Le 29 avril 2023, l’Unité de coordination du Projet régional d’amélioration des systèmes de surveillance des maladies en Afrique de l’Ouest Troisième phase (Redisse Ill) a émis l’appel d’offres n°ML-Redisse 3-Mali-334262-GO-RFB relatif à la fourniture de kits de prélèvement, de kits d’extraction et de kits moléculaires pour lequel l’Entreprise BIO-Mali Services a soumissionné.
Suivant la lettre n°0154/MSDS-SG-Redisse 3 en date du 9 juin 2023, le coordinateur du Projet Redisse III a notifié à l’Entreprise Bio-Mali Services son intention d’attribuer le marché à l”Entreprise BGL Sysmet SARL pour un montant de 261 195 000 F CFA ;
Par le même courrier, le coordinateur du Projet Redisse III a indiqué à l’Entreprise Bio-Mali Services que son offre a été rejetée au motif qu’elle n’est pas la moins disante des offres jugées substantiellement conformes aux dispositions du DAO.
Par lettre datée du 14 juin 2023 et reçue le 16 juin 2023, l’Entreprise Bio-Mali Services a transmis à l’autorité contractante un recours gracieux pour contester les résultats de l’appel d’offres, en arguant notamment que l’attributaire provisoire (BGL Sysmet SARL) n’a pas fourni dans son offre la copie de l’autorisation d’importation et de vente de produits pharmaceutiques en cours de validité délivrée par les autorités compétentes du Mali comme l’exige l’IS 11.1 du DAO.
Par lettre n°162/MSDS-SG-Redisse3 du 22 juin 2023, le coordinateur du Projet Redisse III, a rejeté le recours gracieux introduit par l’entreprise Bio-Mali Services.
Non satisfait de la suite réservée à son recours gracieux, le 23 juin 2023, l’Entreprise Bio Mali Services a saisi le Comité de règlement des différends (CRD) pour contester les résultats de cet appel d’offres.
Les conditions de forme remplies
Dans son “jugement”, le CRD a tout d’abord rappelé les dispositions des articles 120.l, 120.2, 120.3, et 121.1 du décret n°2015-0604/P-RM du 25 septembre 2015 portant code des marchés publics et des délégations de service public, modifié.
Partant de là, considérant qu’il résulte des faits exposés que le 16 juin 2023, l’entreprise Bio-Mali Services a exercé un recours gracieux contre les résultats de l’appel d’offres et qu’une suite défavorable a été réservée à ce recours le 22 juin 2023 ;
Considérant que le 23 juin 2023, la requérante a saisi le CRD d’un recours en contestation et ce, dans les deux (2) jours ouvrables conformément aux articles 120 et 121; Il conclut que le recours de l’entreprise Bio-Mali Services remplit les conditions de forme pour être recevable.
Après cette victoire, qu’en est-il de la demande de suspension de la procédure d’attribution du marché ?
Pour soutenir son recours, en annulation, l’entreprise Bio-Mali Services a développé les arguments suivants :
Qu’elle a dénoncé l’intention d’attribution du marché à BGL Sysmet SARL pour n’avoir pas respecté une disposition substantielle du DAO, en l’occurrence l’IS 11.1 exigeant des soumissionnaires la fourniture de l’autorisation d’importation et de vente des produits pharmaceutiques en cours de validité délivrée par les autorités compétentes du Mali.
Que dans sa réponse, l’autorité contractante estime que toute personne peut déposer une soumission lorsqu’il s’agit des ressources de la Banque, alors qu’elle a délibérément choisi de se conformer au code des marchés publics du Mali en prenant l’avis juridique de la DGMP DSP avant le lancement du DAO.
Que ledit choix justifie largement la rédaction de l’IS 11.1 du DPAO ainsi libellé : “l’autorisation d’importation et de vente de produits pharmaceutiques en cours de validité délivrée par les autorités compétentes du Mali”.
Que cette disposition tient son fondement de la loi n°85-41/AN-RM portant autorisation de l’exercice privé des professions sanitaires et des dispositions des articles 34 et 37 du décret n°91-106/P-RM portant organisation de l’exercice privé des professions sanitaires en République du Mali.
Qu’en outre, le NB de l’IS 11.1 stipule que la fourniture en copie originale ou en copie certifiée conforme à l’original des pièces administratives (dont l’autorisation et l’importation de vente) demandées ci-dessus est obligatoire. Faute de quoi l’offre peut être rejetée.
Que dans le cas d’espèce, le soumissionnaire BGL Sysmet SARL a joint à son offre une autorisation délivrée par les autorités compétentes du Bénin.
Que les dispositions des articles 26 et 30 de l’arrêté interministériel n°05-2203/MS-MEP-SG du 20 septembre 2005 déterminant les modalités de demande des autorisations de mise sur le marché (AMM) des médicaments à usage humain et vétérinaire, et celle de l’arrêté interministériel n°2015-1535/MCI-MEF-SG du 5 juin 2015 fixant la liste des produits prohibés à l’importation et à exportation soumettent l’importation des médicaments et dons de réactifs de laboratoire à l’autorisation du ministère en charge de la Santé du Mali.
