Frôle-t-on une crise diplomatique entre la RD Congo et les États-Unis ? En tout cas, le gouvernement congolais et la représentation diplomatique américaine se rendent coup pour coup à Kinshasa. Au cœur de leur différend : l’arrestation et la détention de Darryl Lewis par les services de sécurité congolais.
Pour le ministère congolais de la Justice, ce citoyen américain, arrêté le 24 avril lors du meeting de l’opposant Moïse Katumbi (dispersé à coups de grenades lacrymogènes à Lubumbashi), ferait partie d’un « réseau avec une société basée en Virginie, aux États-Unis, qui assure le recrutement de mercenaires spécialisés dans la formation, le maniement des armes, comme agents de sécurité ou gardes du corps ».
Entre Kinshasa et l’ambassade américaine, qui a raison ?
Il ne s’agirait que de mensonges, selon l’ambassade américaine à Kinshasa, qui s’est dit jeudi « profondément préoccupée » par la tournure prise par cette affaire. Pour elle, « M. Darryl Lewis n’était pas armé et les allégations selon lesquelles il était impliqué dans des activités de mercenaires sont fausses ». Et de souligner que le ressortissant américain « travaille dans une société privée américaine qui fournit des services de consultation à des clients à travers le monde entier ».
C’est d’ailleurs en tant que « conseiller de sécurité », selon l’ambassade, qu’il se trouvait auprès de Moïse Katumbi, fraîchement déclaré candidat à la présidentielle.
Darryl Lewis a reconnu sa seule qualité d’expert en armements, selon Kinshasa
Mais les autorités congolaises ne l’entendent pas de cette oreille. « Si fausses allégations il y a dans cette affaire, elles sont donc le fait de M. Darryl Lewis qui a obtenu son visa de séjour en RDC en se déclarant expert agricole, alors que lors de son audition (…), il a reconnu sa seule qualité d’expert en armements et en matière de sécurité », rétorque, le 6 mai, le gouvernement dans un communiqué.
« Qu’il [Darryl Lewis] n’ait pas été porteur d’armes à feu lors de son interpellation n’enlève rien au fait qu’il a usé de fausses déclarations sur ses activités et intentions réelles, ce qui constitue une infraction pénale », poursuit le texte qui rappelle que les enquêtes en cours s’intéressent également à « plusieurs sujets étrangers, dont des Américains comme Nickolson Maurice Allan, Allan Green Coleman, David John Mercer, James Logan Jones, Toon Junior O’Neil et d’autres qui ont récemment séjourné en RDC ».
Katumbi plaide pour une « enquête internationale »
Le gouvernement congolais demande enfin à l’ambassade des États-Unis de ne « pas se substituer aux cours et tribunaux [de la RD Congo en occurrence, NDLR] », en « [s’arrogeant] le pouvoir d’y dire le droit et de décréter en dehors de toute procédure judiciaire [la] culpabilité ou [l’]innocence » des ressortissants américains « en délicatesse » avec la justice dans un pays étranger. Que répondra la représentation américaine dans la capitale ?
Pour l’instant, des « réunions de crise » se succèdent dans son QG, avenue des Aviateurs, à Kinshasa. En attendant, Moïse Katumbi, également visé dans cette affaire dite des « mercenaires », demande à la Monusco, la mission onusienne en RD Congo, d’assurer sa protection. Et plaide pour l’ouverture d’une « enquête internationale ».
Source: Jeune Afrique