Le divorce est désormais consommé entre la société Yattassaye et Fils et le gouvernement. Le mariage scellé entre les deux parties aura duré 12 ans, jour pour jour, au cours desquels ladite société fabriquait et fournissait les plaques d’immatriculation standardisées des véhicules et engins à moteur. Les deux parties faisaient bon ménage jusqu’au jour où le gouvernement a découvert que ses droits ne sont pas versés. Le ministère de l’Equipement et des transports, adjudicataire du marché, a attendu la fin du contrat pour agir. Au forceps, la société entendait reconduire tacitement le contrat. L’Etat lui, s’est focalisé sur le droit pour lancer un nouvel avis d’appel d’offres. Le bras de fer est devenu inévitable.
Il faut remonter à 1996 et au contrat signé entre l’Etat et la société Yattassaye et Fils pour comprendre cette affaire qui a pris des tournures rocambolesques. En effet, la société Yattassaye a anticipé sur les délais en commençant à produire les plaques d’immatriculation des véhicules et engins à moteur, objet du contrat sans être en possession de l’agrément. Première faute.
Cinq ans après la signature de l’agrément (2001), Yattassaye et Fils entame la fabrication et la fourniture desdites plaques. Il ressort d’un constat général fait par les services techniques de recettes du gouvernement que la société Yattassaye n’a versé aucune quotte part à l’Etat nonobstant les observations émises. Deuxième faute. Pis, l’Etat attend toujours ses droits conformément aux clauses libératoires.
Le Rubicon a été franchi avec l’inobservation des règles édictées par l’article 4 de la convention qui dispose qu’un nouvel appel d’offres peut être lancé à la fin du 2e contrat qui courait jusqu’en 2008. Mieux, il n’était pas précisé qu’un tel contrat était reconduit tacitement. Alors question : De quel droit s’arroge la société Yattassaye et Fils pour fabriquer de nouvelles plaques pendant que le contrat est arrivé à terme ? Les dés sont jetés. Troisième faute.
L’équation était de savoir si le gouvernement n’avait pas droit à lancer un nouvel appel d’offres à la fin du contrat. L’Etat étant une continuité, la justice a émis un avis favorable dans ce sens, selon nos informations, suite à une requête de Yattassaye et Fils. Cette société est-elle au-dessus de la loi ?
L’Etat devant les tribunaux
Malgré les fautes commises et la clémence d’un gouvernement compréhensif, la société Yattassaye et Fils a esté une action en justice pour astreindre le gouvernement à lui octroyer le marché très juteux des plaques d’immatriculation et avec tous les problèmes qui y étaient inhérents car beaucoup de clients se plaignaient de la manière de faire de « la société de Père à Fils ».
En l’absence d’un règlement à l’amiable, précise l’article 22, la partie concédante, en cas d’insatisfaction, peut se référer au règlement judiciaire des litiges. Puisque l’Etat n’a pas accepté le principe de la reconduction tacite, toute chose qui n’était pas prévue dans le 2e contrat, la société Yattassaye et Fils a donc porté l’affaire devant les tribunaux. En la forme, la requête a été acceptée. Mais au fond, la Cour suivant arrêt N°335 du 24 octobre 2013 a précisé que le contrat de concession entre la société Yattassaye et Fils et l’Etat a pris fin le 04 octobre 2013. Selon l’auguste Cour, la société a présenté un document attestant être entrée en possession de l’agrément en 2001. Et les 12 années indiquées dans les clauses de la convention signée en 1996 prévoyait une première phase d’une durée de 7 ans reconductible pour 5 ans. Où est donc l’ambigüité ?
Le nouvel appel d’offres du ministre
Le gouvernement a véritablement agi dans la légalité dans cette affaire au regard des allégations de la société, mais surtout de la décision judiciaire du 13 octobre. Par conséquent, l’attribution par le ministère de l’Equipement et des transports du marché relatif à la fabrique et à la fourniture des plaques d’immatriculation a obéi aux règles de l’orthodoxie régissant en la matière les appels d’offres. En aucun moment, le gouvernement n’a outrepassé ses pouvoirs. Et toutes nos démarches pour en savoir davantage auprès de la société Yattassaye se sont avérées infructueuses.
Au regard de tout ce qui précède, le ministre Abdoulaye Koumaré s’est mis à équidistance entre la société et le contrat qui guidait leur relation. Il n’a jamais abusé de son pouvoir. Un bel exemple comportemental. Tout en protégeant les intérêts du gouvernement, il a mis en avant l’intérêt général des populations maliennes en procédant à un nouvel avis d’appel d’offres. Comme pour dire qu’il y a bien continuité de l’Etat.
Issiaka Sidibé
SOURCE: Le Matinal