Il a profité de la position privilégiée de son service employeur pour arnaquer les responsables d’une entreprise de la place. Mais finalement ce fut à ses dépens
Nous le désignerons par ses initiales G D. En milieu de semaine dernière, il a été jugé en cour d’assises pour son implication dans une affaire de d’«escroquerie, faux et usage de faux », une infraction prévue et punie par les dispositions des articles 275, 102, et 104 du code pénal pouvant donner lieu à des peines criminelles. Le récit.
C’était en 2016. à l’époque, GD est chauffeur dans une importante structure de l’état. Avec le temps, il n’a pas tardé à se muer en « Homme d’affaires » au sein de sa structure employeuse. Ainsi ce fonctionnaire de l’état traitait avec des « Gros Bonnets » du monde du commerce. Notamment le gérant d’une importante société de la place avec qui, il était parvenu à décrocher un contrat pour une prestation de service au profit de son service employeur. Apparemment, ce qui semblait être une affaire sérieuse et importante, n’en était pas une en réalité. Elle sentait le souffre. La cause. Le chauffeur a mis sa position à profit pour imaginer et exécuter une histoire d’escroquerie en écriture.
GD a réuni toutes les conditions pour convaincre le gérant de la société concernée afin de l’amener à signer un faux contrat. Selon les termes dudit contrat, son « partenaire » devait fournir son service employeur en matériels bureautiques. Bref, durant un bon moment, GD est parvenu, en usant de fausses signatures du DAF de sa structure, à appâter son « partenaire », pour lui soustraire plusieurs dizaines de millions de Fcfa. En outre, il s’est avéré qu’il usait des mêmes faux procédés pour l’achat de pièces de rechange de véhicules au compte de la même structure.
Il semble que ce chauffeur téméraire, s’arrangeait toujours à établir des faux documents accompagnés de fausses signatures, imitées de la directrice administrative et financière de son service employeur pour parvenir à ses fins. En somme, GD se retrouvait toujours avec des sommes colossales estimées à plusieurs dizaines de millions de Fcfa. Cela au nom de son service employeur et au détriment de la société dont les responsables l’ont convoqué devant les juges.
Le pot aux roses ne tardera pas à être découvert lorsque les dirigeants de ladite société procédèrent à une vérification plus approfondie de l’affaire qui les unit au service employeur de GD, à travers celui-ci. Mais avant, il s’est trouvé que dans la foulée, ils avaient effectué de nombreuses sorties d’argent liquide dans le cadre de leur partenariat avec GD. C’est en fouillant qu’ils se sont rendus compte que l’homme ne faisait que fournir de faux documents accompagnés de fausses signatures.
Dans un premier temps, ils ont tenté de régler le problème à l’amiable. Ils ont proposé au chauffeur transformé en homme d’affaires de leur restituer la somme qu’ils avaient préalablement déboursée, une somme estimée à plus de 300 millions de Fcfa. Incapable de rembourser même une infime partie de cet argent, l’escroc a préféré s’enfuir pour disparaître dans la nature.
C’est comme cela que les responsables de ladite société ont décidé de le poursuivre devant les juges pour le faire payer de sa fausseté. Recherché et retrouvé, il a été inculpé et conduit devant les juges. Habillé en pantalon Jean assorti d’un pull-over face aux jurés, à la barre, l’homme a reconnu partiellement les faits qui lui sont reprochés. Il a expliqué les circonstances dans lesquelles il a rencontré le gérant de la société victime. Avant d’ajouter qu’il s’employait toujours à y faire parvenir des « bons marchés » venant de sa structure employeuse. Autrement dit, des marchés qu’ils qualifiaient à l’époque de juteux.
Dans ses explications face aux juges, GD tentait toujours de donner l’impression qu’il faisait des efforts pour « aider » les responsables de la société à obtenir des marchés juteux auprès de son service employeur. Mais au delà, l’accusé évitait soigneusement d’évoquer les intérêts que lui-même percevait en amont. Surtout la façon dont il usait pour obtenir des gains, sur ce que lui-même a qualifié de « marchés juteux ». Ainsi, face aux salves de questions des jurés, tantôt il essaie de faire l’incohérent dans ses propos, tantôt il rejette la responsabilité des faits sur le dos du gérant de la société victime, actuellement en prison.
Cette attitude amena le président de la cour à lui poser la question de savoir si toutefois il a signé des documents, ou effectué des décharges quelconques en lien avec leur partenariat. « Je n’ai jamais signé un document. J’ai juste fait parvenir des bons », a-t-il brièvement affirmé, avant d’ajouter qu’il faisait de temps à autre des courses pour le gérant de la société. D’où sa participation dans cette affaire. à partir des explications avancées par l’accusé, tout laisse à penser qu’il entretenait des liens étroits avec le gérant fautif.
Bombardé de questions de toutes parts, l’accusé qui semblait être à bout de souffle, a soutenu du bout des lèvres qu’il a été induit en erreur. C’est comme cela qu’il a avoué n’avoir reçu que trois millions de la part de son complice gérant de l’entreprise victime. Somme qui lui aurait été gracieusement offerte par celui-ci, en guise de motivation. GD a ainsi rejeté en bloc sa participation dans la perte de centaines de millions dont le dossier fait cas.
Visiblement mouillé jusqu’au cou, comme on le dit, le chauffeur mué en homme d’affaires n’a pu convaincre les jurés de sa non-participation dans le dossier qui l’incrimine. En somme, l’inculpé semble avoir penché du côté du mensonge en essayant d’écarter avec malice, la réalité des faits.
Faits qui, vu le dossier dans son ensemble, l’accablent de toutes parts. Les juges sont allés jusqu’à le confronter à certaines de ses signatures apposées au bas du fameux contrat qui le liait à la société victime. Et à chaque fois, il oppose la négation systématique de sa participation dans les faits. Pis, l’homme n’a même pas pu expliquer de façon claire et détaillée l’acquisition des trois millions qu’il dit avoir reçu en guise de motivation. à certaines questions de la cour, il préférait le silence comme réponse. « Le silence aussi est une forme de réponse », a rappelé l’avocat général qui met fin à ses questions à l’endroit de l’accusé.
La partie civile est convaincue que GD a escroqué la société qui l’a fait comparaître devant les juges. Sans vouloir entrer dans certains détails, elle a estimé la totalité de la somme perdue dans cette affaire à un demi-milliard de Fcfa. C’est au vu de l’énormité de la somme que le président de la cour a qualifié les responsables de la société d’amateurs.
Des responsables qui ont manqué de professionnalisme dans l’acquisition d’un marché. Toutefois, la culpabilité de l’accusé a, en fin de compte, été établie. La cour l’a ainsi condamné à 3 ans de prison ferme. En outre, il doit s’acquitter de la somme de 321 millions Fcfa comme dommages et intérêts.
David Sacko
Source : L’ESSOR