L’arrestation de l’opposant, Ousmane Sonko, dont la garde à vue est prolongée, continue à provoquer une vague de colère à travers le pays, notamment à Dakar et dans plusieurs localités de l’intérieur. Au-delà de Sonko, ces scènes d’émeutes urbaines traduisent avant tout l’exaspération d’une grande partie des populations sénégalaises face à leurs conditions de vie de plus en plus difficiles dans le pays. Aussi, beaucoup d’observateurs estiment que l’arrestation de Sonko constitue un acte de trop posé par le président Macky Sall, accusé de museler ses opposants.
En effet, l’arrestation, le 3 mars 2021, de Sonko, troisième de la présidentielle 2019 et pressenti comme un des principaux concurrents de celle de 2024, a provoqué la colère de ses partisans, mais aussi, disent de nombreux Sénégalais, porté à son comble les frustrations suscitées par les conditions de vie depuis la pandémie de Covid-19.
Dans la foule, beaucoup exprimaient leur ressentiment contre le Président Macky Sall.
Aussi, Dakar la capitale, a vécu, le vendredi 5 mars 2021, des scènes de guérilla urbaine entre les forces de l’ordre et des centaines de jeunes réclamant la libération du principal opposant au pouvoir en place. Plusieurs quartiers de Dakar ont connu des affrontements d’une ampleur inconnue depuis plusieurs années, bien que la riposte policière semble se limiter essentiellement aux moyens antiémeutes. « Quatre personnes ont été tuées dans les émeutes », a annoncé le Gouvernement, promettant de mettre en œuvre tous les moyens nécessaires pour ramener l’ordre.
La bataille a laissé, après coup le spectacle saisissant, des rues vidées de gens et de véhicules, jusqu’aux proches abords des lieux du pouvoir et jonchées de projectiles de toutes sortes, entre les magasins tous fermés.
Dans le quartier populaire de la Médina, au cœur de la capitale sénégalaise, à l’arrêt, des groupes de jeunes scandant « Libérez Sonko ! » ont harcelé en jetant des pierres sur les nombreux policiers, dans les nuages de lacrymogènes et les déflagrations de grenades assourdissantes.
Les localités de l’intérieur du pays ne sont pas non plus épargnées par l’ire des Sénégalais.
Ainsi, des violences secouent aussi la Casamance, la Région dont est originaire la famille d’Ousmane Sonko. Sédhiou, au centre de la Casamance, le Gouvernorat a ainsi été attaqué, ce jeudi, 4 mars. Le vendredi lendemain, une grande manifestation a éclaté à Ziguinchor pour exiger la libération de l’opposant interpellé pour une affaire de viol.
L’arrestation d’Ousmane Sonko a libéré une exaspération accumulée devant la dureté des conditions de vie. Nombreux sont les Sénégalais qui dénoncent aussi leur ressentiment contre le Président Macky Sall. “Il me semble qu’il s’agit d’une frustration que la population entretient depuis assez longtemps, exacerbée par les restrictions liées au Covid-19. Il y a cette jeunesse qui est en colère contre le système par rapport au manque de perspectives. C’est cette colère-là qui est en train de s’exprimer actuellement dans la rue et qui dépasse clairement le cadre partisan du parti Pastef, le parti d’Ousmane Sonko », explique le politologue Papa Fara Diallo, Enseignant-chercheur à l’université Gaston-Berger de Saint-Louis, au Sénégal.
Les Défenseurs des Droits s’émeuvent
Des restrictions au niveau des médias sont aussi signalées. En effet, dès jeudi soir, les Autorités ont annoncé la suspension du signal de deux télévisions privées coupables, selon elles, d’avoir diffusé « en boucles » des images de violences. Les réseaux sociaux ont rapporté des perturbations sur internet, à l’instar de celles observées dans un certain nombre de pays à l’initiative des Gouvernants dans les périodes de crise. L’observatoire spécialisé Netblocks a confirmé des restrictions sur les réseaux sociaux et les applications de messagerie, affectant le partage de photos et de vidéos sur Facebook, YouTube, WhatsApp et Telegram. Ces mesures ont suscité la colère des organes de défense des Droits de l’Homme. Aussi, les Défenseurs des Droits humains s’émeuvent de la réponse des Autorités. « Les Autorités sénégalaises doivent immédiatement cesser les arrestations arbitraires d’opposants et d’activistes, respecter la liberté de réunion pacifique et la liberté d’expression, et faire la lumière sur la présence d’Hommes armés de gourdins aux côtés des forces de sécurité », a déclaré Amnesty International.
Au Niveau de la communauté internationale, le Secrétaire Général de l’ONU, Antonio Guterres, s’est dit “très préoccupé” et a appelé à « éviter l’escalade des violences ». Pour sa part, Amnesty International a réagi face à la décision des Autorités sénégalaises de suspendre pendant 72 Heures Sen TV et Walf TV, deux chaînes de télévision privées, coupables, selon elles, de diffuser “en boucles” des images des scènes de violences déplorées. Des restrictions sur les réseaux sociaux et les applications de messagerie, affectant le partage de photos et de vidéos, ont aussi été relevées.
Mémé Sanogo
Source: Journal L’Aube- Mali