Après deux victoires de la musique et un succès qui reflète la longévité de leur carrière, Amadou et Mariam font leur retour en toute simplicité avec leur disque «La Confusion». Engagé dans la vie comme sur la scène, le tandem délaisse cette fois-ci les collaborations pour se recentrer sur lui-même et aborder des sujets graves tels que l’exil ou la violence.
Comment pourrait-on décrire ce nouvel album?
Amadou: «C’est un mélange de disco, de blues, de rock avec de la musique africaine mais sans collaborations.»
Pourquoi ce choix?
Mariam: «On a préféré faire seulement du ‘Amadou et Mariam’, comme au début.»
Côté texte, vous abordez l’exil, la violence, les fractures du monde… Vous avez une vision plutôt négative de la société.
A.: «Ce n’est pas faux mais cette vision existe. Nous essayons toujours de chanter les choses de la vie quotidienne pour décourager les mauvaises habitudes ou encourager les gens à aller sur le bon chemin. On a aussi rendu hommage aux femmes.»
C’était important pour vous?
A.: «Oui, on veut leur rappeler qu’on pense à elles et qu’il faut mettre leur travail en lumière.
Une délégation de femmes maliennes a récemment expliqué au ministre Didier Reynders, qu’elles se sentaient sous-représentées dans la résolution du conflit au Mali alors qu’elles en sont pourtant les premières victimes.
A.: «Effectivement. Pour nous, il faut que toute la population soit incorporée dans cette histoire parce qu’on a une façon de parler qui est différente des politiques. En Afrique, les femmes sont souvent marginalisées dans les prises de décision et les débats alors qu’elles peuvent avoir la solution.»
Vous avez l’impression de porter la voix des femmes africaines à travers vos chansons?
A.: «Du peuple malien en général. Nous essayons toujours de mettre d’accord les uns et les autres et d’évoquer une union, une cohésion. Partout où nous chantons notre message est le suivant: ‘Vive l’entente, vive la paix’.»
M.: «Et vive l’amour.»
Qu’est ce qui fait votre succès depuis de si nombreuses années?
A.: «Cela vient de notre enfance. On écoutait beaucoup de musiques anglaise, française, américaine ou encore les Pink Floyd bien qu’on ne parlait pas l’anglais. On a essayé de trouver notre chemin par rapport à ça. On voulait aller de l’avant et entrer dans la culture des autres.»
Où trouvez-vous encore l’inspiration aujourd’hui?
A.: «C’est un peu compliqué parce que quand on a commencé il n’y avait pas d’industrie de la musique au Mali. Du coup, on a composé beaucoup de chansons que l’on mélange aujourd’hui aux nouveaux morceaux. Et puis, je travaille aussi un peu en direct.»
M.: «Des fois, on compose dans le studio directement.»
A.: «Par exemple, la chanson ‘Dimanche à Bamako’ a été composée la veille de l’enregistrement studio. Et quand il y a des morceaux que l’on n’arrive pas à développer après quelques années, on les change en Français et ça marche.»
A.: On est habitués (rire). On s’est rencontrés à l’institut [des jeunes aveugles de Bamako, NDLR]. Mariam chantait alors que moi je jouais dans les orchestres. Quand on a commencé à jouer ensemble ça a fait plaisir à tout le monde. Ils trouvaient déjà qu‘on était bien en tant que mari et femme, ça nous a beaucoup facilité la tâche.»
Où vous imaginez-vous dans dix ans?
A.: «Un peu en retrait de tout ça. En 2018, ça me fera 50 ans de musique et 42 ans pour Mariam. Peut-être qu’on pourrait conseiller les jeunes artistes et puis faire des arrangements ou des projets humanitaires.»