’Union Africaine est mal partie parce qu’aujourd’hui elle n’est pas un instrument assez fort pour imposer l’équilibre géopolitique, géostratégique à travers le mondeça c’est l’un des grands défis. Ensuite, tu as la guerre économique mondiale dans laquelle aujourd’hui, l’Afrique a un enjeu important. Malheureusement, la solidarité entre les chefs d’Etats se fait autour des politiques et sous l’emprise de la France mais cette fédération de Chefs d’Etats ne se fait pas dans l’intérêt réel du continent. Quand vous regardez nos Etats, vous allez voir que tous les investissements qui existent dans les Etats soient-disant moyennement développés. Vous prenez un pays comme la Côte d’ivoire ou le Sénégal, vous verrez que dans le fond, le capital n’appartient pas à la nation, ce sont les multinationales qui investissent de l’argent, donc vous avez un développement apparent qui n’est pas un développement qui n’est sur l’économie réelle.  Donc, cette économie artificielle fait que l’indice du développement humain est très bas. Du coup, les défis énormes auxquels l’Afrique est confrontée aujourd’hui, c’est comment relancer l’économie, c’est comment donner plein d’emplois aux jeunes, c’est comment intégrer les femmes dans le processus du développement économique, culturel et social. Voilà les enjeux essentiels qu’attend l’Afrique. Cela voudrait dire que si les chefs d’Etats s’inscrivent dans cette dynamiqueils seront obligés d’aller en conflit avecl’occident parce que le monde aujourd’hui, c’est la guerre des intérêts. Tous les pays du monde se font la guerre pour l’intérêt de leur communauté, pour l’intérêt de leur pays. Aujourd’hui, Nous avons des Etats qui sont très fragiles politiquement, ils sont dans un mécanisme démocratique qui n’est pas solide, ils sont dans un mécanisme économique extrêmement fragile. Tous nos Etats se reposent sur l’accompagnement des occidentaux, même l’Union Africaine est en grande partie financé de l’extérieur, ce qui est inadmissible. L’Union Africaine n’est pas indépendant. Je ne pense pas que ce groupe de chefs d’Etats soient une solution pour le combat de la libération de l’Africaine.

Nouvel Horizon : Sur le plan sécuritaire, pensez-vous que Macky Sall a les moyens pour ramener la sécurité en Afrique ?

Boubacar Bocoum : Je ne pense pas qu’il puisse apporter des solutions aux problèmes sécuritaires de l’Afrique. D’abord il faut chercher à connaitre les causes profondes de cette insécurité que notre continent connait aujourd’hui. Il faut comprendre que l’insécurité n’est pas locale, elle est globale. Donc, nous avons un système d’insécurité qui est transversal, qui ne touche pas à un seul pays. Tous les pays sont en réalité touchés par l’insécurité. Alors, de ce point de vue, l’analyse montre que l’insécurité à une cause. Cette cause c’est quoi ? C’est la guerre économique. Les mouvements extrémismes violents que vous appelez « djihadistes » ou vous appelez comme vous voulez, ne sont autre chose que les conséquences du capitalisme. Ce n’est pas nous qui avons instauré le capitalisme dans le monde, ce sont les puissances occidentales qui imposent le capitalisme. Si le capitalisme est un mode de gouvernance économique, forcement, le corollaire, c’est l’insécurité parce que vous ne distribuez pas correctement la justice, forcement vous avez des frustrations, forcément, vous avez des conflits. Donc, le conflit n’est pas contre un Etat, le conflit est systémique. Si le système n’est pas dirigé contre les Etats Africains, comment diriez-vous que Macky Sall et ses homologues puissent trouver des solutions à l’insécurité ? Ce n’est pas possible parce que l’insécurité est adossée au mécanisme économique. C’est pourquoi, tantôt je parle de guerre économique mondiale. Donc la guerre mondiale n’est plus une guerre où on prend des armes pour aller se tuer, la guerre a changé de forme, c’est une guerre économique. Alors, les Etats Africains n’ont pas assez d’instruments pour faire face à une telle guerre. Comment vous pouvez comprendre qu’en tant que continent qui a le plus de ressources,  peut-être le plus pauvre du monde ? C’est paradoxal, parce que, cette règle de justice, nous ne parvenons pas à l’imposer sinon aujourd’hui le combat qu’est en train de mener le Mali peut libérer l’Afrique parce que si nous parvenons à le réussir, l’Afrique sera libérée et les investissements vont appartenir aux populations, aux communautés locales et en ce moment les équilibres vont revenir et on va être présent sur le marché mondial.

Nouvel Horizon : Pour la résolution de la crise sociopolitique entre le Mali et la CEDEAO, que peut-on attendre de Macky  à la présidence de l’Union Africaine ?

Boubacar Bocoum : Je pense qu’en réalité, on ne peut pas attendre grand-chose de sa part. Tout ce qui se passe entre le Mali et l’organisation sous-régionale est orchestré par la France. La France est en rupture avec le Mali. Donc, on  ne peut pas attendre grand-chose pour quelqu’un qui est au service de la France. Si la crise va loin, on serait obligé d’aller sur deux axes : soit le Mali va se résoudre à créer sa propre monnaie soit l’Union Africaine fera tout pour négocier avec les chefs d’Etat de la CEDEAO pour que les sanctions tombent. Ça serait intéressant si Macky Sall pouvait engager ces négociations pour avoir un calendrier plus raisonnable et ça relèverait de l’intelligence de Macky Sall. Mais Malheureusement, il y a l’orgueil et l’égo qui fera que l’Union Africaine, la CEDEAO et l’UEMOA auront du mal à reculer, tout simplement parce qu’ils ont peur de se contredire eux-mêmes pour le risque de se décrédibiliser voire les institutions. Donc, ils sont entre le marteau et l’enclume. Dans tous les cas de figure, si on ne va pas à la table des négociations, le Mali va souffrir et les peuples de la CEDEAO vont souffrir. Mais à un moment donné politiquement, si le Mali ne veut pas être asphyxié et humilié, on fera très certainement créer notre monnaie qui doit être la monnaie Africaine pas la monnaie Malienne par simple raison que nous sommes panafricanistes. Et il y a une forte raison que cette monnaie soit solide car elle sera adossée à l’or. Et de ce point de vue, les autres Etats pourront se joindre au Mali plus tard parce que le Mali aurait été capable de quitter cet espace néocolonial. Le Mali aurait été cet Etat qui aurait pu créer un espace plus viable d’une économie réelle. Donc, nous ne sommes pas en train de dire que nous allons créer une monnaie pour être refermé et enfermé, c’est pour créer une monnaie qui va s’ouvrir à l’Afrique. Aujourd’hui, le Mali doit s’inscrire dans une logique de la souveraineté économique, monétaire et financière. Je pense que c’est le seul levier et c’est valable pour tous les pays Africains. À cet effet, la communauté internationale panique parce que si le Mali lui échappe, c’est l’ensemble de l’Afrique qui va s’échapper.

Nouvel Horizon : La date fixée sur la durée de la transition prendra fin le 27 février, À quoi faudra-t-il s’attendre à partir de ce jour ?

Boubacar Bocoum : On n’attend pas grand chose, parce que les partis politiques ne sont pas très actifs pour la simple raison que le pays est en crise. Alors, quand vous n’êtes pas dans une situation normale, forcement, tout le monde est uni pour défendre le pays. Ce qui fait que la classe politique n’est pas visible. Par conséquent, la transition sera prolongée malgré une éventuelle contestation de la classe politique.

MAMADOU SEKOU TRAORE 

NOUVEL HORIZON

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