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AU REBOND: LES CONQUERANTS

Les Aiglons ont séduit par l’esprit et par la manière. Ils ont surtout rappelé que résultat et spectacle sont conciliables

 

Le plaisir. Plus que toute autre motivation, c’est certainement la recherche de cette sensjoueur footballeur equipe cadets aiglonsation rare qui a constitué la motivation principale des phalanges d’irréductibles, de tous ceux qui se sont levés très tôt ou ont veillé très tard pour suivre le parcours des Aiglons en Nouvelle-Zélande. Plaisir bien sûr irremplaçable de voir notre sélection passer l’obstacle d’adversaires à priori mieux armés et prestigieux comme le Ghana et l’Allemagne. Mais surtout plaisir de voir que la victoire s’acquiert chaque fois sur le talent évident des acteurs et sur une philosophie de jeu constamment appliquée, quelque soit l’adversaire et quelle que puisse être la tournure prise par la rencontre.
Les Aiglons ont toujours eu le souci de la relance propre, de la remontée collective du ballon, du décalage intelligent et de la dernière passe juste. La pression de l’adversaire – cela s’est produit contre l’Allemagne et contre la Serbie – les a souvent amenés à déjouer et à courir derrière leurs repères perdus. Mais jamais on ne les a senti prêts à abandonner un style qui fait leur force pour se ruer aveuglément à l’abordage ou pour se tourner vers un football plus calculateur.
En les regardant jouer, on se dit que pour arriver à cette qualité de jeu collectif et à cette confiance en leurs atouts, il leur faut absolument deux facteurs. Tout d’abord, un état d’esprit exemplaire. Au football, les vérités irréfutables sont les plus simples. Les spécialistes affirment qu’une équipe joue comme elle s’entraîne. Personnellement nous pousserions un peu plus loin ce jugement en insistant sur le fait qu’un collectif évolue sur le terrain de la manière dont il vit en dehors. Nos supporters le savent bien, eux qui ont assisté au passage « blanc » d’une des générations les plus talentueuses qu’ait produites le football malien, celle des Seydou Kéita, Djila, Momo Sissoko, Kanouté et Police. Le groupe était taillé pour au moins disputer une finale de CAN et obtenir une qualification pour une Coupe du monde. Il n’a réussi aucun de ces programmes minimums. Etrangement, en qualité pure de jeu, le meilleur parcours de ce collectif fut celui réussi à Tunis en 2004, à un moment où aucun des futurs Grands ne se prenait encore pour un patron.
Par une cruelle ironie de l’histoire, l’émergence de la « dream team » des années 2000 a aussi constitué son apogée. Les Aigles ont ensuite piétiné et décliné, victimes de la bataille des egos et de la rivalité des clans. Le groupe ne vivait pas bien ensemble et on ne ressentait plus en son sein l’extraordinaire solidarité qui était la sienne à Tunis et que dégagent aujourd’hui les Aiglons. Pour que la sélection malienne des U20 revienne dans la partie après avoir été bousculée par l’Allemagne et littéralement asphyxiée par la Serbie, il lui fallait en effet être animée d’une exceptionnelle volonté de s’en sortir collectivement. C’est cette volonté qui lui a permis de ne pas s’attarder sur les erreurs individuelles de certains de ses éléments, de compenser le passage à vide de joueurs majeurs, et de ne pas se déliter après l’expulsion de l’un de ses meilleurs joueurs.
La détestation de la défaite. Le second facteur que nous aimerions évoquer est le rôle de l’entraineur. Reconnaissons-le, Fanyiri Diarra n’est certainement pas de tous nos coaches le plus facile à vivre. Ses manières légèrement rugueuses et son langage direct en ont certainement égratigné plus d’un. Son attachement à ses choix tactiques et de joueurs a tendance à prendre par certains moments la forme d’un irritant entêtement. Mais ce que on ne pourra jamais lui dénier, ce sont ses qualités de technicien scrupuleux, rigoureux et exigeant. Ce sont ces vertus qui lui ont certainement permis de tirer les leçons du parcours mi-figue, mi-raisin de ses protégés à la CAN de la catégorie d’âge. Même s’il ne faut pas oublier qu’en demi-finale, le Mali fut victime d’erreurs d’arbitrage inadmissibles à un tel niveau de compétitions.
Pour ceux qui voudraient amoindrir son mérite dans le jeu pratiqué par les Aiglons, rappelons qu’un sélectionneur national ne dispose pas d’une grande marge d’innovation tactique, vu la brièveté des stages de regroupement. Le principal mérite des « tecnicos » les plus avisés est donc d’avoir l’humilité de ne pas chercher absolument à réinventer la roue. Et l’intelligence de savoir tirer le meilleur du travail fait par les entraineurs de club sur les joueurs et de choisir ces derniers en conséquence. Quitte parfois à faire reposer sur un club l’ossature, donc le style de l’équipe nationale.
Par contre, ce qu’un sélectionneur doit absolument réussir à son niveau tout personnel, c’est de faire adhérer les joueurs à ses convictions de jeu. A cet égard il était intéressant d’écouter la réponse faite par Fanyiri Diarra à un de nos confrères de RFI qui à 24 heures du match l’interrogeait sur la capacité qu’auraient les Aiglons à se mobiliser pour la petite finale. « Il y a une place à prendre sur le podium et nous irons la chercher. On ne peut faire tout le travail que nous avons abattu et ne pas se battre pour le podium », avait lancé de manière péremptoire le coach qui a refusé de considérer la (folklorique) recherche d’une revanche sur le Sénégal comme un facteur principal de motivation.
Dans sa vie de joueur, Fanyiri était un défenseur qui ne lâchait rien et un infatigable contrattaquant. C’est cette implication permanente dans le jeu et cette détestation de la défaite que l’on a retrouvées dans sa sélection. Cette dernière, tout comme son coach, a du caractère. Par les temps qui courent, ce n’est pas la chose la plus répandue dans le football. Celui-ci foisonne en revanche de gagnants à la petite semaine qui s’évertuent à faire croire que seul importe le résultat. Fort heureusement, la réalité finit généralement par donner tort à ces épiciers du ballon rond. Dans les grandes compétitions internationales de ces vingt dernières années, que ce soit en sélections ou en clubs, la désillusion n’a certes pas épargné les faiseurs de spectacle. Mais la consécration n’est jamais venue aux minimalistes. Souhaitons donc à nos Aiglons les beaux jours qu’ils méritent.

G. DRABO

source : L’Essor

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