Appelé dernièrement à s’impliquer d’avantage et plus visiblement dans l’application des accords visant à ramener la paix dans l’Azawad et plus particulièrement sur Kidal, le secrétaire générale du HCUA n’a pas encore pris la mesure de l’engagement qu’il lui est demandé.
Est-il véritablement prêt à franchir le pas vers la réconciliation ? Cherche-t-il à temporiser le processus pour faciliter la réhabilitation de Iyad ag Ghaly avec l’appui de l’Iman Dicko ? Ou manœuvre-t-il pour son propre compte pressentant que le chef d’Ansar Dine est définitivement hors course malgré les derniers sursauts médiatiques d’un fauve acculé ? Ce sont les questions auxquelles il devra répondre rapidement risquant de se faire reléguer, comme Iyad ag Ghaly, au rang de terroriste refusant la paix aux Azawadiens.
En effet, nous sommes en droit à d’avantage de clarté quant aux intentions du leader du HCUA. Malgré une apparente main tendue récente vers les autres groupes armés, il n’en demeure pas moins qu’Al Ghabass ag Intallah laisse entrevoir une manœuvre visant à maintenir la communauté Ifoghas comme ethnie dominante sur le plan politique. Ce comportement à peine caché dénote une fois de plus qu’il ne fléchira pas sur certains aspects de la réconciliation, notamment le fait de maintenir les Ifoghas aux commandes des organes politico-sécuritaires et donc d’une certaine façon de rester les maîtres de l’Azawad. Ag Bibi, son conseiller politique, est d’ailleurs catégorique à ce sujet car il craint le suffrage universel prévu dans les accords. Ce suffrage qu’il risque de perdre face à la communauté Imghad numériquement plus conséquente. Les tentatives de retardement voire d’avortement de l’arrivée du Gatia sur Kidal en est une démonstration flagrante. Al Ghabass ag Intallah a été jusqu’à écrire au chef de la MINUSMA dénonçant l’arrivée provocante du général Gamou sur Kidal alors qu’il lui avait fraternellement convié à le faire conformément aux accords d’Anéfis via ce même intermédiaire. Cette orchestration démontre un double jeu corrosif et malhonnête. Cette vision féodale Ifoghas et les difficultés que montre le HCUA à partager le pouvoir dans la zone Nord ne manquera pas de raviver les heurts intercommunautaires et les incendies politiques. Devons-nous rappeler à Al Ghabass ag Intallah qu’il devra forcément composer avec le Gatia au risque de se retrouver associer personnellement à Iyad ag Ghaly et le HCUA tout entier à Ansar Dine ?
A la question de la réhabilitation de Iyad ag Ghaly, le secrétaire général du HCUA joue à un jeu trouble et malsain. En effet, comment peut-on affirmer publiquement que le HCUA et la CMA n’ont aucun lien avec les groupes terroristes et envisager soutenir le chef d’Ansar Dine dans un projet politique insensé ? Ce double discours cache-t-il encore une manœuvre politique hypocrite visant d’un coté à contenter la communauté internationale en dénonçant le terrorisme et de l’autre à conserver l’hégémonie sur l’Azawad en pactisant avec le diable ? Soulignons tout de même qu’Al Ghabass ag Intallah a été l’un des lieutenants de Iyad ag Ghaly et qu’il faudrait être idiot pour ne pas suspecter l’existence d’une collaboration discrète entre les deux hommes. Celle-ci est d’ailleurs à peine caché par son fidèle adjoint Ag Aoussa, chef de la branche militaire du HCUA. Faut-il en conclure qu’Al Ghabass ag Intallah est un pantin d’Ansar Dine inséré au HCUA distillant le venin terroriste au sein des groupes armés ?
Enfin, pourquoi ne pas envisager un repositionnement politique du leader du HCUA jouant ainsi sa propre partition ? Nous ne pouvons mettre de coté l’idée qu’Al Ghabass ag Intallah manœuvre pour son propre compte en mettant en avant une possible réhabilitation politique de Iyad ag Ghaly, qu’il sait condamnée d’avance. Si nous suivons cette idée, plus vite Iyad ag Ghaly disparaitra du paysage, plus vite il pourrait se placer comme représentant légitime de l’Azawad aux yeux du gouvernement Malien ce qui expliquerait son passage à Bamako pour une entrevue particulière avec le président. En d’autre termes, nous ne pouvons pas écarter qu’Al Ghabass ag Intallah manipule le chef d’Ansar Dine pour se construire une carrière politique… Il n’est plus à démontrer que la fin de Iyad ag Ghaly est proche car il est reconnu comme terroriste par la communauté internationale et il apparait sur la liste de la cours pénale internationale. Ce mandat d’arrestation le suivra partout où il ira se cacher, dès lors une carrière politique au Mali pour le chef d’Ansar Dine l’exposerait aux policiers UNPOL. Le leader du HCUA le sait pertinemment et compose probablement en ce sens. A cette question de repositionnement politique, Al Ghabass ag Intallah se montre une fois encore ambigu. En effet, pourquoi ne pas s’opposer directement à la réhabilitation de Iyad ag Ghaly ? le craint-il ou travaille-t-il de concert avec le chef d’AQMI au Mali ?
Pour conclure, Al Ghabass ag Intallah, secrétaire général du HCUA a la responsabilité politique, communautaire et militaire de se positionner clairement vis-à-vis d’Ansar Dine et de son chef ainsi que vis-à-vis de ses intentions politiques en faveur de la paix et des accords. Des réponses concrètes et surtout des gestes forts et démonstratifs en faveur de la paix et des accords sont impératifs pour ne pas être désigné définitivement comme la vitrine politique d’Ansar Dine (et donc d’AQMI), qui nous le savons rejettent l’état Malien et la réconciliation. D’ici la réunion inter communautaire à Kidal, programmée d’ici le 15 mars prochain, la sécurité de la ville engagera la responsabilité d’Al Ghabass ag Intallah. Son avenir politique se joue maintenant ; sa légitimité et sa respectabilité, aussi. Une implication réelle dans le MOC serait un premier pas significatif. Le silence comme réponse à ces questions sera forcément le signe d’une forme d’asservissement à la cause djihado-terroriste des « coupeurs-de-mains ». La CPI pourra alors sévir !
Paul Louis Koné