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Belmokhtar, le terroriste algérien installe son QG en Libye

-Les leaders du terrorisme en Afrique du nord -Belmokhtar comme une bonne partie des terroristes qui ont prêté allégeance à Daesh)- ont aujourd’hui entre 40 et 50 ans : Une génération connue depuis la décennie noire. Comme expliquer qu’elle soit arrivée, sans être réellement inquiétée, à s’internationaliser ?

Mokhtar Belmokhtar, also known as 'the one-eyed',  who broke away from Aqim to form al-Mulathamin

27 ans, Mokhtar Belmokhtar s’était déjà fait un nom. Il avait à son actif plusieurs actions dans le sud algérien, au Niger, au Mali et il avait déjà tissé un important réseau dans les pays de la sous-région. Aujourd’hui, il en a 42, un âge où dans l’ordre des choses, quand on a des qualités de leader, à défaut de devenir chef, on évolue au moins dans la hiérarchie. La configuration géographique du sud algérien et du Sahara dans son ensemble, couplée au contexte politique qui a prévalu ces vingt dernières années dans la région lui a été très favorable. Le sud algérien est immense et en dépit de la forte présence des forces de sécurité algériennes, il est très difficile de le sécuriser entièrement, à moins de placer un soldat tous les kilomètres, ce qui est impossible. Si l’on ajoute à cela, l’indigence et la faiblesse des forces armées et de sécurité des pays situées sur les frontières australes de l’Algérie et leur degré de corruption, on comprend encore mieux comment Belmokhtar a pu développer ses actions dans la région. Il n’aurait pas pu faire la même chose s’il avait été basé sur les autres frontières est et ouest de l’Algérie.

Les régimes tunisien et marocain veillent mieux au grain, même si un moment le Maroc a été tenté d’instrumentaliser certains leaders djihadistes, en les accueillant ou en les laissant utiliser son territoire pour s’approvisionner en armes dans le but de forcer Alger à changer de politique dans le dossier du Sahara Occidental, que Rabat dispute aux indépendantiste sahraouis du Front Polisario, réfugiés dans le sud-est algérien. Cela dit, comme tous les islamistes armés, Belmokhtar a toujours été surveillé en Algérie et dans les pays voisins. Il aurait même été approché par les services algériens pour obtenir reddition. Dans une de ses rares interviews disponibles, lui-même laisse entendre, même s’il nie tout contact direct avec ces mêmes services. Il aurait finalement décliné la proposition, officiellement parce qu’il ne voyait aucune raison de se soumettre à un Etat qui ne se soumet pas à la «loi d’Allah», selon ses propres dires, mais peut-être aussi parce qu’il n’était pas rassuré par les conditions proposées par les Algériens.

-Selon un responsable politique que vous citez, son surnom de Mister Marloboro ne repose sur rien, Belmokhtar étant avant tout un islamiste pur et dur. Ce surnom aurait même été inventé par les services algériens.

Je traversé la région de bout en bout depuis de très longues années. Les témoignages disent tous la même chose. Il a traficoté, mais jamais des cigarettes ou de la drogue. En revanche, il a fait dans la contrebande de produits alimentaires et de carburant subventionnés en Algérie, vendus dix fois plus chers dans toute l’Afrique de l’Ouest. Il a aussi commis et commandité des braquages dont le dernier en date était celui de la recette du port de Nouakchott. Le portrait le plus juste ? C’est un islamiste fondamentaliste persuadé d’être investi d’une mission divine. Pour utiliser un mot plus simple, c’est un fanatique pur et dur. Que les services algériens ou mauritaniens lui donnent cette réputation de trafiquant est de bonne guerre.

-Vous ne parlez pas de sa rupture avec Droukdel, qui pourtant, l’appréciait beaucoup. Sa dissidence obéit-elle à une rupture idéologique ou à son ambition d’être un leader ?

A des raisons d’égo et de leadership ! Belmokhtar considère qu’il est le plus ancien chef djihadiste dans le Sahara et que cela lui donne toute légitimité pour devenir Emir de tous les groupes dans la région. Or il a vu des hommes arrivés bien plus tard que lui dans cette région, intronisés Emirs du Grand Sahara, comme Nabil Makhloufi ou Yahia Abou El Hammam, et des compagnons, comme Abou Zeid, plus écoutés que lui par le commandement central. Il n’a jamais digéré cela. D’où le fait que ces dernières années, il a choisi de jouer les électrons libres.

Dans les lettres retrouvées à Tombouctou après le départ des islamistes suite à l’intervention militaire française Serval, lancée en janvier 2013, on voit que la direction d’Al Qaida au Maghreb islamique (Aqmi) lui reproche de ne pas assister aux réunions, de ne pas répondre aux appels téléphoniques et aux lettres. Pendant l’occupation par les djihadistes du nord du Mali, Belmokhtar n’étaient d’ailleurs pas dans la même région que ses anciens amis d’Aqmi dont la base était Tombouctou. Il était parti s’installer à Gao en s’alliant avec une autre dissidence d’Aqmi, le Mouvement pour l’unicité et le jihad en Afrique de l’Ouest (Mujoa). Combinée à ses liens notoires avec les djihadistes nigérians de Boko Haram, cette alliance avec le Mujao montre d’ailleurs que son ambition allait au-delà du Sahara. Il voulait sans doute devenir émir d’Al Qaida pour toute l’Afrique.

-Selon des sources sécuritaires, il se trouverait aujourd›hui en Libye et aurait déjà échappé à plusieurs embuscades. Que sait-on de ses réseaux en Libye ? Sa capacité de nuisance est-elle réelle : s›appuie-t-elle sur des effectifs importants, des moyens ?

Belmokhtar a un signe particulier qui le distingue. Il est borgne et porte un œil artificiel. Sa prothèse oculaire le rendant facilement identifiable, il est quasi-certain qu’il n’est ni dans le nord du Mali, ni dans le Sud algérien. Des régions où les forces françaises, leurs alliés africains, et l’armée algérienne sont très nombreuses et multiplient les patrouilles. Belmokhtar a vingt ans de présence dans le Sahara, vingt ans de réseaux, vingt ans de recrutements et c’est un homme très intelligent. Le plus probable est qu’il ait trouvé refuge dans une zone où il sait qu’il est très difficile de le trouver et où il dispose de protection. Le seul coin au monde à sa portée et où il peut trouver de telles facilités, c’est la Libye, où ses amis sont très nombreux et contrôlent des régions entières.

Dans les années 1990-2000, de nombreux libyens partisans d’Al Qaïda, traqués par Kadhafi, avaient trouvé refuge chez lui, au nord du Mali. Même si l’intervention française au nord du Mali et le tour de vis des Algériens ont forcément eu un impact sur ses effectifs, qui, avant Serval, devaient se chiffrer à quelques centaines de djihadistes, il a encore des hommes derrière lui. Il a toujours été très proche de ses combattants sur lesquels il a beaucoup d’ascendant. Il a su tisser des liens avec les notabilités locales, et les gens témoignent même que ses hommes avaient, au nord du Mali, des relations presque normales avec la population. J’ai même trouvé à Gao des marchands qui disaient le trouver très avenant. Belmokhtar est sans conteste le leader le plus charismatique du Sahara, ce que ne sera jamais Yahia Abou El Hammam, ce que n’a jamais été Abou Zeid, froid et suspicieux.

source : alwihdainfo.com

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