A quoi tient l’intégrité d’un Etat, même le plus puissant d’entre tous ? A quoi a tenu la transition du pouvoir entre un président américain défait, Donald Trump, et Joe Biden, choisi par une majorité d’électeurs pour lui succéder ? Ces interrogations glaçantes ont escorté, jeudi 13 octobre, la session publique de la commission d’enquête parlementaire sur l’assaut du 6 janvier 2021 contre le Capitole. A son terme, les neuf élus de la Chambre des représentants qui la composent ont pris la décision, à l’unanimité, de citer Donald Trump à comparaître. Un coup d’éclat symbolique, permettant aux élus d’afficher leur souci d’un débat contradictoire. Pour l’heure, l’ancien président n’a pas rejeté de façon nette l’idée de témoigner en direct, s’étonnant simplement du caractère tardif de cette convocation. « Il doit rendre des comptes », a dit le président de la commission, Bennie Thompson, estimant que Trump était « LA personne au centre de l’histoire ».
Les élus savent leur temps compté. Les élections de mi-mandat sont prévues le 8 novembre. Si la Chambre des représentants basculait en faveur des républicains, la commission n’aurait plus que quelques semaines, avant janvier, pour boucler son rapport définitif et recommander éventuellement des inculpations. Il est possible qu’un document intermédiaire soit publié avant le scrutin à venir. Jeudi, la commission s’adressait au public américain pour récapituler les points saillants de sa démonstration, politique et factuelle, développée au cours des huit séances précédentes. Après avoir recueilli près d’un millier de témoignages et épluché une quantité énorme de documents, des éléments inédits ont été révélés.
Le moment le plus intense fut un montage vidéo de séquences filmées au Capitole puis sur la base militaire de Fort McNair, le 6 janvier, où les plus hauts responsables parlementaires, démocrates et républicains, étaient parvenus à trouver refuge. On les voit se substituer à un président défaillant, intoxiqué par ses propres mensonges, refusant sa défaite quitte à saborder la démocratie américaine. « Nous devons finir la procédure [de certification de l’élection], ou alors ils auront une victoire complète », dit Nancy Pelosi, la présidente démocrate de la Chambre des représentants, marchant d’un bon pas dans les couloirs lors de son évacuation. Il est alors 14 h 23, les émeutiers ont pris d’assaut le bâtiment et recherchent physiquement certains élus, ainsi que le vice-président Mike Pence, qui a refusé de bloquer la certification de l’élection, comme le lui demandait Donald Trump.