Que ces textes sont suffisamment clairs et précis pour laisser une possibilité d’appréciation de leur pertinence à un quelconque acheteur (Redisse 3) ou vendeur (BGL Sysmet SARL) de produits pharmaceutiques en République du Mali.
Qu’une disposition substantielle du DAO n’ayant pas été respectée par le soumissionnaire BGL Sysmet SARL, elle sollicite du CRD de bien vouloir suspendre la procédure de l’appel d’offres en cause et de disqualifier purement et simplement l’offre de l’attributaire provisoire.
Les réponses du contractant
En réponse aux observations de la requérante, le Projet Régional d’Amélioration des Systèmes de Surveillance des Maladies en Afrique de l’Ouest Troisième phase (REDISSE III) soutient ce qui suit :
Qu’en vertu de la clause 4.3 des IS, un soumissionnaire peut, sous réserve des dispositions de l’article 4.7 des I.S, avoir la nationalité d’un pays quelconque éligible aux ressources de la Banque.
Que par conséquent, aucune disposition du DAO ne devrait constituer une entrave à cette règle sous peine de nullité.
Que concernant les points spécifiques soulevés, il convient de noter : que l’article 26 de l’arrêté interministériel n°05-2203/MS-MEP-SG du 20 septembre 2005 déterminant les modalités de demande des autorisations de mise sur le marché (AMM) des médicaments à usage humain et vétérinaire dispose que les réactifs de laboratoire d’analyse de biologie médicale, tel que définis à l’article 30 du même arrêté, sont assujettis à un contrôle à l’importation sans être soumis à une demande d’AMM ; que l’IS 11.1 (j) des DPAO figurant à la section II du DAO requiert que soit, entre autres, jointe à l’offre “l’autorisation d’importation et de vente de produits pharmaceutiques en cours de validité délivrée par les autorités compétentes du Mali”. Le même alinéa fait bien noter que la non-fourniture des pièces administratives demandées peut motiver le rejet de l’offre. Il y a lieu, dès lors, d’en déduire que le rejet n’est pas systématique mais une possibilité laissée à l’appréciation de l’acheteur.
Que les fournitures à acquérir étant des réactifs de laboratoire d’analyse et à la lumière de tout ce qui précède, l’absence, dans toute offre, d’autorisation d’importation a été jugée par l’acheteur d’omission mineure ne motivant pas, à elle seule, le rejet de l’offre.
Le CRD décide…
Pour rendre son verdict, le CRD a encore rappeler les dispositions du décret n°2015-0604/P-RM du 25 septembre 2015, modifié, portant code des marchés publics et des délégations des services publics dans ses articles 24, 25.1, 3.1 ; 3.2 ainsi que la clause 11.l (j) des données particulières de l’appel d’offres (DPAO), et l’article 26 de l ‘arrêté interministériel n°05-2203/MS-MEP-SG du 20 septembre 2005.
Considérant que la requérante estime que l’offre de BGL Sysmet SARL (l’attributaire provisoire) aurait dû être écartée par l’autorité contractante dans la mesure où, celle-ci n’a pu fournir dans son offre qu’une autorisation d’importation et de vente de produits pharmaceutiques en cours de validité délivrée par les autorités compétentes du Bénin.
Considérant que l’article 3.1 du code des marchés publics dispose que les procédures de passation des marchés publics et des délégations de service public, quel que soit le montant, sont soumises à des principes dont notamment “l’égalité de traitement des candidats, la reconnaissance mutuelle”. Que l’article 3.2 du même code précise que toute mesure ou disposition fondée sur la nationalité des candidats de nature à constituer une discrimination à l’encontre des ressortissants des Etats membres de l’Uémoa est prohibée.
Considérant que ces dispositions impliquent notamment que les Etats membres de l’Uémoa s’accordent à priori du crédit en ce qui concerne les formalités de production des pièces administratives requises de la part des candidats ou soumissionnaires aux marchés publics de l’espace communautaire.
Considérant que les ressources servant à financer le marché querellé sont allouées par la Banque mondiale suivant un accord de don.
Considérant qu’à cet effet, les dispositions de la clause 4.3 des Instructions aux soumissionnaires du DAO stipulent qu’un soumissionnaire peut avoir la nationalité d’un pays quelconque éligible aux ressources de la Banque mondiale.
Considérant que la procédure de passation du marché en cause est soumise à la revue à priori de la Banque Mondiale et non de la Direction générale des Marchés publics et des Délégations de service public.
Qu’à ce titre, la Banque a donné son avis de non-objection sur le rapport d’évaluation des offres pour l’attribution du marché en entérinant notamment le choix de l’attributaire provisoire, l’entreprise BGL SYSMET SARL.
Qu’au regard de ce qui précède, il convient de déclarer que la décision de l’autorité contractante est justifiée.
Par conséquence, le CRD déclare le recours de l’entreprise Bio-Mali Services recevable en la forme ; dit que le recours de l’entreprise Bio-Mali Services est mal fondé ; et ordonne la poursuite de la procédure d’attribution du marché en cause.
Rappelons que la délibération a eu lieu le lundi 3 juillet 2023 sous la présidence d’Alassane Ba du CRD.
El Hadj A.B. HAIDARA